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En cette fin de journée d’octobre, l’horizon infiniment vide s’étirait désespérément, sous un ciel qui ne se décidait pas à être beau ou chassieux. La mer était à peine formée, des creux de moins d’un mètre battaient sans force les flancs de l’énorme bâtiment, cinglant les côtes Françaises de la mer du nord. « Il » se tenait sur la passerelle aux vitres crasseuses, constellées de chiures de mouches, digne comme Napoléon considérant la « Morne plaine », seul face à son destin aussi vide que l’horizon, droit dans ses baskets en dépit du sort funeste qui s’acharnait consciencieusement sur lui, l’air sinistre d’un Français en pleine dépression et sans le moindre anxiolytique, à qui l’on aurait demandé de travailler « plus ».

La situation n’était pas désespérée et c’est un euphémisme.

Tel était capitaine Lorenzo, à son poste, commandant le pétrolier Bouïa, 240 mètres de long, bourré jusqu’à la gueule de diesel et d’un fret « non répertorié », dont nous ne parlerons pas, battant (temporairement et provisoirement) pavillon Chypriote et parti de Kaliningrad sous un autre nom et un autre pavillon dont nous ignorons tout.

La corne enrouée de l’aviso qui l’escortait opiniâtrement depuis deux bonnes heures et qui s’impatientait, fit sursauter Lorenzo. Car il faut préciser qu’un bâtiment de la marine nationale était à la poursuite du pétrolier et insistait fortement pour qu’il mette en panne afin de procéder à un contrôle.

— Qu’est-ce qu’on fait Sidi ? redemanda pour la énième fois Momo, le timonier Marocain, un type grand, maigre, légèrement voûté, le cheveu ondulé et rare sur le dessus, ce qui le contrariait fortement, un visage encore poupin malgré sa quarantaine bien sonnée, des yeux vifs, un visage expressif qui se crispait à la moindre contrariété.

Et il faut bien avouer qu’avec Lorenzo, le pauvre était servi côté agacement.

— On fonce ! À fond ! grogna le Capitaine.

— Babababa… fit Choukrane, le second, levant les yeux au ciel. Ça va casser, Sidi ! J’t’aurais prévenu ! Ça va péter !

Choukrane l’égyptien, galonné, très agacé pour ne pas dire plus, d’avoir été écarté du commandement malgré son expérience, par ce « putain de Français de merde qui n’a jamais mis les pieds sur un bateau et qui se prend pour l’amiral Nelson...» était un homme d’ordinaire affable, la cinquantaine, le visage grêlé et congestionné, la barbe drue, le front bas et luisant, arborant le nez de Tabarly à défaut de celui de Cyrano.

— Il est fou « sului-là », marmonna Momo, jetant un regard torve en direction de Lorenzo.

— C’est pas ton bateau, alors ta gueule, grogna Lorenzo qui était d’une humeur massacrante. Je sais ce que je fais !

— T’y es fou, dis ! s’exclama Dodi, le cuistot pakistanais bedonnant, baignant dans son jus, couvert d’une substance huileuse douteuse, résidus de sa cuisine incrustés dans ses frusques, accouru sur la passerelle, affolé par le grondement sourd des machines agonisantes qui ébranlait le navire, laissant le graillon du dîner cramer sur le feu.

— Ils vont envoyer les commandos, ils vont nous taper ! On va souffrir ! Oh mon Dieu ! se lamenta-t-il.

— Il est fou « sului-là », répéta Momo, de plus en plus nerveux.

Il faut bien comprendre que l’équipage ne portait pas vraiment « son » nouveau capitaine dans son cœur, trouvant « le Français » comme ils l’appelaient… raciste, dédaigneux, hautain, hypocrite, totalement incompétent, insupportable… Enfin bref, un sale Français quoi, pure produit de la France actuelle et de son éducation nationale, la meilleure du monde comme chacun sait.

