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Il est dix neuf heures trente lorsqu’ils arrivent à la maison d’hôte, commandent le dîner pour vingt heures, juste le temps d’une douche et de se changer. Ils feront le débriefe durant le repas.

Ils font honneur au repas, délicieux, et Lisa fait le topo pour tous avec les dernières infos des légistes et ce qu’a récolté Mia sur l’ogre. Elle fait part aussi de son agacement au fait que la Belgique ne collabore pas davantage. Les policiers marocains aussi ont des nouvelles ; ils ont eu un retour des agences de location de 4X4 et on leur a signalé un groupe de trois hommes, très grands, baraqués et très blonds au fort accent de l’est. L’agence n’a pas fait de copie des passeports mais elle a pris leurs numéros, on va vérifier avec la police des frontières et les gardes de la sureté autour des quelques pistes privées.

- J’ai déjà envoyé les numéros de passeport à la PAF et à la sureté, confirme Hamid ; j’espère qu’on aura un retour et que les gars sont encore là et qu’on leur mettra la main dessus.

- Sauf, dit Louis, si ce sont les mêmes sur les homicides à Paris, auquel cas ils auraient commencé leurs sinistres besognes ici puis se sont envolés vers Paris, ont commis leurs assassinats et se sont planqués.

- Peut-être qu’en Belgique, il n’y a pas grand-chose car il n’y avait personne dans la maison, expose Farouk ; ils ont commencé par là, ont nettoyé les preuves matérielles qui les intéressaient, puis sont venus ici pour tout effacer et ensuite Paris. Dès qu’on aura leur pedigree grâce à leurs passeports, on pourra les relier à l’ogre ou à un autre groupe mafieux.

- Reste le mobile, dit Louis, quel est le mobile ? Punition comme cela semble être le cas à Paris, vengeance, effacement pour couvrir des personnalités impliquées, réponse à chantage ? Ca ne manque pas et ils se tiennent tous. Le diable s’amuse !

- Chers amis, s’exclame Lisa, nous avons bien avancé, je crois. Moi, je vais me retirer pour envoyer le topo à l’équipe et au commissaire et je propose que demain, pour notre dernier jour, nous fassions relâche et que, si vous le voulez bien, nous allions visiter un endroit sympa et reposant, loin des touristes.

- D’accord pour ce programme mais le matin, il nous faudra aller refaire une visite et un topo au commissaire, je suis sûr qu’il sait déjà que nous étions à Agadir et que nous avons vu l’ogre russe.

- Je pense la même chose que vous et on pourrait y aller juste nous deux, hiérarchie oblige, rebondit en riant Lisa après un coup d’œil à Hamid.

- C’est parfait, dit Louis, n’est-ce-pas Hamid ?! Pendant ce temps, on boira du bon café et on fumera deux ou trois bonnes cigarettes dans un jardin de rêve.

- C’est parfait pour moi aussi !

Dans la chambre, en attendant Louis, elle envoie le topo comme prévu et file sous la douche fraîche, elle entend son amant qui entre et la rejoint sous la douche bienfaisante, il la lave, la caresse et lui dit qu’il l’aime, elle se laisse envahir par sa tendresse, l’embrasse à son tour.

- Il faut que je te dise quelque chose, Louis.

- C’est urgent ?! tout en la plaquant contre lui.

Elle réfléchit une seconde à peine, le désir est plus fort.

- Non, ça attendra que l’on soit à Paris.

Et elle se laisse emporter par la vague de plaisir et de bien être qu’il diffuse en elle.

Au petit déjeuner, l’humeur est à nouveau au beau fixe et les deux chefs se dépêchent d’aller à la corvée.

Restés seuls devant leur café et leur cigarette, les deux capitaines apprécient le calme des jardins troublé seulement par les pépiements des oiseaux et le cri éparpillé des deux paons gardiens des lieux.

- Quelle chance tu as, cher ami, d’avoir une femme telle que Lisa comme compagne, elle est belle, intelligente, exceptionnelle pour tout dire. Prends bien soin d’elle car elle a aussi beaucoup de fragilité et de blessures en elle, je le sens.

- Oui, je suis un homme chanceux. Toi aussi, tu es un veinard, tu as un compagnon génial qui t’aime énormément, cela se voit.

- Oui, moi aussi je suis un homme chanceux et je l’aime plus que tout. C’est la première fois que je fais cet aveu à quelqu’un d’autre que lui et ça me bouleverse, vraiment. Nous nous sommes rencontrés à l’école de police, nous avions vingt ans, ça a été un vrai coup de foudre et nous ne sommes plus quittés depuis quatorze ans. J’ai peur que ce pays ne nous sépare tôt ou tard, c’est pourquoi je voudrai tant partir en France ; mais pour Farouk, ce n’est pas simple, il a de l’ambition.

- Et toi, tu n’as pas d’ambition ?

- Si ! lui ! finit tristement Hamid, c’est pathétique, tu ne trouves pas ?

- Tout finira par s’arranger, tu verras, mon ami.

