Autant vous le dire de suite, je déteste cette histoire

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Chaque début de journée est identique, dans sa forme ou son fond mais tout se rejoint, et je dois parler, écrire ou bien dessiner ma peine. Je dois continuer de ranger mes cartons, comme quand nous sommes arrivés ici. Faire du tri, faire de la place.
J'ai pris ça de mon père, je suppose, ce besoin d'ordre parfois, savoir où sont mes affaires, comme des memos techniques, trouver chaque choses, les yeux fermés, les mains tendues.
Mes souvenirs, débordant de ma petite cervelle ont fini par dégueulasser mon visage. Ils sont venus dans la nuit, nous étions installés mais sur le fil, comme à notre habitude. Entrelacés sous les draps humides, nos souffles traversaient l’air de part et d’autre de la pièce. Des rêves ou des pulsions, les corps se transformaient en une série de cellules, d’innombrables morceaux de chair se mélangeant à l’amour. Dans la nuit, quand le silence ouvre les portes des secrets, les ténèbres pour se cacher derrière des mensonges éphémères et fragiles.
Ils sont arrivés comme ça, sans que je ne leur demande, et je n’ai rien compris, des images dans le néant, des frissons dans toutes les extrémités de mon corps. Comme des ampoules qu’on allume et qu’on éteint ; vérifier que tout marche bien là-haut.
Souvenirs enfouies, souvenirs refoulées, mensonges inventés, je me suis levée dans la nuit, en plein milieu de l’été et j’ai déballé mes cartons. Plein de poussière et de choses qu’on ne veut pas voir, un aveugle ébloui. J’ai commencé à trier les dates, les photos, les auteurs, mettre de l’ordre dans sa tête, paraître stable, rangée. J’ai sorti les poubelles, les vieilles et celles qui puent, j’ai nettoyé, et je suis retournée me coucher. Pendant des heures, des journées entières. Attendre que la poussière retapisse les murs..


Chaque début de journée est identique, et chaque matin, quand j’ouvre les yeux, je me demande si je veux vivre. Chaque matin, je me lève, j’ouvre l’œil, sec ou mouillé, et je démarre la boucle. J’ai décidé de tout vendre, propriétés, enfants, mes bijoux et ma culpabilité. Etre léger, sans bagues pour écrire, sans les responsabilités trop lourdes, écrire comme un enfant joyeux. Ecrire comme un nouveau-né, recommencé du début, écrire comme un sage du tibet.
Je dois remballer mes cartons, trier, ranger, partir.


Dans le noir ou dans la nuit, nous repartons nous coucher, ivre de vin et de sexe, terminer la boucle. Comme des enfants heureux, des mains qui se cherchent et quelques sourires qui se dessinent, comme si nous n’étions que nous-mêmes, des êtres à la recherche du mieux.

Dans le fond, les journées se suivent, dans la forme, je dois l’écrire et l’incruster sur les poutres de nos vies. Ne pas oublier qui nous sommes, ne pas oublier que nous sommes des êtres libres. Liberté d’ouvrir les yeux devant les images de l’enfance, je ferme les pages, je boucle ce livre, et je remballe mes cartons.

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Commentaires & Discussions

J'entre en maturationChapitre2 messages | 8 ans
Autant vous le dire de suite, je déteste cette histoireChapitre3 messages | 8 ans

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