24.

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- Et moi, j’insiste, réplique Imo en sortant un petit flacon-injecteur d’une de ses poches. C’est un SuperZ que vous avez devant votre nez, pas un acrobate du Cirque de Pékin. Ça fait d’ailleurs longtemps que je n’ai pas assisté à un de leurs numéros…

- C’est un Mirage, dit Sanchez en indiquant le flacon.

- Oui. Il faut bien ça pour se débarrasser proprement de…

- Ce n’était pas une question. Injectez-le vous et qu’on en parle plus.

- Cash, comme toujours.

D’un geste fluide, Imo se plante l’injecteur dans le bras, transvasant d’une traite son contenant dans sa plus grosse artère brachiale. L’effet ne se fait pas attendre. Son œil, qui n’aurait pas fait tâche lors d’une soirée tuning, flamboie avec davantage d’ardeur, laissant une traînée céruléenne à chaque headbang.

- Voyez-vous, reprend-il en s’ébrouant. Cet enfoiré a imprégné sa lame de nanorobots. Pratique pour détruire ses victimes de l’intérieur ou, comme ici, laisser son arme vivre sa vie. Ce truc lui obéit au doigt et au ciboulot, impossible pour quelqu’un d’autre de le manier.

Sa main fend l’air et attrape la lame ondoyante, qui commence à lui ronger la peau.

- Cependant, je ne suis pas “quelqu’un”, dit-il en souriant, des nanomachines plein les doigts. Reculez-vous et un conseil, accrochez-vous. Ça va charcler.

Imo shoote violemment dans la lame, la tordant et l’envoyant scinder une bonne partie du plancher, jusqu’à ce qu’elle file esquinter le sol en dessous. Suspendu aux restes de la porte, le Samouraï pousse un grognement, rapidement transformé en un “ouf” retentissant, quand Imo bondit à travers l’ouverture pour l’encastrer sur la paroi du conduit.

Ses poings s’écrasent sur le visage du SuperZ, avant de viser les articulations, faiblesse par excellence du corps humain, augmenté ou non. Une empoignade confuse s’ensuit. D’une paroi à l’autre d’abord, sur le toit de l’ascenseur ensuite, pour finir, moyennant forçage, en bas de la trémie sous la forme d’un échange de bourre-pifs énergiques. Déséquilibré, cependant. Finalement, après une réduction de la trachée et deux-trois rotules en compote, le Samouraï s’affaisse. Imo l’achève d’un nouveau coup de pied et bondit sur le sol du niveau G, lorsque l’ascenseur arrive à hauteur de nuque.

Son adversaire n’en a pas le temps. Ni la possibilité. Dans un concerto pour hurlement enragé et ensemble mucilagineux, le Samouraï de Minuit écourte son existence en oyakodon des plus immondes.

Quelques secondes plus tard, Sanchez pose à son tour un pied dans le niveau le plus bas du siège d’AstraCorp. Face à la lumière soudaine des lieux, le scientifique est soumis à un petit temps d'adaptation avant d’en pouvoir dresser un tableau.

Ils sont dans ce qui se rapproche à s’y méprendre au hall de sécurité du 13e sous-sol. Un peu moins haut et large, mais sans dégradation apparente. Une grande salle tout en angles et en nuances ternes, donnant la part belle à la tuyauterie et aux câbles graisseux serpentant aux murs, de toute évidence en carboradium. Point d’architecture pyramidale cependant, uniquement un cube massif, vide, contenant une seule et unique guérite déserte, encadrée de portiques, et positionnée une dizaine de mètres devant l’ascenseur.

Ils sont seuls. Son gardien gît, compressé, sous leur moyen de locomotion. Tant mieux. Ils peuvent, en toute quiétude, gagner la double porte à l’autre bout de la pièce. Unique, assez massive, surmontée du pictogramme jaune et noir trisecteur. Voilà qui pose l’ambiance. Très différente au demeurant de celle dans laquelle évolue Imo.

Boosté par le Mirage, le jeune immortel au regard pénétrant, sillonne la salle, pirouette d’un mur à l’autre en poussant des cris enfantins. Sanchez l’observe, déconcerté. De toute évidence, le sérum lui a doesé l’encéphale. Au-delà de son comportement proprement immature, quelque chose chez lui a changé. Il a parlé de “présence malléable” et effectivement, un truc pas net suçote son apparence. C’est indescriptible, mais indubitablement étrange. Comme s'il s’évanouissait dans l’air avant de réapparaître brutalement.

- Vous allez bien ? demande Sanchez.

- Je pète la forme, vous voulez dire ! s’exclame Imo en pirouettant. Pas de quoi s’inquiéter, ça me fait toujours ça les jours de Mirages, oh ho oh !

Imo s’esclaffe d’un calembour qu’il est seul à comprendre. Sanchez émet un petit rire nerveux. Mieux vaut ne pas se mettre ce fou furieux à dos. Juste au cas où.

- Bien ! On y va maintenant ? Allez, allez ! On y va ! Let’s go, comme dirait l’autre. Le réacteur n’attend pas. Plus vite, Sanchez ! Yiha !

- Passez devant. Ça vaudra mieux (20).

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