Chapitre 48 Jour nouveau - Partie 3

5 minutes de lecture

***

- Je l'ai tué, avoua Hank.

 À cet instant, le cœur de Sin fo s'arrêta. Elle eut l'impression que le sol venait de s'ouvrit sous ses pieds. Elle ne pouvait pas croire ce qu'elle venait d'entendre. Et pourtant, c'était bien réel, et ces mots résonnaient à ses oreilles. Ces trois mots terribles. Je. L'ai. Tué. Mort. Reg'liss était mort. Et son meurtrier était juste en face d'elle.

 Sin fo sentit une colère noire l'envahir et son pouvoir se déchaîner en elle. Elle leva la main et dirigea les pics de pierre contre le meurtrier. Les yeux brouillés par les larmes, elle vit la silhouette se reculer, et leva instinctivement un mur pour la retenir. Sin fo était déterminée à éliminer l'assassin jusqu'à ce qu'elle voie du sang poindre sur sa joue. Cette petite tache rouge attira son attention et sa colère s'estompa légèrement.

 Elle réalisa alors que c'était Hank qui se tenait en face d'elle. Hank qui l'avait tant soutenu. Hank qui avait toujours été à ses côtés. Hank qu'elle avait tant aimé. Hank qui lui avait menti toutes ces années. Elle éclata en sanglots et arrêta d'utiliser son pouvoir. Hank s'avança vers elle, et pendant une seconde, elle voulut se blottir dans ses bras jusqu'à ce que sa peine disparaisse, mais sa colère était plus forte, et elle le stoppa en lui disant :

- Ne vas pas croire que je t'ai pardonné. Si je ne te tue pas, c'est uniquement parce que je ne suis pas comme toi.

 Elle avait craché le dernier mot comme une insulte, afin de lui faire du mal.

- Mais je ne veux plus jamais te voir de ma vie.

 Sin fo se tourna immédiatement et se mit à courir, car elle ne voulait pas laisser le temps à Hank de s'expliquer, de s'excuser. Elle était trop furieuse pour l'écouter. Sa colère était si forte qu'elle altérait son pouvoir. Elle sentit la terre trembler sous ses pieds, et vit des pics de pierre apparaître autour d'elle sans qu'elle l'ait voulu. Elle entendit la voix de Tabatha dans son dos, mais continua à courir. Elle ne voulait voir absolument personne.

 Après avoir couru plusieurs minutes et avoir traversé la moitié de la ville, Sin fo s'arrêta pour reprendre son souffle. Elle se pencha en avant et se soutint de la main droite sur un mur. Elle sentit un picotement dans la main, et vit avec effroi que la pierre du mur s'était fondue autour de sa main. Elle tenta de retirer sa main, mais elle était bloquée. C'était comme si elle ne faisait plus qu'un avec le mur.

 Sin fo prit peur, car cela faisait des années qu'elle n'avait pas été dépassée par son pouvoir. Sa peur accéléra le processus, et elle vit la pierre couler comme du liquide et remonter le long de son bras. Elle laissa libre cours à sa colère, ce qui eut pour effet de faire voler la pierre en éclat et ainsi la libérer, mais également d'exacerber ses facultés. Le mur se lézarda et s'effondra vers l'intérieur, et son don de perception, qu'elle maintenait d'ordinaire en sommeil, se déchaîna et elle eut soudainement conscience de tous les êtres vivants se trouvant dans un rayon de quinze kilomètres.

 La somme d'informations était colossale, et si elle ne parvint pas à tous les différencier, elle se rendit clairement compte que quelqu'un venait dans sa direction. Craignant que ce soit Hank, elle reprit sa fuite. Tout en courant, elle tenta de refréner son don de perception afin de pouvoir garder l'esprit clair.

 Mais elle ne pouvait pas garder le contrôle de ses deux facultés, et son pouvoir sur la terre s'emballa. Partout sur son passage des pavés éclatèrent, des briques se délogèrent de leurs murs, et des pics surgirent dans tous les coins. C'était comme si toutes les pierres étaient attirées par Sin fo.

 La jeune femme sortit de la ville afin de ne blesser personne. Elle gravit la colline et se laissa tomber à genoux au bord du chemin. Elle prit sa tête dans ses mains et tenta de reprendre le contrôle. Si elle contenait complètement l'une de ses facultés, l'autre la submergerait. C'est pourquoi elle se laissa envahir par les deux et tenta de les calmer petit à petit.

 En quelques secondes, un mur de pierre l'entoura et s'éleva à plus de trois mètres. Elle percevait toujours la présence de tout ce qui vivait à quinze kilomètres à la ronde. Puis son champ de perception se rétrécit peu à peu, et les pierres autour d'elle s'élevèrent de moins en moins vite. Après quelques minutes d'effort mental, Sin fo parvint à stopper tout mouvement de pierre et à remettre sa perception en sommeil. Elle ressentit seulement un tremblement familier, qui l'avertit que quelqu'un l'avait suivie jusque là.

- J'ai dit que je ne voulais plus te voir, cria-t-elle.

- Sin fo tu ne peux pas rester là dedans, lui répondit la petite voix de Tabatha à travers la paroi de pierre.

- Va-t-en Taby, je veux rester seule, reprit Sin fo avec une voix légèrement radoucie.

- Si tu ne veux pas sortir, alors c'est moi qui vais rentrer, la mit en garde Tabatha.

 Sin fo ne répondit pas. Après quelques instants, elle entendit que Tabatha donnait des coups répétés contre la paroi, probablement avec une branche. Sin fo n'était pas inquiète. Elle savait que la princesse ne pourrait jamais entamer sa muraille de cette manière. En effet, après un long moment, les coups cessèrent et le mur ne portait aucune marque.

 Sin fo attendit encore quelques minutes, et comme elle n'entendait plus rien, elle ouvrit une fente dans le mur et passa la tête à l'extérieur. Elle vit un bâton posé contre le mur, mais Tabatha avait disparu. Sin fo entendit soudain un juron au dessus de sa tête et reçut une pierre sur le haut du crane. Elle leva les yeux pour voir Tabatha qui était suspendue à près de trois mètres du sol, avec un pied qui pendait dans le vide.

- Qu'est-ce que tu fais là haut, s'inquiéta Sin fo.

 Tabatha sursauta sous l'effet de la surprise et regarda Sin fo entre ses jambes.

- Ça se voit, non ? Je n'ai pas réussi à casser ton mur, et je ne voulais pas m’abîmer les mains en creusant, alors je passe par au dessus.

- Mais comment as-tu réussi à grimper si haut ?

- Ton mur n'est lisse qu'à la base. En prenant appui sur le bâton, j'étais assez haute pour atteindre les aspérités.

- Tu ne me laisseras pas tranquille, n'est-ce pas, demanda Sin fo avec un petit sourire.

- Pas quand il est évident que tu as besoin de moi.

 Sin fo écrasa une larme au coin de son œil et renifla. Puis elle posa sa main sur la paroi de pierre et la creusa pour former une échelle qui monta jusqu'à Tabatha.

- Allez, descend, tu as gagné. Nous allons discuter.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire William BAUDIN ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0