Délice d'une haine

4 minutes de lecture

Tout pressentait le goût d'un biscuit acidulé, la nuit où mon regard s'est posé sur elle. C'était un vendredi, presque à cette heure-ci. Ma playlist Spotify me murmurait à l'oreille une musique entrainante qui accompagnait parfaitement cette découverte. J'en étais agréablement surprise.

Je devrais avouer qu'en aucun moment, l'envie de lui résister ne m'eût touché ou conquis. J'ai donc sourit intérieurement avant de me diriger en caisse et m'afficher en tant qu'une personne de plus qui eut jeté son dévolu sur cette chose si délicieuse. En réfléchissant, c'est cette chose qui ait jeté son dévolu sur moi. Elle était magnétique et je l'avais bien senti.

Je me hâtais de rentrer chez moi et de laisser mes sens la découvrir, mais cette envie se glaçait comme se glace le sang dans les tempes à l'instant où nous pensons, que plus tard dans la soirée, cette petite gourmandise ne serait plus et cela me rendit soudainement triste.

J'ai donc décidé de retarder ce moment pour plus tard. Je l'ai ainsi délicatement déposé sur ma table, pris mon souffle et je l'ai regardé. Je suis quasiment sûre qu'elle lorgnait mes moindres gestes et qu'elle lisait même dans mes pensées.

Sa couleur ressortait magnifiquement bien sur ma table 6 personnes, autour de laquelle souvent, ne se joignait que moi, à l'exception de ce soir, où mon attablée est l'objet de ma convoitise. Quelle ironie !

Pour mettre un peu d'ambiance, je l'ai regardée, puis lui ai lancé une question peu convenable, je l'avoue. Je ne pouvais m'attendre à une réponse évidemment, une réponse que j'ai fortement imaginée. J'en ai ri et j'ai décidé d'ouvrir une bouteille de Pinot gris. Il est minuit passé et comme à l'accoutumée, je trinque avec le diable. Ceci est devenu avec le temps, le moment favori de mes journées.

Le bruit des bûches brûlant au fond de ma cheminée m'apaisait. Au loin, nous pourrions même deviner le hululement d'une sacrée chouette, qui tout comme moi, ne trouvait pas le sommeil, ou qui a décidé de veiller justement pour une bonne cause, sauf que dans mon cas, je n'ai pas de bonne cause. Je tourbillonne mon nectar comme l'experte que je n'étais pas, et je l'avale presque difficilement. J'ai senti un sourire en coin se tracer.

J'ai cherché dans mes placards et fait sortir une boite marquée soigneusement par une étiquette " à ne surtout pas ouvrir, peu importe la raison". J'ai encore une fois souri en pensant que je devais plutôt écrire " à ne surtout pas ouvrir, par manque de raison". Je me suis trouvée un air d'humour noir.

Ce soir, nous sommes cinq ou même plus, et à part le diable qui est souvent dans le coin, ne refusant jamais quelques verres de certains breuvages gouleyants, longs en bouche et surtout expressifs, j'invite à ma table, toi et toi. Vous devriez êtres enchantés !

J'ai souvent détesté le contenu de ma boite, en même temps, je l'ai toujours secrètement aimé.

J'ai marmonné quelques prières que je ne connaissais même pas, en guise de remerciement pour ce rassemblement incongru. J'ai senti le moquerie du diable et je lui ai souri.

J'ai sorti les bougies de leurs boites, certaines m'ont accompagné depuis ma jeunesse. J'ai décidé d'en choisir une pourpre, diantre, comme je l'aime cette couleur. Sublime, féroce, douce et mordue de convoitise. Je t'ai choisi ce soir.

Je l'ai regardée naître et je m'en suis voulu, pourquoi donner vie si l'idée serait de la reprendre après ? Je me suis culpabilisée, comme à chaque fois, depuis mes 16ans.

Le rituel est le même, je la regarde naître, danser magnifiquement bien avant de l'avancer vers moi, et de me verser quelques gouttes de sa cire chaude sur l'avant bras. N'ayez crainte, ce n'est point douloureux, dans le cas où cela choquerait mon invitée du soir.

J'ai rempli une nouvelle fois mon verre avant de penser sérieusement à tout ce que je n'aimais pas autour de moi, et bizarrement, je n'eus aucune révélation. Quelle déception !

Il est presque 2h du matin, et je me parle toujours, non je discute, c'est différent. J'étouffe en cours de route, puis je pense à mon écrit, que je n'aime évidemment pas, tout comme mon métier, lequel d'ailleurs, comme nous en avons plus d'un ?

Je n'aime pas non plus, la sensation de la margarine sur les doigts, diantre, comme je la déteste cette sensation, beaucoup plus que mes métiers ! Je me regarde dans mon propre reflet et je ri. Es-tu entrain de comparer la sensation de la margarine sur tes doigts à tes métiers qui font rêver plus d'un ? La vie est une sacrée farceuse !

Quoi d'autres ? allez, dis-tout, ce soir tout est permis.

Je pris mon courage à deux mains et je dis : je déteste ardemment mon nouveau dentifrice, qui promettait des dents blanches instantanément. 1 mois plus tard, la seule couleur ayant apparu était un bleu assez pâle et timide qui vivait ses derniers instants sur ma vasque. J'ai encore ri et j'ai senti le rose me monter aux joues.

Je te déteste, toi, toi et toi, toi oui ! en criant avant de m'effondrer sur mon canapé couleur lin et de me vautrer dedans. J'étais triste et j'ai dit beaucoup de bêtises ce soir. Mes derniers instants de la journée ont marqué un arrêt sur la table, et se sont posés avec précipitation sur ma douceur dont le goût n'a point caressé mes papilles, et je me suis détestée pour cela.

Hey Siri, d'une voix cassée, je l'ai invoqué une première fois, puis une seconde fois et une troisième fois. Aucune réponse de sa part, je lui ai dit : You have to know that i hate you Siri, do you hear me ?

Et là d'une voix présente et douce, j'entends : You don't mean it, get some rest. Obviously you need it.

Ses paroles m'ont ouvert les yeux tout en les fermant et j'ai ainsi senti disparaître ma haine pour mon dentifrice bleu mais pas pour la sensation de margarine sur mes doigts.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire Styx ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0