- Sinon, nous avons prévu d’aller plutôt vers les montagnes, il y fera plus frais et les paysages sont beaux et tranquilles.

- Parfait ! Ce sera parfait !

Ils restent là, silencieux, savourant encore un café et une cigarette. C’est là que leurs équipiers les trouvent, à demi assoupis sur leurs fauteuils. Farouk vole un baiser à son amant :

- Allez debout ! On y va, plus de corvée, plus de boulot pour la journée

- Oui, sauf si ton téléphone sonne ou te délivre un message.

- A l’impossible, nul n’est tenu ! Allons prendre nos maillots et serviettes et partons, j’ai demandé à nos hôtes de nous préparer une glacière pour le pique nique de déjeuner, elle nous attend sous le patio, à la réception

Louis est déjà sur ses pieds en train d’étirer son grand corps un peu endolori et se dépêche d’aller chercher les maillots et serviettes.

La route vers l’Atlas est magnifique sous ce franc soleil et ils bavardent joyeusement. Lisa pense aussi ; à comment lui parler de son passé et ne pas laisser des mensonges ou des omissions s’installer entre eux, à comment lui dire qu’elle a été négligente et lui aussi et qu’il faudra qu’elle fasse un test de grossesse d’ici une à deux semaines, à comment lui dire qu’elle ne pourrait plus se passer de lui maintenant. Elle renvoie cela à leur retour à Paris, après sa petite fête d’anniversaire.

La journée s’écoule comme un rêve, ils se baignent dans un lac à l’eau presque glaciale sous un soleil ardent, dévorent le pique nique, font à pied le tour du lac en parlant de tout et rien et rentrent à la nuit tombée, heureux. Demain réveil de bonne heure, leur avion est à onze heures quarante cinq et ils doivent se présenter à neuf heures trente.

A Paris, au bureau en fin de journée, ils sont heureux de retrouver l’équipe et réciproquement. Bonne nouvelle, ils ont la CR pour aller à la banque ramasser les carnets, ils iront à la première heure demain avec Thomas, rendez-vous est pris pour neuf heures devant l’établissement. BB n’est pas encore rentré au boulot.

- Je suis lessivée, je rentre, annonce la capitaine

- Moi aussi et j’espère qu’on a bien pris soin de ma moto au garage de la PJ

- T’inquiète, je suis allée la voir tous les jours, renvoie Thomas en se marrant.

Avant de partir, Ils passent saluer le commissaire et Lisa le rassure, son instinct lui dit qu’ils s’approchent de la solution.

Ils rentrent enfin, commandent chinois, se douchent et dînent tranquillement sur le canapé, presque sans parler. Elle baille discrètement, elle est vraiment flapie.

- Tu ne voulais pas me dire un truc ou deux ?

- Je suis trop fatiguée, plus tard, si tu veux bien.

- Pas de problème, on se lave les dents et je te mets au lit, moi je vais rester un peu au salon réfléchir à tout ça.

Ils sont à neuf heures tapantes devant la banque, Thomas planque devant depuis hier soir pour parer à toute éventualité de tour de passe –passe. Il a photographié tout ce qui passait à proximité de l’établissement et installé une petite caméra reliée à son téléphone sur l’arrière ; petit cadeau de Mia.

- RAS chef ! Personne n’est passé par l’arrière de puis hier soir, le premier c’est ce matin, il y a cinq minutes, le directeur.

- Il va ouvrir, rejouons lui notre scène, il avait apprécié, je crois, dit elle en souriant et en se dirigeant vers la lourde porte, CR et carte de police en main.

Les deux autres lui emboîtent le pas et dès que la porte s’entrebâille, ils s’engouffrent et lui rejoue effectivement la scène. Lui aussi, fait son remake et prend un air outragé.

- A votre bureau, monsieur le directeur, et ouvrez votre coffre puis écartez vous, lui intime Louis.

Il s’exécute sans piper mot tandis que Thomas reste avec les employés qui arrivent afin que nul ne touche à rien, ni ne téléphone.

Ils récupèrent les carnets, les enferment dans un sac de scellé, font un inventaire et remettent un reçu au directeur avant de partir.

A l’extérieur, Lisa décide que le débriefe se fera vers 16h30, elle envoie un texto à Mia, au commissaire et au secrétariat du proc’ en ce sens.

- Thomas, vous contactez Mathilde, si ça l’intéresse de se joindre à nous, bien que la piste belge soit plutôt froide ; et essayez de remettre la main sur BB, je le veux avec nous cet après midi.

- Ok, chef !

- Louis, appelez Farouk et Hamid pour qu’ils se joignent à nous aussi.

- Bien, chef !

- Je reste avec vous jusqu’à l’heure du déjeuner, après je dois m’absenter. Je vous laisserai tous les trois mettre le tableau des constats à jour et échafauder des hypothèses ; mon petit doigt me dit qu’à de petits détails près, nous allons arriver à la même chose.

Au bureau Mia réceptionne les sacs, photographie soigneusement les couvertures et toutes les pages, même vierges et remet tout le matériel en sacs pour le labo.

- J’ai d’autres infos à propos de BB, annonce t-elle

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