— Il faut appeler la patronne ! fit Momo dans un accès de colère, tapant du poing sur la console de commande. Elle…

— Quoi elle ? fit une voix féminine à l’accent Russe, impérieuse et froide comme la glace.

Une grande blonde, élancée, cheveux tirés en arrière, front bombé, yeux gris, vêtue d’une combinaison militaire noire de para, tout à fait seyante au demeurant, était entrée sur la passerelle et se frayait un chemin jusqu’au capitaine en bousculant l’équipage sans ménagement.

Lorenzo daigna se retourner et la considéra impassible, une lueur impénétrable s’effaça rapidement de ses prunelles.

— Lorenzo, tu fiches quoi ? Il faut stopper le navire ! C’est la marine Française que tu as au cul ! C’était prévu, borrrdel !

Oui, la jolie blonde roulait les « r ».

— Jamais !

— Déconne pas ! Ils peuvent rien contre nous. On a des papiers en règle. Tu les laisses faire leur cinéma et…

— Avec la police Française ? Jamais ! fit Lorenzo, balayant la requête d’un revers de la main. Le droit, les lois, ça ne veut rien dire en France. C’est « l’esprit des lois » qui domine, l’interprétation qu’on en fait et là il n’y a de limite que l’imagination. Aussi, on n’est jamais sûr de rien ; si tu es dans leurs mains, t’es foutu. Je sais ce que je dis !

— C’est pas la police, c’est la marine ! Tu perds la tête, mon pauvre ! éructa la blonde qu’on peut appeler Sonia parce qu’en réalité qui peut dire son nom véritable.

— Il est fou « sului-là », j’te l’ai dit, déjà ! C’est un sale Français de merde ! explosa Momo.

Lorenzo fusilla Momo du regard, puis :

— Momo, tu la fermes, ou je te la ferme ! Je ne suis pas Français, bordel !

— Menteur ! T’y es pas algérien non plus ! T’as pas la figure ! fit-il joignant un geste de la main sans ambiguïté à la parole, puis il cracha au sol, signe d’un mépris le plus total pour le Français.

— Ni Belge ! renchérit Choukrane.

— T’es Français et c’est tout, conclut Dodi, quel malheur !

— Non ! Jamais ! Je suis pas Français, bordel !

Un silence gêné se fit sur la passerelle. Malgré tout, on ne pouvait s’empêcher d’avoir pitié de lui, car en vérité, je vous le dis, il n’y a pas pire destin en ce monde pourri que celui d’un Français de base, nourri à l’hypocrisie, biberonné de socialisme pluriel bien pensant, couvé de liberté qu’il n’a jamais connu qu’en rêve, materné de sécurité sociale qui pense à sa place.

Un constat simple s’impose : on n’a pas encore inventé d’antidépresseur suffisant pour le Français moyen. Il faut dire qu’on n’a plus de labos pharmaceutiques dans ce pays non plus, alors on ne risque pas de… Passons.

Quant à Lorenzo, son esprit bouillonnait de pensées parasites, car en cet instant crucial, pour ne pas dire à ce tournant de son existence, son identité nationale le taraudait et l’empêchait de se concentrer sur son salut. Se penser Français ? C’était décidément au-dessus de ses forces. Mais qui peut décemment se revendiquer tel ? Qui ? En conscience ? Ce peuple de poltrons, de haineux envieux, de cossards invétérés dont l’arrêt de travail est le seul but dans la vie, d’impénitents présomptueux voulant faire la leçon au monde, dont la révolution avait abouti à raccourcir leur monarque pour finalement s’en coller un nouveau au suffrage universel et qui par-dessus tout, avaient voté deux fois pour le pire du pire, « le maître des horloges » dont le grand œuvre fut de mettre le pays tout entier en prison quatre fois. Quatre fois, bordel !

