Chapitre 24

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Le samedi matin, Attila fit le zouave en se réveillant ; il cherchait son jouet dans la chambre, et bouscula une chaise. J’émergeai, un peu désorientée, mais la tête de mon chien me fit rire. Il avait l’air de dire « moi ? J’y suis pour rien ! », cet air qu’il avait toujours lorsqu’il venait de faire une bêtise…

« Tilou, viens-là ! » appelai-je à mi-voix. Il s’approcha gentiment, et je m’assis au bord du lit pour le caresser.

« Alors, mon grand, il est où, ton Pouic-Pouic ? » Il alla le chercher, et le jouet en caoutchouc fit POUIC ! (d’où le nom…) lorsqu’il le prit un peu fort entre ses dents.

« Hein ?? » grogna Paul, réveillé en sursaut. J’éclatai de rire, il était trop drôle comme ça, la trace de l’oreiller sur la joue, les yeux encore bouffis de sommeil, et l’air de se demander ce qui se passait…

« Mon fils debout à huit heures un week-end ! Tu es tombé du lit ? » se moqua Alain en nous voyant descendre l’escalier. Je laissai Paul préparer le petit-déjeuner le temps d’aller faire le tour du pâté de maisons avec Attila, et à notre retour tout le monde était levé et attablé. Si ça, ce n’était pas la famille Ricoré…

« Alors, les jeunes, vous allez à la mer, aujourd’hui ? » demanda Christine, et Paul me regarda :

« Ça te dit ? On pensait y aller à vélo, et pique-niquer sur la plage.

_ Oui, je suis partante. »

Je confectionnai des sandwiches avec Paul pendant que ses frères préparaient les vélos, et on partit vers dix heures. Attila courait sur le bas-côté de la route, à ma hauteur. Je l’avais laissé en liberté, sa laisse était dans mon sac à dos. Les garçons braillaient des bêtises, faisaient la course, et moi je pédalais comme je courais : avec régularité, en prenant conscience de mon souffle, et de mon corps. Je regardais le paysage aussi, et savourais cette délicieuse odeur de pinède.
Il était midi passé lorsque nous sommes arrivés à la plage. Nous avons attaché les vélos, et en arrivant sur le sable je me suis arrêtée. Attila s’arrêta près de moi, et leva la tête pour me regarder. Paul, lui aussi, me regarda : « Tu ne viens pas ?

_ Si, si, j’arrive. »

J’ôtai mes chaussures pour marcher dans le sable : c’était doux, agréable, ça passait entre les orteils, massait la plante de mes pieds… Je prenais mon temps, Attila flairait le sable et l’air, la truffe au vent. Stanislas et Guillaume étaient loin devant, ils avaient déjà commencé à étaler sur le sable une couverture pour s’installer.

« Ça ne va pas Louise ? » s’inquiéta Paul. Il faut dire, moi qui d’habitude ne tenais pas en place, là j’étais plantée dans le sable, à regarder, écouter, sentir l’océan.

« Si, si, ça va. C’est juste… C’est la première fois que je vois la mer en vrai.

_ Sérieux ? Vingt-trois ans, et jamais vu la mer ? » Les yeux lui sortaient presque de la tête !

On devait y aller, l’été suivant le divorce de mes parents : Papa, Virgile, Nicolas et moi, avec Mathie. Mais ma mère m’avait emmenée avant. Bien sûr, il n’avait pas été question de vacances tant que j’avais vécu seule avec elle, et ensuite, mes frères m’avaient fait découvrir la montagne…

Paul m’a enlacée, et a posé ses lèvres sur mon front.

« Ça va, Paul, promis. Ça ne m’a pas réellement manqué, tu sais, j’ai vu la mer à la télé. C’est juste plus beau en vrai. »

Il sourit. Moi aussi. Puis nous rejoignîmes ses frères qui s’impatientaient. Nous étions presque seuls sur la plage, c’était calme.

Attila s’éloigna en direction de l’eau, je le regardai s’en approcher, flairer l’écume, reculer un peu quand une vague vint lécher ses pattes. J’éclatai de rire, et ôtai short et T-shirt pour ne garder que mon maillot de bain. Les garçons me regardèrent faire, un peu étonnés.

« Tu sais nager, au moins ? » me demanda discrètement Paul.

« Mais oui ! » répondis-je en courant. Je n’avais jamais vu la mer, mais j’étais allée à la piscine avec l’école, et je m’étais baignée dans des lacs et des torrents, en montagne.

Je ralentis en arrivant près de l’eau, pour tâter la température avant de me lancer, mais elle ne semblait pas froide. Il faisait 20°C dans l’air, un temps magnifique pour une fin septembre. Attila était déjà dans l’eau, et je le rejoignis en quelques bonds, me jetant d’un coup dans les vagues. Ce n’était pas très chaud, mais en bougeant ça allait. Je nageai quelques brasses, jouai avec les vagues et avec mon chien.

Paul avait enlevé chaussures et chaussettes, roulé le bas de son pantalon, et trempait ses pieds dans l’eau. Ses frères étaient courageusement restés au sec. Mon chéri m’attendait, ma serviette de randonnée à la main, qu’il déplia pour m’accueillir à ma sortie de l’eau. Il me souriait, amusé. Je devais avoir l’air d’une gamine, tout excitée par la mer. Je me séchai rapidement, et je me collai à lui pour l’embrasser. Pas longtemps, toutefois, de peur de ne pas résister à l’envie de le déshabiller séance tenante pour lui faire l’amour sur le sable. Pas devant ses frères, tout de même…

Après le repas et une partie de frisbee, on quitta la plage lorsque les gens commencèrent à arriver en milieu d’après-midi : nous avions un peu de route pour rentrer.

Nous avons rangé les vélos dans le garage, et alors que j’allais ressortir j’entendis Paul s’extasier :

« Montre-moi ta merveille, Stan ? Elle est chouette… »

Je me dirigeai vers eux, qui tournaient autour d’une grosse moto noire. Ils parlaient moteur, vitesse, puissance… Paul enfourcha l’engin, posa les mains sur les poignées. Je m’approchai : « Tu fais de la moto ?

_ Oui. J’ai mon permis depuis cinq ans, mais j’ai revendu ma bécane l’an dernier, pour m’acheter ma voiture. »

Il descendit de la moto, me serra contre sa hanche.

« Tu es déjà montée sur une moto ?

_ Non, jamais.

_ Ça te dit ? Je pourrais t’emmener faire un tour demain… si Stan est d’accord.

_ Evidemment ! » accepta ce dernier. « Je sais que tu en prendras soin, surtout si ta chérie est dessus ! »

C’était amusant de les voir se taquiner. Ça me rappelait mes frères, et en même temps leur relation était différente.

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