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LES ICÔNES DU PÉCHÉ - chapitre huitième
— Ne perdons pas de temps Janette, montrez-nous vite le dernier documentaire d'Emerance !
— Que de précipitation, Marcello. Ne voulez-vous pas une petite tasse de thé d’abord ? Je vous ai concocté un thé rouge au safran, vous verrez, c’est exquis !
— Pourquoi pas, ma Janette...
— Qu'y a-t-il, mon petit Marcello ?
— Oh, je ne vais pas vous spoiler, lancez le docu !
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La folie ne serait-elle qu'une question de point de vue ?
Ils arrivèrent à la gare, éreintés, pensant se réfugier dans le hall afin d'y passer le reste de la nuit et récupérer un peu. La porte vitrée ne céda pas. Sullivan colla son front au carreau, à bout.
— On n'a qu'à aller au commissariat, je suppose qu'il y a au moins une personne de garde.
— Pour quoi faire ? Leur raconter quoi ? Si c'est pour finir à l'asile, je préfère encore dormir sur un banc public… oh, et puis, après tout.
Tous deux partirent à la recherche du bâtiment. Ils ne mirent pas longtemps à le trouver, la direction étant indiquée sur les panneaux. Montant les marches une à une comme s'il portait tout le poids du monde sur son dos, le jeune homme tourna la tête vers Melony qui s'agrippait à son bras, grelottante. L'été était chaud, certes, mais les nuits se rafraîchissaient fortement dans la région. Elle était vêtue d'une petite robe à bretelles. Posant sa main sur la poignée de la porte d'entrée, il continuait de regarder son amie d'infortune, attendant une quelconque réaction. Il attendait surtout qu'elle l'arrête. Il était encore temps d'éviter de se ridiculiser à expliquer une tragédie surréaliste. Une lumière jaunâtre traversait la vitre poussiéreuse de la lucarne sur laquelle était inscrit Hollyhill Police Department. Pénétrant dans le hall, Sullivan hésitait encore. Melony lâcha son bras pour se diriger vers le bureau du chef de police dont l'éclairage léger donnait un ton sépia à la pièce, créant une atmosphère étrange de vieux film d'angoisse.
— Bonjour…
L'homme leva la tête. Il plissa les yeux, regardant par-dessus ses lunettes de lecture, puis tendit le bras pour proposer aux deux jeunes gens de s'asseoir face à la table en bois d'érable. Le silence était lourd. Juste à côté du dossier qu'il était en train de lire, une casquette avec Chef Morse cousu au dos trônait négligemment. Le quinquagénaire à la corpulence impressionnante semblait les attendre, comme s'ils avaient rendez-vous.
— On vient faire une déposition.
— Oui, enfin, c'est à voir… lança Sullivan désabusé.
— Vous êtes les vacanciers du manoir Carpenter ?
— Ce qu'il en reste…
Le jeune homme se souvenait des derniers instants dans la maison. Harrison leur sauvant la vie. Lui, réalisant trop tard qu'elle y était restée pour s'assurer de leur fuite.
Les chroniques de l'Apocalypse - « La Maison Trouble »
Réalisation : Emerance M. pour TROLL MAG INFINI-TEA
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— Bah, merde, Janette ! Pauvre gamin ! C'est bien moche tout ça ! Et dire que je le prenais pour un tombeur...
— Il ne faut pas juger, quand on ne connait pas, Marcello. De plus, nos trollitos ne savent pas ce que vous savez, évitons de les influencer !
— Une bonne leçon d'humilité, ma chère Janette, oui !
— « Une tragédie surréaliste ». La responsabilité du Shabah Almawt n'est plus à prouver, Marcello ! Nous en saurons plus au prochain épisode. Mais, nous pouvons en déduire que la créature du mal absolu existe vraiment, l'humanité n'est pas si mauvaise, après tout...
— Il n'y a pas, parmi nous, que de mauvaises personnes, Janette, vous le savez ! On dirait que ça vous déprime ?
— J'aime quand les gens assument leurs responsabilités. Si l'on peut rendre coupable quelqu'un d'autre que soi, quel intérêt de se remettre en question ? On peut tout faire, ce n'est pas grave ! Demain, je peux tuer mon voisin et prétendre que c'est la faute du Shabah Almawt ! Je n'aurais même pas besoin de me payer les services de l'avocat du Diable, je ne passerais pas par la case prison ! Bon, et bien, sur ce... à la semaine prochaine chers Troll-spectateurs et ne trollez pas trop devant l'écran !
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