Non, un humain de base avec quelques neurones fonctionnels (cela exclu tous les fumeurs de chichon, j’en conviens et il ne reste plus grand monde, hélas) ne se pouvait nullement se revendiquer Français. N’importe quoi d’autre, mais pas ça. Et d’ailleurs aucun autre pays au monde ne voulait d’un Français. Même en payant c’était chose impossible.

Lorenzo en avait fait l’amère expérience. Aussi s’était-il résolu à tenter le mariage avec une étrangère. Encore fallait-il trouver une femme compatissante… Mais cela est une autre histoire.

Reprenons.

N’y tenant plus Momo reprit :

— Tu vois comme il me parle ? fit-il, désignant Lorenzo à Sonia. Il me bat, oui, oui… Il est méchant ! Il m’a traité de « basané » !

— C’est fini, oui ?! J’en ai marre de vous deux ! gronda Sonia. Lorenzo, tu es payé pour ce job et même bien payé, tu as accepté, alors fais-le !

Pour toute réponse, Lorenzo se contenta de hausser les épaules.

— À fond ! J’ai dit à fond ! ordonna-t-il.

— Sidi, on est déjà au maximum. Ça va péter j’te dis, fit Choukrane, complètement affolé. L’aiguille s’est barrée… Mais regarde le cadran… C’est un vieux rafiot Russe… Ça peut pas… Ça se peut pas...

— Ne dis jamais ça ! corrigea Sonia. C’est un bâtiment Chypriote ! Ne commencez pas à déconner vous autres! Tu vois ce que tu fais Lorenzo ? Ils étaient bien, au point, et maintenant, ils déconnent à plein !

Indifférent, Lorenzo s’était approché de la console et regardait, suspicieux, le cadran que lui montrait le second.

— Pfff ! Quoi, ce truc-là ? fit-il. C’est rien… Le matos russkof, c’est indestructible.

Sonia, au comble de l’agacement, leva les yeux au ciel. Elle sortit brusquement un flingue et :

— Toi, là, stoppe ce navire ! fit Sonia, braquant le timonier.

— Capitaine, je fais quoi ? fit Momo.

— C’est moi qui commande ! éructa Sonia. Tu le sais bien, non ? Bougre de… De… Bosser avec des… Merde alors !

— Bah, lui, « sului-là » il me tape ! tenta d’expliquer Momo.

— Je le tape pas… Juste je corrige… C’est pour son bien. C’est amical, fraternel, rien de… colonialiste dans tout ça.

— Tu vois ! Tu vois ! fit Momo, montrant le poing à Lorenzo.

La corne de l’aviso retentit de nouveau avec insistance. La situation n’était pas désespérée. Elle était… foutue.

Lorenzo avec un calme… totalement stupide, une inconscience absolue, digne d’un général Français en pleine débâcle en 1940, s’interposa :

— Tu es complètement inconsciente ma pauvre. Tu ne peux pas tirer alors que tu es sur un pétrolier. T’as pas vu que tu es sur un BATEAU, fit-il remarquer, narquois.

— Quoi… balbutia Sonia dont les neurones n’arrivaient plus à fonctionner devant tant d’absurdité.

Elle ne parvenait pas à décider si Lorenzo était con ou complètement con.

— Mais… Mais… Lorenzo, enfin… Tu… Quoi ?

— Quoi ? Tu peux pas tirer ! C’est un bateau, on est sur l’eau, bordel ! ânonna Lorenzo et désignant l’océan à perte de vue.

— Heu… Et alors ?

— Il est fou, j’t’ai dit ! fit Momo.

— On va tous mourir, fit Choukrane, désespéré. Mais pourquoi vous avez choisi ce type pour capitaine. Sa place est dans un asile.

— Bah… Il cochait toutes les cases, murmura Sonia, songeuse.

— La faute au Français, fit Dodi. Ils vont nous taper ! On va souffrir.

Sonia dodelinait du chef.

— T’es complètement barge, mon pauvre Lorenzo. Ça t’a monté à la tête, les galons… C’est pas un avion ! C’est un pétrolier géant !

