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Je suis une camgirl.
Eh oui,
ceci est une histoire d'amour.
jusque-là rien de bien original.
Je préviens les détracteurs de Lamartine...on y parle de suggestion. Mais faisons un pas l'un vers l'autre, il y a aussi du cul bien entendu.
Je n'ai jamais aimé Gustave Flaubert.
Premièrement, mon lycée portait son nom et présentait une citation en laticlave à l'entrée de l'établissement. Cette citation résonne encore, chaque matin difficile, lorsque dans le métro à 7h30, cuvant ma soirée de la veille (vielle ? J'ai fêté mes 26 ans ce mois-ci...), je pars travailler à reculons :
« j'aime mon travail d'un amour frénétique. »
Droit de réponse ? Nique ta mère.
De plus, vivant proche de la station Filles du Calvaire, je trouvais, même sur le coup, cette coquetterie de l'univers extrêmement plaisante. Et j'avoue avoir, à cet instant, trouvé l'univers sexy... mais nous aurons tout le temps de revenir sur mes penchants objectophilo-mégalo-œdipiens plus tard.
Je n'ai donc jamais aimé Gustave Flaubert, ni pour son souvenir, encore moins pour son oeuvre.
A sa décharge présenter la neurasthénique Bovary à un par-terre de lycéens dont le seul mérite était d'être juste assez bien nés pour approcher une certaine élite marocaine, celle qui « va à la mission »... et je dis bien « approcher » et non appartenir, car comme il serait d'usage maintenant dans des termes volés à la start-up nation, le lycée Gustave Flaubert était « la version gratuite et peu agile » d'une véritable mission française à l'étranger (pléonasme s'il en est), puisqu'en côtoyant la population française, je me suis vite aperçue qu'il ne s'agissait pas d'un terme usité dans l'Hexagone.
Je vous fait donc le plaisir de mon étymologie personnelle ;
Mission française : Terme barbare pour signifier une déférence plus ou moins assumée à un passé, certes colonial, mais lucratif.
Enfin, au delà de la pédagogie qui serait dans ce cas plus imputable aux curricula de l'éducation nationale, j'avais en horreur son écriture.
Moi qui, à l'époque, aimais à me penser en lectrice aguerrie (bien plus que je ne l'étais en réalité), mais comme pour beaucoup j'aimais surtout l'idée d'aimer lire, eu égard à mes facilités en langue française. Piège inévitable des orgueilleux ; un autre bel héritage du sadisme de l'éducation à la Alain : souffrir pour mieux apprendre, ne consulter que les « oeuvres classiques » et surtout, ne jamais les remettre en question.
Malheur à celui dont l'esprit sera un et entier, celui qui aura l'audace de présenter un avis critique, puisque sa situation le deviendra tout autant.
Fort heureusement, malgré ces comportements grégaires, rétrospectivement un peu humiliants, je peux au moins me consoler d'une chose : si je ne pouvais pointer ce que j'aimais, j'ai toujours su ce qui ne m'allait pas.
Flaubert pourtant, m'a séduite un jour (ce qui en dit long sur mes convictions littéraires dès qu'il s'agit de cul).
Tombant par hasard sur ses correspondances avec Louise Colet, je lis dans une lettre de 1853 :
« Lamartine se crève, dit-on. Je ne le pleure pas [...]. Non, je nʼai aucune sympathie pour cet écrivain sans rythme, pour cet homme dʼÉtat sans initiative. Cʼest à lui que nous devons tous les embêtements bleuâtres du lyrisme poitrinaire, et lui que nous devons remercier de l'Empire : homme qui va aux médiocres et qui les aime. [...] Il ne restera pas de Lamartine de quoi faire un demi-volume de pièces détachées. Cʼest un esprit eunuque, la couille lui manque, il nʼa jamais pissé que de lʼeau claire. »
Ce qui nous a vraiment rapproché, bien que je l'eusse détesté, comme on déteste un aliment par habitude, et non par haine, d'une détestation structurelle, j'ai vu dans cet acte, le culot de nos meilleurs punchliners contemporains.
Respect.
Culot car à défaut d'écrire de bons romans, il se prêtait à l'exercice critique ( qui je le crois sous-tend une jalousie particulière que seuls les artistes, ou ceux qui le prétendent, peuvent réellement ressentir) :
« Cʼest un ouvrage médiocre [que celui de Lamartine] quoique la meilleure chose que Lamartine ait faite en prose. Il y a de jolis détails... Deux ou trois belles comparaisons de la nature [...] : voilà à peu près tout. Et dʼabord, pour parler clair, la baise-t-il, ou ne la baise-t-il pas ? Ce ne sont pas des êtres humains, mais des mannequins. Que cʼest beau ces histoires dʼamour, où la chose principale est tellement entourée de mystère que lʼon ne sait à quoi sʼen tenir ! lʼunion sexuelle étant reléguée systématiquement dans lʼombre, comme boire, manger, pisser, etc. ! Ce parti pris mʼagace »
Somme toute, cette réflexion liminaire en dit long sur la façon dont j'aborde l'altérité. Son altération, pour être plus précise.
Envers le genre masculin ?
Pourquoi pas tous ?!
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