Aujourd'hui tout va mieux
Il y a des jours où le soleil existe.
Pas une illusion. Pas un rayon volé à travers les rideaux. Non.
Un vrai matin lumineux.
Le genre de matin qui réchauffe même les murs.
Les volets sont ouverts. Les vitres lavées (enfin, à moitié).
Et maman… est debout.
Elle s’est recoiffée, un peu de travers, mais avec une barrette qui clignote comme une étoile.
Elle sourit avec les yeux. C’est nouveau.
Et elle fait du café en chantonnant.
Dans la cuisine, Monsieur Armand est là.
Il verse du lait dans les céréales, comme si ça avait toujours été normal.
Il a une chemise claire, une moustache fraîchement taillée, et des made-leines dans la poche.
— T’en veux une, Clément ?
— Toujours, Armand.
Ils ne se tiennent pas la main. Mais ils se regardent et se comprennent sans parler.
Il y a de la lumière.
Dans les plantes qu’on a replantées (même la menthe !), dans les bocaux de lettres que maman a décidé d’ouvrir, une par jour, "comme un calendrier d’amour".
Il y a de la lumière même dans les photos. Celle de la plage. Celle de papa, aussi. Maman l’a posée sur la table. Elle l’a regardée longtemps, puis elle a dit :
— C’est le passé. Mais toi, Clément, t’es mon demain.
Et moi, j’ai pleuré. Un soleil dans la gorge.
On a refait la chambre.
J’ai collé des étoiles au plafond. Maman m’a dit :
— Comme ça, même la nuit brillera.
Et le soir, on lit des livres à voix haute.
Armand reste parfois. Il fait les voix avec un talent que je ne soupçonnais pas.
Maman rit. Un vrai rire, qui fait du bruit, et qui secoue les épaules.
Depuis, on sort.
Oui, on sort.
Au parc, là où les balançoires grincent toujours un peu.
Maman me pousse doucement. Pas pour me faire voler. Juste pour me dire qu’elle est là.
Et parfois, Armand pousse aussi.
On prend des photos.
On écrit ensemble une nouvelle météo, chaque matin.
Elle note :
• Mercredi : chaleur affective avec pics d’amour sur le front.
• Samedi : grand beau fixe dans les joues, légères averses de bisous.
Espérance, la plante tordue, a fleurie.
Une petite fleur blanche, comme un miracle discret.
Maman l’arrose tous les matins, avec soin, comme si elle la remerciait en secret.
Et moi, je continue d’écrire.
Mais plus seulement au Soleil.
J’écris à demain.
J’écris à l’amour.
J’écris à la vie, même quand elle boîte.
Et parfois, je m’imagine grand.
Peut-être que je deviendrai livreur de lumière, comme Armand.
Ou écrivain de météo intérieure.
Ou simplement… quelqu’un qui reste, quand le soleil s’absente.
Lettre au Soleil n°14
Cher Soleil,
Merci d’avoir attendu.
On est là.
Plus forts, plus doux.
Et toi, tu peux briller maintenant.
Parce que maman aussi, elle brille.
Annotations