— Et alors ? Tu fais un trou dans la coque et on coule, comme des abrutis ! Glou, glou, glou… Bonjour les poissonets… C’est ça que tu veux ? Vas-y, tire. Tu sais nager ?

Cette remarque frappée au coin du bon sens en réalité, il faut bien en convenir, laissa la passerelle totalement médusée, sidérée. Il faut bien reconnaître un certain génie dans l’esprit Français, dont les autres peuples sont dépourvus.

Sonia ne put se retenir plus longtemps et éclata de rire, baissant sa garde, le temps suffisant pour Lorenzo qui la désarma avec une prestesse confondante et des années de larcinage derrière lui.

Sonia eut un hoquet de rage.

— Je vais chercher Safet et les gars. Ils vont te corriger ! Tu vas redescendre mon pauvre. Racaille !

— Tu me menaces ? À moi ? À moi tu menaces ?!

— Oui, je te menace petit con de Français ! Je vais me gêner ! Non mais tu t’es vu ?

— Sale Français ! approuva Momo.

— C’est une mutinerie ?! fit le capitaine, toujours très digne, bombant le torse.

Le Français à la classe, les pieds dans la merde, mais la classe indéniable. C’est tout.

Lorenzo fixa durement la jolie blonde et elle soutint son regard ; ses prunelles brillaient de rage, ses narines étaient frémissantes. Oui, indubitablement, c’était le genre de femme qui peut pousser un mec à faire des conneries dans la vie. Enfin, comme toutes les femmes, non ? Parce qu’en réalité, les femmes font toujours faire aux hommes les choses les plus débiles. D’une manière ou d’une autre.

Je me trompe ? L’inverse est vrai ? Peuh...

Choukrane s’interposa :

— Heu… « Capitaine sidi »…

— Oui ?

— Tu m’as dit de te prévenir…

— Et ?

— On est dans les eaux internationales.

— On met en panne, fit Lorenzo.

— Mais… Ils ne peuvent plus rien contre nous alors ? s’enquit Sonia.

— En fait, ils nous pourchassent depuis si longtemps que je ne crois pas que ça les arrêtera, expliqua le second. Cependant, ils n’auront pas les coudées aussi franches. On peut toujours en référer à la compagnie qui...

— Oui… Faites ça ! approuva Sonia.

— « Capitaine sidi » ? demanda le second à Lorenzo.

— Ouais, ouais… Fais-le.

Sonia se tourna vers Lorenzo et murmura :

— Viens, il faut qu’on parle !

— J’ai rien à te dire, je sais très bien ce que j’ai a faire.

— Mais bordel, t’es pas « vraiment » capitaine, tu te rappelles ! Allô, mais allô quoi ! T’es pas marin ! T’es qu’une petite frappe de banlieue ! Un paumé sans le sou que j’ai ramassé...

— Et toi ? Tu t’es vue ? Terroriste de mes deux ! Tu crois que j’ai pas compris ce qui se trame ? Je sais tout ! J’ai tout vu !

— Et tu vas fermer ta gueule et jouer ton rôle. Prépare-toi, on va être abordé. Tu fais comme on a dit, pas d’improvisation, le plan.

— Nan !

— Non ? Quoi non ?

— J’ai rien signé ! Ils vont me coffrer, parce que je suis Français. Pas de cage pour Lorenzo ! Jamais.

— Écoute-moi bien… Je…

Un grand gaillard surgit tout essoufflé :

— Sonia, faut se planquer ! Viens ! Vite !

— Mais…

Lorenzo la regarda s’élancer pour quitter la passerelle.

— Tu oublies ton feu, ma poule, fit-il toujours aussi insolent.

Elle fit demi-tour prestement et s’empara de l’arme.

— Fais pas le con Lorenzo. On s’aime non ?

— Ouais… C’est sûr. Le grand amour.

