BERNARD-MARIE  (SUITE)

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  Les techniciens souterrains, assistés de Luna, travaillaient depuis plusieurs semaines pour améliorer la machine destinée à se connecter aux réseaux de surface. Ils espéraient pouvoir augmenter la capacité de mémoire de façon à charger au moins trente lignes de texte. Cela permettrait de propulser, à destination de Sélène et Adrien, un témoignage assez conséquent de leur existence et de leur mode de vie. Et puis pourquoi pas, de révéler à leurs congénères l’existence d’un univers parallèle… Mais seraient-ils prêts à le recevoir ? Et cela serait-il opportun ? Cela remettrait leurs sacro-saints dogmes sur la sellette.

  Quand ils touchèrent enfin au but, ce fut dans le laboratoire un débordement d’allégresse. Il fallait voir tous ces passionnés d’informatique, d’ordinaire si mesurés, sauter de joie et s’embrasser comme s’ils venaient de faire décoller le fusée Saturne V ! Puis, Luna s’employa à rédiger le texte à destination des surfaces. Ceci fait, elle chargea le document dans l’interface. Il ne restait plus qu’à annoncer la bonne nouvelle…

  Gaspard et Luna se dirigeaient vers la villa Léandre. Ils avaient du mal à progresser parmi les gens qui erraient dans l’air vicié de la capitale. Par chance, en haut de la butte Montmartre, l’air était un peu plus respirable ; eux, de toutes façons, n’étaient pas affectés par le manque d’oxygène. Ils entrèrent dans l’appartement, l’ordinateur poussif était allumé. Adrien et Sélène attendaient patiemment assis sur leurs fauteuils. Quand ils se rendirent compte que leurs visiteurs étaient arrivés, ils se levèrent pour les saluer. L’attitude qu’ils affichaient était assez comique. Vous savez, comme lorsqu’on cherche à percevoir quelque chose d’invisible… Gaspard prit la parole :

— Bonjour les amis, bienvenue… Voilà ! Nous avons rencontré l’écrivain Bernard-Marie Vesly. Nous avons de la chance, car il a accepté de collaborer avec nous. Il a eu une idée géniale : raconter, dans son prochain bouquin, la façon dont Marcel a été à l’origine de sa belle carrière ! Il a même prévu de parler de vous et de vos aventures ! Je pense que ça va faire du bruit dans les médias. À vous.

En réponse, l’écran de l’ordi de Sélène afficha le texte qui révélait l’essentiel du fonctionnement des souterrains, des hypothèses du professeur Bill Hawkins sur la théorie des cordes, de ses recherches et des nombreux mystères qu’il y avait encore à découvrir…

  Sélène et Adrien prirent le temps de lire le message en entier. Ils s’interrogèrent particulièrement sur la mystérieuse dimension de « l’oubli ». Évidemment, personne ne pouvait leur apporter de réponse en temps réel, et de toute manière, pour savoir de quoi était faite cette dimension, il fallait attendre un hypothétique retour de Marcel. Avant que les visiteurs ne s’en aillent, Sélène s’adressa à sa sœur :

— Dis-moi Luna, je me demande quelle apparence tu as dans ta dimension… Tu es comme tu étais… Je veux dire physiquement… Quand tu es tombée dans le puits ? Non… C’est une question idiote. Fais comme si j’avais rien dit. Je t’embrasse.

— C’est bien une question de fille… Marmonna Adrien entre ses dents.


***


  Son bouquin n’était pas encore sorti, et d’ailleurs, même pas complétement écrit, que BMV monopolisait déjà les émissions littéraires. Les rédactions et les journaux télévisés se le disputaient avec frénésie. Sur tous les plateaux, le vieil écrivain se répandait à gros bouillons au sujet de son prochain best-seller. En affairiste éclairé, il préparait déjà le terrain qui lui permettrait de récolter les fruits de son habile stratégie. Les multivers et Marcel Legrand devinrent rapidement un sujet d’actualité incontournable ! Les théories les plus fumeuses fleurirent sur le web. Les réseaux sociaux, tous plus conspirationnistes les uns que les autres s’en donnèrent à cœur joie. La mayonnaise avait pris !

  Il restait à savoir si cela suffirait à faire revenir Marcel Legrand. Pour Luna, l’attente était éprouvante. Son père lui manquait. Elle avait passé la plus grande partie de sa courte vie physique et de sa vie désincarnée également, à le perdre, à le retrouver, à le reperdre… Comme son Gaspard d’ailleurs. Maintenant ses hommes, elle n’aspirait plus qu’à les garder !



***

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