UN COIN DE CIEL BLEU (2/2)

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Sélène, était impatiente de trouver l’orifice du puits. Passant par la surface, elle remontait déjà le boulevard Haussmann. Elle stoppa devant le numéro vingt-neuf, bientôt rattrapée par Bernard-Marie. Bien qu’il fût plutôt sceptique à l’égard de sa démarche, il pensait que sa connaissance des lieux ne serait pas inutile à la jeune femme. Devant l’entrée du siège de sa banque, il constata :

— Évidemment Sélène, c’est fermé le dimanche ! On ne pourra pas entrer. Tu sais que je connais bien l’endroit… J’y ai mes comptes depuis que j’ai écrit mon premier bouquin !

— Comment on va faire si c’est fermé ? Ironisa Sélène, l’air faussement dépité. Je propose qu’on force la porte d’entrée !

— Tu as vu l’épaisseur ? Et à l’intérieur, c’est pire. Les salles des coffres, sur quatre niveaux, sont protégées par une porte blindée de dix-huit tonnes ! On n’en viendra pas à bout ! J’ai eu un directeur pour ami, il m’avait tout fait visiter ! Alors je connais bien !

— Suis-moi bien, de près, Bernard-Marie !

L’écrivain à ses basques, Sélène, passa à travers l’une des portes d’entrée avec la légèreté d’une ballerine… L’opéra Garnier étant juste à côté, elle avait peut-être effleuré un charme perdu par quelque danseuse étoile… BMV franchit la porte avec moins de grâce. Il n’était pas encore habitué à jouer les passe-murailles.

À l’intérieur de la banque, Sélène, stupéfaite par la beauté des lieux, se figea, muette d’admiration devant le luxe et la démesure du double guichet circulaire. Tout autour, entre les cercles concentriques des deux comptoirs, gravitaient une dizaine de bureaux, peut-être utilisés par des conseillers. Cet ensemble somptueux était éclairé naturellement par une immense coupole de verre et d’acier, les vitraux dorés de la salle du dôme procuraient à ce hall une lumière majestueuse et raffinée.

— Tu as ici, tout le chic et l’élégance de la belle-époque, Sélène. Tu vois la voûte, là-haut ? Elle est à vingt-trois mètres au-dessus de nous ! Et le comptoir ? C’est le fromage… C’est comme ça qu’on l’appelle ici.

— Qu’est-ce que c’est beau… Je viendrais bien m’installer ici… Commenta la jeune femme admirative. C’est pas un endroit pour les pauvres…

— Je ne te le fais pas dire. Moi aussi, je me plairais bien là. Comme un pape au Vatican ! Ce n’est pas ici qu’Adrien t’aurais emmenée en voyage de noces ! Euh… Sélène, tu n’as pas encore pensé à le remplacer depuis son départ ? Si tu es d’accord… Tu sais que je suis libre…

— Eh ! Moi, je ne suis pas libre et… Dis donc, tu n’avais pas l’intention d’aller retrouver ta Marielle, à Vernon ? Remarqua la jeune femme, un tantinet irritée. Va falloir mettre de l’ordre dans tes priorités, mon cher Bernard-Marie !

BMV se rembrunit, quelque peu vexé par cette remise en place plutôt cavalière.

— Bon, reprit-il, mettons-nous à la recherche de cette soi-disant sortie… Si elle existe, elle doit être dans les niveaux inférieurs. Tu crois qu’on va pouvoir passer la porte blindée ? Elle fait plus de cinquante centimètres d’épaisseur…

— Pas de souci, on passe partout.

Quelques secondes plus tard, ils violaient l’immense porte circulaire, toute d’acier, d’or et de laiton, saluant au passage les serpents de métal qui étaient censés protéger l’accès à la salle principale des coffres. Ils passèrent une seconde porte blindée, un peu moins impressionnante, car selon BMV, elle ne pesait que six tonnes ; puis ils descendirent à pied par un somptueux escalier de marbre jusqu’aux quatre niveaux de la salle des coffres pour les particuliers.

— Là, il doit y en avoir des secrets ! Ils sont bien enfermés dans ces coffres privés ! Présuma BMV. Il ne vaut mieux pas savoir…

— Oui, vaut mieux pas… Des secrets de politiques et d’escrocs de haut vol sûrement… Appuya Sélène. Par où on commence à chercher ?

—S’il y a quelque chose, un indice, c’est par terre qu’on va le découvrir. Pas au plafond !

À quatre pattes, le nez sur le sol, ils cherchèrent les traces d’un quelconque passage, un trou de ver, une sortie, n’importe quoi… Mais comme l’avait prévu l’homme de lettres, ils ne trouvèrent rien d’autre que le contact glacial du marbre et des pavements de mosaïque. Après une heure d’inspection minutieuse, Sélène se rendit à l’évidence. BMV avait raison. Si issue il y avait, elle se trouvait forcément dans les souterrains.

— On rentre ? Proposa BMV.

— D’accord, on rentre, acquiesça Sélène, mais on passe par le sous-sol, dehors, c’est trop moche. Accroche-toi à moi, on descend.

— Mais avec plaisir, ma jolie Sélène ! Ne va pas trop vite surtout !

Elle se concentra en faisant celle qui n’avait rien entendu. L’écrivain n’eut pas le temps de profiter de la situation, à peine disparu dans le sol, le duo se posa comme une fleur au pied du puits que Gaspard tentait d’escalader. Tout près d’eux, Marcel n’avait pas relâché sa surveillance. Il scrutait attentivement l’ascension de son gendre.

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