— T’es trop…

Elle se résigna à tenter sa dernière carte et le galocha baveusement. Il y a une telle facilité pour les femmes, même les plus indépendantes à redevenir courtisanes. Ce n’est point une critique, juste une constatation. Si, si...

Sonia pensait que foutu pour foutu, des fois avec ce genre de mec, ça pouvait marcher. Surtout un type qui emmène une meuf à un dîner galant, manger un tacos-piment dans un food-truck, en bordure d’une voie rapide par temps pluvieux, parce que c’est « le meilleur tacos du monde, ma poule, tu vas te régaler » et que « c’est moins cher ». La Lorenzo’s touch quoi. Il y a des femmes qui ne s’en sont pas remises et qui sont restée choquée à vie, indélébilement marquée par ce charisme indubitable. J’en connais. Si, si… Certaines ont aussi gardé des séquelles hémorroïdaires terribles, ceci explique peut-être cela.

À peine eut-elle tourné les talons que Lorenzo se précipita, retira sa vareuse galonnée et se retrouva en Marcel crasseux puant la sueur, espadrilles, jean troué, casquette Pikachu vissée sur le crâne. Il avait l’air OQTF cent pour cent, casual mode, la métamorphose était saisissante.

Pour tout dire, aux yeux d’une Française socialo-plurièle-métissée-divorcée-CMU, il était tout simplement bô, le genre qu’elle ramène chez elle, les yeux brillants d’amour, en se disant qu’enfin un mec allait la baiser sauvagement et lui faire voir les étoiles qu’on voit dans les séries françaises avec en toile de fond un camping et des sanitaires collectifs…

Oui, c’est aussi ça la France, des années de travail acharné des élites pour faire de ce pays ce qu’il est devenu, le premier du monde, le champion toutes catégories.

Bref, sur la passerelle l’équipage en bavait de stupeur et j’ose le dire, d’envie.

— Bon, les mecs, je m’appelle Nawaz Bouli ! Fini Lorenzo ! Y a plus de Lorenzo !

— Mais capi…

— Y a plus de capitaine ! Nawaz c’est moi !

— Oh le con ! fit Choukrane, consterné.

— Bordel, fit Dodi. T’es Bengali alors ?

— Voilà ! Lui, il a tout compris.

— Nan, mais même pas en rêve, s’insurgea Momo. Alors là… Alors quand ça t’arrange, les immigrés...

— Tu la fermes et c’est tout, Momo, j’en ai marre de toi.

— Il est fou, « sului-là », conclut Momo alors qu’un uniforme immaculé faisait irruption sur la passerelle, suivi d’un commando de fusiliers-marins

— Lieutenant de vaisseau Gonzague de la Moletrique. Marine Française. Ce bâtiment est désormais sous notre contrôle pour une investigation de routine. Où est le capitaine ?

On entendit une (en réalité, plusieurs) mouches voler.

— Vous comprenez ce que je dis ? En anglais peut-être ? insista le lieutenant.

— Te casse pas, ils comprennent que dalle, intervint Lorenzo, tout sourire, tendant la main que l’officier dédaigna de serrer.

— Ah… Vous comprenez le français… Fort bien. Est-ce là tout l’équipage ?

— Bah oui, c’est pas la « croisière s’amuse ».

— Et vous êtes ?

— Nawaz Bouli, cousin.

— Veuillez vous adresser à moi en disant…

— Oui, oui, mon chef. Tu sais que t’es dans les eaux internationales…

— Hein ? Pardon ?

— Fais-y voir, Capitaine… fit Lorenzo, s’adressant au pauvre Choukrane, totalement dépassé par les évènements, qui bégayait piteusement.

— C’est lui le capitaine ? demanda le lieutenant.

— C’est « sului-là » le capitaine ! beugla Momo au comble de l’exaspération. Le sale Français ! Là !

Une crispation terrible déformait les traits du pauvre Momo, scandalisé dans son moi profond par la perfidie Lorenzocienne et qui tendait un index accusateur dans sa direction.

