Lettre N°8 - 28/07/20

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Coucou Abuelo,

Je ne sais pas comment je suis supposée commencer cette lettre, sûrement par les bonnes nouvelles. Les mauvais nouvelles ne sont jamais plaisantes à entendre...

Alors c'est parti ! Depuis lundi on est à Lyon, maintenant que mes études sont lancées et que je n'ai pas eu droit à une chambre du crous, il me faut un petit appartement. Je vais aller droit au but, on l'a trouvé, j'ai un appartement. Nous avons validé ce matin la location. je crois qu'il t'aurait plu. Il y a deux grand placards de rangement ( la pensée qui me vient à l'esprit malgré moi, quand je t'écris ces mots c'est : « ce n'est pas les rangements que tu m'aurais fait, toi »).

Je t'ai parlé de mauvaise nouvelles, mais en réalité c'est plus des mauvais sentiments. Je me sens mal. Je me sens vide. Je me sens triste. Je me sens en colère J'essaie de refouler tous ces sombres sentiments, afin de vivre ma vie comme tu le voulais. Je suis certaine que tu veux que je profite de tous les moments que m'offre la vie. Tous les moments de ma nouvelle vie d'étudiante.

Mais, le problème c'est qu'il y a toujours ces pensées qui me hantent :

- « Je ne pourrais jamais te faire visiter mon appartement » ;

- « Je ne pourrais jamais t'inviter à manger une bonne raclette » ;

- « Tu ne pourras pas non plus me faire de beaux meubles en bois ni de la décoration »

J'en suis la plus attristée, crois moi. Je suis passée devant l'université, là encore tu ne pourras même pas la voir. Ni me connaître en tant qu'étudiante, tu ne sauras pas non plus que j'ai finalement réussi à prendre le russe comme option. Et tu ne pourras même pas me raconter comment tu étais toi, en tant qu'étudaint.

Toutes ces pensées sont si dures à supporter, je sais bien qu'il ne faut pas que je pense à ce qu'on ne pourra pas faire ensemble, mais bel et bien à tout ce qu'on a déjà pu vivre ou partager toi et moi. Me concentrer sur les bons moments. Sauf que c'est plus fort que moi, d'un côté je me réjouis de tout ce qui se passe et de l'autre je suis frappée par la réalité et je culpabilise de me réjouir de ce qu'il m'arrive.

Abuelo, tu me manques. Tu me manques réellement, j'ai un vide immense à l'intérieur de mon cœur. Je suis désolé de pleurer encore, je sais bien que je t'avais pourtant promis de ne plus être aussi triste, mais c'est encore très difficile. Je pense trop à tout ce que je ne pourrais pas vivre avec toi.

Je pensais être sur la bonne voie du deuil, non pas le fait que tu sois parti, mais le fait j'accepte ton départ. Plus le temps passe et plus je me rends compte que je suis encore très loin de l'avoir accepté.

Mais pire que tout pour moi, en ce moment, demain c'est mon anniversaire. Demain j'aurai 18 ans, et je trouve ça dur de devoir les fêter sans toi. Mais je ferai avec, je n'ai pas le choix. De toute façon je suis très loin d'être la seule à avoir perdu quelqu'un à qui je tenais. Les autres ils continuent à vivre au bout d'un moment ils ne s'appitoient plus sur leur sort, moi j'ai l'impression de me morfondre en permanence.

Je ai alors expliqué à Tom ce que je faisait quand je n'allais pas bien. Que je t'écrivais des lettres, que je te parlais, car ça me donnait le sentiment que tu étais toujours là. Parce qu'écrire me correspond, j'aime ça, c'est vraiment moi. Et d'une certaine manière ça nous relie toi et moi. L'écriture te correspondait aussi beaucoup à toi qui écrivais tout le temps, surtout afin de rien oublier. La moindre petite info tu la notais sur un bout de feuille blanche.

Je lui ai alors expliqué ce que je faisait quand je n'allais pas bien. Que je t'écrivais des lettres, que je te parlais, car ça me donnait le sentiment que tu étais toujours là,. que tu mécoutait Parce qu'écrire me correspond, j'aime ça, c'est vraiment moi. Et d'une certaine manière ça nous relie toi et moi. L'écriture te correspondait aussi beauoup à toi qui écrivait tout le temps, surtout afin de rien oublier. La moindre petite infos tu la notait sur un bout de feuille blanche.

Je me souviens de ton écriture assez particulière, j'arrivais à lire que certains morceaux de phrase. Je me rappelle aussi de toutes ces feuilles volantes de notes éparpillées dans toute ta maison ou dans tes livres ou même dans divers endroits de ton atelier. Tu en avais partout ! Et de fil en aiguille, j'ai réalisé. J'ai réalisé que ce livre que j'écris actuellement tu ne le verrais jamais. Que même si un jour, je parvenais à réaliser ce rêve que j'ai de faire publier un de mes livres, toi tu ne pourras pas le lire ni me dire ce que tu en penses. A ce moment là, c'était comme si tu étais parti une deuxième fois.

Sauf que cette fois, c'était bien plus réel et bien plus dur encore que tout ce que j'avais déjà resssenti. J'ignore pourquoi d'ailleurs.

J'ai été prise d'un hurlement silencieux, comme ceux dans les films — où l'on voit une personne hurler, et que le son est soudainement coupé — qui déchirent le cœur. J'ai été prise d'une crise de sanglots si forte que j'avais vraiment l'impression d'hurler de douleur. Je te promets, cette douleur était seulement à l'intérieur de moi, de mon cœur et pourtant elle m'est apparue aussi réelle qu'un homme de chair.

C'est à ce moment là, que Tom s'est finalement effondré, lui aussi. Lorsqu'il a vu cette douleur qui émanait de moi. D'ailleurs, je dois te faire passer un message de la part de Tom :

« C'est pas cool de nous faire pleurer tous les deux comme ça. Mais alors vraiment pas sympa, tu aurais pu plutôt nous faire rigoler. Mais bon, on doit quand même te dire merci, parce que c'est grâce à toi que Laure a un appartement. »

Minuit vient de passer, tu m'as à l'instant souhaité un joyeux anniversaire. C'est toi le premier qui l'a fait, dans mon cœur du moins. J'aurais aimé que tu le souhaites en espagnol comme d'habitude.

Après avoir attendu cette heure tardive afin que le jour de mon anniversaire arrive, je m'en vais dormir.

Te quiero Abuelo, te quiero con todo mi corazón !

Pour une fois je te fais une demande : veille sur chacun de nous, de là-haut. Sur nous cinq. Nous six avec petit Creeps, que tu as si bien surnommé - le petit pot de colle.

Ta grande,

Laure

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