Plus bas que terre

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Maivy n’avait pas eu la moindre envie d’aller dans cette cité au bord de l’anéantissement. L’envahisseur serait à leurs portes dans moins de trois jours. Ce n’était pas l’endroit où être, tout le monde le savait et la majorité des habitants avaient fui. Si beaucoup d’entre eux ne partait pas, c’était surtout parce qu’il s’agissait déjà de réfugiés. Ils avaient déjà fui, parfois à plusieurs reprises et ils en étaient arrivé à la terrible conclusion qu’où qu’ils aillent les envahisseurs finiraient par les rattraper dans le seul objectif de les exterminer. Ce n’était qu’une forme extrême de purge. Cette simple constatation les laissait atterrés.

Maivy avait accepté de venir uniquement parce qu’Onaskra avait promis qu’un portail le ramènerait en sécurité dès qu’il aurait accompli sa mission. Les mages de Triomphe avaient une réputation détestable sur tous les points à part peut-être celui-ci : ils étaient connus pour dire la vérité.

Ensemble, ils avaient décidé que c’était à lui d’aller voir le petit mage rouge qu’il avait abandonné dans cette auberge à l’époque. S’il l’avait laissé, ce n’était pas par manque de compatibilité évidente. Non, avec un peu d’entraînements, il aurait su jouer de la magie du jeune homme. Ce qui l’avait poussé à se décider, c’était son refus si clair et catégorique, tinté d’une terreur sans nom. S’entraîner correctement avec lui aurait été impossible. Il n’aurait fait que le briser davantage et peut-être qu’il se serait brisé lui-même en essayant. Un mage rouge cassé et inutilisable, voilà le souvenir qu’il en conservait. Il avait prévenu Onaskra qui avait acquiescé en douceur sans sembler plus inquiet que cela. Ce mage semblait particulièrement sûr de lui.

L’auberge n’avait pas vraiment changé et si le bois avait vieilli ou pris en patine, cela ne se remarquait pas. A l’intérieur, une légère fumée dû à la cheminée s’accumulait près du plafond et un brouhaha tranquille s’élevait. Les clients étaient nombreux et les tablées souvent pleines. Son entrée ne provoqua aucun silence ou regard insistant. Les nouveaux venus devaient pourtant être devenus rares, mais ces personnes étaient lasses. Elles avaient abandonné. Maivy avança jusqu’au comptoir d’un pas tranquille, mais il ne parvint pas à l’atteindre que la tenancière l’avait déjà abordé. C’était une femme aux traits tirés par la fatigue. Elle arborait un chignon qui se voulait sévère, mais une mèche s’en était échappé, lui conférant un air bien plus doux que prévu.

- Cela faisait longtemps. Dit-elle simplement.
- En effet…
- Il est en haut, dans sa chambre. Il a dit qu’il valait mieux qu’il se repose.

Maivy acquiesça tout en portant le regard sur les escaliers. Oui, se reposer était une bonne idée. Cette pensée le rendit réellement triste pour tout ce qu’elle impliquait.

- Vous n’êtes pas celui qu’il attend n’est-ce pas ? poursuivit-elle.
- Non. Non, il est dehors. Il a pensé qu’il valait mieux que je l’introduise…
- Et bien dites-lui au moins de rentrer qu’il se mette au chaud. La pluie ne devrait plus tarder…

La pluie. Il l’observa sans comprendre un instant avant que l’évidence ne lui apparaisse. La pluie, c’était leur seul espoir. Les champs avaient été rasés, des lignes entières labourées sur plusieurs centaines de mètres pour arrêter le feu… mais le feu était magique et il brulerait la terre, s’en nourrirait et poursuivrait sa progression malgré tout. Il serait seulement ralenti. S’il pouvait pleuvoir en plus alors les habitants gagneraient quelques heures ou mieux, quelques jours. Il n’allait pas pleuvoir, trop de magies s’en assureraient, mais ces gens l’espéraient vraiment.

- D’accord. Faisons ça… acquiesça Maivy avec un sourire doux.