— Momo, ta gueule ! rugit Lorenzo. Tu la veux celle-là, tu la veux, dis ?

— Non pas « ma gueule » ! C’est « sului-là » ! C’est lui ! Ce… Ce… shawarma !

— Moi shawarma ? Comme ça ? Tu me balances ça ?

— Oui ! Capitaine de mes deux !

— Pauvre muharij ! fit simplement Lorenzo, le malheureux perd la boule. C’est le delirium… Il en a trop pris...

— Moi muharij ? éructa Momo.

— Qui d’autre ! T’as vu ta tête ? Vous trouvez pas qu’il a une sale tête ? Nan, sérieux...

— Attends tu vas voir ta gueule, s’insurgea Momo, se ruant tel un fauve sur le pauvre Lorenzo.

Une bagarre terrible éclata sur la passerelle exiguë comme un orage d’été balayant tout. Échouant dans sa tentative d’étranglement, Momo s’en prit au mollet de Lorenzo, le mordant au sang, tel une bête enragée. Dans un chaos indescriptible chacun se débattait, criait, tapait à l’aveugle. C’était la guerre.

Soudain, deux déflagrations se firent entendre. Tout le monde s’immobilisa. Le lieutenant venait de tirer en l’air, enfin au plafond…

— T’y es fou, dis, c’est un bateau ! On tire pas dans un bateau ! s’exclama Dodi aux prises avec deux fusiliers.

— Hein ? fit le Lieutenant… Heu c’est pas un avion !

— On a quand même 60000 tonnes de carburant volatile à bord, fit Choukrane.

— Des fois les balles ricochent et on peut couler ! dit Momo, ceinturé par deux hommes, la bave aux lèvres.

— Je vous ferai remarquer que j’ai tiré au plafond !

— Putain, il a fait deux trous au plafond, constata Lorenzo. Le boss va pas aimer. En plus en dehors des eaux territoriales françaises… C’est un incident diplomatique, ça.

— Comment ? Mais c’est…

— Ah… Je me sens partir… continua Lorenzo. C’est une bavure de la Marine Française. Fais une photo avec ton téléphone Choukrane ! Balance ça sur YT !

— Qu’est-ce que vous racontez ? Qu’est-ce que vous osez dire ?

— Ah, Ah ! Je meurs !

— Il est vachement mal, mon chef, fit Momo. Putain, le Français… dis tu vas pas mourir, hein ?

— Ils ont tué le capitaine ! Salauds, fit Dodi.

Le lieutenant examina Lorenzo, se pencha sur sa plaie au mollet et haussa le sourcil droit.

— C’est une plaisanterie ?

— Je sens la gangrène me bouffer l’os…

— C’est fini oui ?! Qu’est-ce que c’est que cette mascarade ? Et vous arrêtez avec ce téléphone ! Lâchez ce téléphone !

— C’est un scandale ! dit Choukrane, très dignement. D’autant que nous n’avons commis aucune infraction au code de la navigation.

— Mais… Mais… Refus d’obtempérer ! Refus…

— Nous avons un problème de machines… Nous sommes en sous effectifs comme vous pouvez le voir, indiqua Choukrane.

— J’exige de parler au capitaine ! C’est « lui » ? fit le Lieutenant désignant Lorenzo. Je sais que c’est lui !

Tous les regards se tournèrent vers le pauvre Nawaz-Lorenzo, qui jouait admirablement la grande scène 2 acte 3 d’Omelette : to be or not to be… Not to be !

Vous voulez savoir comment Lorenzo s’est retrouvé dans cette situation ?

Vous voulez savoir ce qu’il va arriver ensuite ?

Vous voulez savoir si le bô Lorenzo va mourir de la brutalité de la marine nationale ?

Vous voulez savoir qui est cette Sonia ?

Vous voulez savoir si Lorenzo va épouser Sonia et lui faire des gosses?

Vous voulez savoir si la France va finalement se débarrasser de… non ça vous le savez déjà.


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