Chapitre 19 Le don de soi

2 minutes de lecture

Égoïste. Égocentrée.

Voici la réponse que je recevais à la question : "Quels sont mes défauts ?"

À ma réponse étonnée, et à ma demande d’explications, d’exemples concrets où je m’étais conduite de telle façon, ma sœur aînée me reprocha mon attitude :

  • Tu ne te remets jamais en question. Tu veux toujours avoir raison.
  • Tu réclames le monopole de l’attention, ajouta ma petite sœur, avec mépris.

En silence, blessée plus que fâchée, je quittai la salle à manger après une altercation assez violente.

Ce n’est que plus tard, auprès d’une psychologue — et maman merveilleuse — que je discutai de ce que j’avais ressenti à cet instant, et pourquoi.

Les personnes hypersensibles représentent environ 20 % de la population, me dit-elle. Elle me classait dans les 4 % les plus sensibles. Peu m’importait, tant qu’elle m’aidait à comprendre.

Je lui expliquai combien je m’étais sentie blessée, et combien la honte, la gêne, m’avaient submergée. Étais-je si égocentrée que je ne m’en rendais même pas compte ? Mes comportements étaient-ils si blessants ?

Elle me répondit calmement :

  • Tu accordes beaucoup d’importance à tout. Et à tout le monde. Tu retiens, tu écoutes, tu prends soin. En échange, tu attends — inconsciemment — que les autres agissent de même avec toi.
    Tu donnes énormément. Et, subjectivement, tu espères recevoir autant.
  • Or… quand tu demandes cette attention, les personnes autour de toi, qui ne pensent pas comme toi — qui ne se disent pas “Comment puis-je leur être utile ? Comment puis-je leur faire plaisir ? Ai-je trop parlé ? Est-ce que j’ai blessé quelqu’un ?” — ces personnes, disons “normales”, puisqu’elles sont la majorité et que le nombre fait la norme, elles ne voient que ce que tu demandes. Pas ce que tu donnes.
  • Alors oui, elles te trouvent égoïste. Égocentrique.

Je lâchai une larme. Je n’avais jamais été aussi bien comprise de toute ma vie. C’était… bouleversant.

  • Tu te définis en fonction de l’autre. Tu es un papillon social, un people pleaser. Si tu ne le fais pas, tu te sens vide, n’est-ce pas ?
  • Oui…
  • Une carrière dans le soin envisagée, je suppose ? Tu dis toujours que ça va, même quand ça ne va pas — sauf aux personnes qui te connaissent bien. Et même à elles, pas toujours. Tu te fiches de l’argent. On ne peut pas te dire radine. Ni d’émotions. Ni de don.
  • Oui…
  • Mais tu vas quand même devoir apprendre à prendre soin de toi. Ta santé ne va pas souvent bien ? Hypersensibilité, encore. Anxiété ? Angoisse ? Pareil ? Tu vas devoir apprendre l’économie. Doser le don.
  • Pourquoi doser le don ? Parce qu’on ne peut pas verser d’eau d’une cruche vide. Parce que s’oublier à force d’aimer les autres, ce n’est pas de l’amour : c’est une lente disparition. Parce que ceux qui donnent sans mesure sont souvent ceux qui pleurent en silence, quand plus personne ne regarde. Parce qu’aimer, ce n’est pas s’effacer. Parce qu’on mérite aussi d’être rempli, nourri, aimé. Et parce que donner mieux commence par se donner à soi.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Papillon Bleu ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0