***

Clarence n’avait que peu de souvenir du bateau et de ceux qui étaient venu le chercher. Il se souvenait de la douleur, de la peur et de l’incrédulité quand on l’avait écouté. Cet homme qui se présentait à lui, c’était celui à qui on l’avait offert. C’était aussi celui qui lui avait fait le plus beau et le plus inespéré des cadeaux. Il avait accepté de le laisser ici, en sécurité et de ne pas profiter de lui.

- Bonjour Clarence.
- … bonjour.
- Je ne sais pas si tu te souviens de moi. Je m’appelle Maivy. J’étais venu te chercher avec mon ami.
- Oui… Vous n’êtes pas un mage de Triomphe n’est-ce pas ?
- Non… Mais j’en ai amené un. Il s’appelle Onaskra. Je voulais juste vérifier que tu étais sûr de toi…

Clarence acquiesça doucement.

- Un portail va me renvoyer chez moi. Si tu veux demander à ce que d’autres le franchissent, ce sera avec Onaskra qu’il faudra voir tu comprends ?
- Je vais lui appartenir.

Maivy l’observa un instant sans comprendre. Lui appartenir. C’était vraiment une formulation qui lui parut étrange, mais de la part d’un mage rouge déjà brisé, elle était sans doute juste. Clarence ne comptait pas trouver un partenaire, mais s’offrir corps et âme. Gêné par la réalité de la situation Maivy bredouilla :

- Je suppose…
- Alors je n’ai rien à demander. Juste à subir.

Le mage rouge leva les yeux vers Maivy. Il semblait vide et défait. Absolument inutilisable en l’état et pourtant Onaskra réussirait. Ils n’auraient pas fait le déplacement sans cette certitude.

- Je pense que ce sera un peu plus compliqué que ça… Est-ce que tu es prêt à le rencontrer ?
- Oui.
- D’accord… n’hésites pas à lui parler. Je comprends que ce soit horriblement dur pour toi… mais ça pourrait être plus facile si tu te confies à lui.
- Une relation de confiance n’est pas nécessaire et nous n’aurons pas le temps de la construire. Je sais ce que font ces mages…

Maivy se rembrunit et acquiesça doucement avant de sortir de la pièce. Son cœur battait étrangement fort dans sa poitrine. Clarence savait ce que faisait ces mages… Maivy, lui, l’ignorait. Il savait que l’état du mage rouge importait peu. Ses expériences, son avis, son consentement même… rien n’avait d’importance. Mais il n’avait jamais vu un véritable mage de Triomphe à l’œuvre et ignorait totalement la manière dont ils fonctionnaient au bout du compte.

***

Les mages de Triomphe avaient des traits caractéristiques habituels et notamment une peau sombre tranchée par des tatouages très clairs sur le visage. Quand Onaskra rentra dans la pièce, Clarence sut qui il était. Il resta silencieux et les larmes commencèrent à couler le long de ses joues sans qu’il n’y puisse rien. Ils s’observèrent en silence un long moment.

- Je m’appelle Onaskra. C’est toi, Clarence, qui m’a demandé de venir.

Il attendit un instant. Clarence finit par baisser le regard en acquiesçant, la gorge trop nouée pour répondre. L’enfer était en train de se rouvrir sous ses pieds.

- Tu dois savoir que je peux obtenir ta magie sans ton consentement.
- … oui.
- Je n’ai pas le temps de faire les choses doucement. Je n’ai pas le temps de t’apprivoiser.
- Je sais…
- Parfait. Donc je vais simplement t’annoncer une série de choses puis tu décideras si tu es d’accord ou pas. Je ne compte pas me battre contre toi. Je vais te demander de faire des efforts et d’être mon partenaire dans cette aventure. On va se battre ensemble contre tes réticences. Si tu n’es pas motivé pour être de mon côté, je refuse de t’utiliser. Je ne t’apprivoiserai pas. Je ne vais pas te rassurer ou te dorloter. Je vais te faire mal. Je vais te faire peur. Je vais t’utiliser comme bon me semble. Je vais briser ton esprit. Totalement le briser. Ton corps m’appartiendra et toi, tu vas tout faire pour te donner et tu me remercieras de prendre la peine de m’occuper de ça.

Plusieurs hoquets de pures angoisses avaient échappé à Clarence, ses mains parfaitement jointes sur ses genoux tremblaient comme des feuilles, mais en dehors de ça, il n’avait pas bougé.

- Je ne sais pas ce que l’on t’a fait et je ne m’en occuperais pas. J’utiliserais toutes les pratiques sexuelles que je désire ou que je juge nécessaire. Tu en as sans doute vécu certaines. Il y en aura sans doute des nouvelles. Tu accepteras tout ce que moi, ou qui que ce soit d’autres, te fera et tu diras merci. A partir du moment où nous commencerons, il n’y aura plus qu’une chose qui comptera pour toi et ce sera mon plaisir. Est-ce que c’est clair ?
- Oui…

Onaskra resta silencieux, attendant visiblement plus qu’un simple acquiescement. Clarence baissa un peu plus la tête, ses épaules si raides tombèrent de quelques centimètres sous le sentiment de défaite qu’il ressentait et il avoua :

- Je veux vraiment sauver cet endroit et ces gens…
- Alors tu vas devoir également me remercier de te le permettre.

Clarence ferma les yeux, vaincu et chuchota :

- Merci.

Son sort était scellé.

- Mieux que ça. Approche-toi et embrasse mon entrejambe.

Les larmes roulèrent à nouveau le long des joues de Clarence. Il les chassa d’un revers de main précipité. Il devait le faire. Il devait vraiment le faire et pire, il devrait même être soulagé que la consigne ne soit pas de but en blanc « écarte le cul, salope»… pourtant, avancer jusqu’au mage et s’agenouiller pour l’embrasser à travers son pantalon fut horriblement dur. C’était peut-être la chose la plus difficile qu’il n’ait jamais faites, car elle scellait son avenir.

***

Clarence avait toujours adoré la salle principale de l’auberge. C’était devenu son foyer et un endroit où il se sentait plus en sécurité que n’importe où ailleurs. Il avait supplié Onaskra de ne pas le faire ici, en vain. Le mage s’était montré inflexible, lui rappelant seulement qu’il ne devait pas se battre contre ses choix mais contre lui-même. Et Clarence avait obéi… Alors à présent, il était perché sur une table, celle qu’il appelait « table six », totalement nu devant ceux qui avait été ses clients et devant Adelia. Elle n’osait pas le regarder. Elle faisait des allers-retours précipités entre la cave et l’énorme portail que le mage avait fait apparaître sur l’un des murs de la salle. Ses fils se trouvaient déjà de l’autre côté. Ils réunissaient les marchandises.

Clarence n’avait rien demandé. C’était Maivy qui avait tout organisé en un temps record par pure générosité face au sacrifice du mage rouge. Savoir que cette famille était sauvée le rassurait effectivement mais ça n’enlevait rien à sa nudité et aux regards qui se posaient sans détour sur son corps.

La consigne était simple : rester debout, ne pas se cacher et rester concentré sur Onaskra. Seul son plaisir comptait. Alors il était là, tremblant comme une feuille, son petit sexe si recroquevillé sur lui-même qu’il semblait disparaître dans sa toison pubienne. Onaskra avait installé un fauteuil confortable et il l’observait en silence, insensible aux larmes qui coulaient sur ses joues ou au va-et-vient incessant de ceux qui partaient. Clarence avait horriblement honte et ce temps qu’il aurait pu estimer « calme » n’était rien d’autre qu’une montée en tension horrible parce qu’il savait déjà tout ce que l’on pouvait lui faire.

Il sursauta quand soudain, Onaskra se redressa pour aller jusqu’au portail qu’il effleura du bout des doigts.

- Plus que dix minutes… Le portail va commencer à devenir instable, je vous conseille de passer immédiatement et de ne pas retraverser. Ceux qui resteront pourront m’aider ou observer pour le reste de la journée.

Clarence ferma les yeux, défait. Onaskra l’avait annoncé dans la chambre. Il ne serait pas le seul à abuser de lui. Clarence n’aurait pas accès au luxe de n’avoir qu’un seul et unique partenaire. Le mage tatoué s’approcha de lui et lui tendit la main pour qu’il l’attrape. C’était leur premier contact physique direct, sans vêtement pour faire barrière. Clarence resta figé à observer cette main et en déglutissant, il se força à la prendre. Onaskra ne dit rien et l’aida simplement à s’agenouiller sur la table donnant ses consignes à voix basse.

- Tu vas rester à genoux, les mains sur les fesses pour les écarter et présenter ton anus. Je serais devant toi et je veux que tu me regardes. Tout ce que tu fais, tu le fais pour mon plaisir. Je veux que tu ne te concentres que sur ça. Ce qu’il se passera derrière toi, ça nous importe peu. Tout ce qui compte c’est mon plaisir. Tu as compris ?

Clarence acquiesça en silence. La position était horriblement humiliante et il devait regarder les yeux ouverts et posés sur l’autre mage. Pendant un long moment il ne se passa rien, puis, le portail se referma. Il n’avait même pas pu dire au revoir mais penser qu’Adelia avait pu le voir ainsi lui donnait tout sauf envie de lui parler. Il fut malheureusement très vite distrait en sentant un courant d’air derrière lui. Il se tendit tout en sachant que c’était une mauvaise idée. Il avait assez d’expérience pour savoir qu’il n’était pas lubrifié et que seule une immense détente parviendrait à limiter les douleurs mais également les dégâts physiques. Sa peau, fine comme de la soie, allait se déchirer s’il ne se décontractait pas. Seulement son corps s’y refusait. Il gémit lorsqu’on l’effleura et le contact cessa. Il y avait quelqu’un en train de s’agiter derrière lui, mais sans chercher à le toucher.

Son regard, perdu, contemplait le corps d’Onaskra. Ce dernier était installé dans le fauteuil, les jambes largement ouvertes. Il ne cachait en rien une érection des plus importantes qu’il se mit bientôt à caresser en douceur à travers le tissu. Lorsque Clarence l’avait embrassé, son sexe était déjà dur d’envie.

Cette envie était sans doute nécessaire pour débloquer les choses pensa soudain Clarence. Pourquoi le mage aurait-il autant insisté sur son importance sinon ? Le jeune homme poussa un gémissement de pure détresse alors qu’on le frôlait de nouveau. Les bruits, derrière lui, étaient en train de devenir parfaitement explicites. Un homme se masturbait tout contre sa peau. Parfois, son poing serré autour de sa verge venait l’effleurer, parfois, Clarence sentait juste un courant d’air. Quand ce sexe serait assez dur, il allait le pourfendre. Bien des hommes aimaient cela et Clarence l’avait suffisamment vécu pour le craindre. Des gémissements lourds finirent par se faire entendre. Resté offert fut d’autant plus difficile et soudain, quelque chose le toucha. Ce n’était pas un sexe dur qui réclamait de rentrer en lui, mais il sursauta tout autant que si ça avait été le cas. Du sperme. L’inconnu, sans doute l’un de ses anciens clients, venait de jouir sur lui et puis, il s’éloigna.

Clarence releva les yeux vers l’autre mage sans comprendre. Onaskra soupira, visiblement déçu avant de rappeler :

- Il s’est donné la peine de jouir sur toi. Remercie-le.

Un grand frisson glacé parcourut le corps soumis avant qu’il n’arrive à pousser le mot hors de sa gorge d’une voix particulièrement blanche, ressemblant presque à un croassement.

- Merci…

Onaskra lui offrit un sourire satisfait avant de lâcher tranquillement :

- Au suivant.

Une autre présence vient se coller à Clarence, une autre main s’agita alors que des yeux étaient sans doute poser sur son anus serré où quelques gouttelettes blanches étaient venues se perdre. Cela ressemblait à un rituel, mais un qu’il n’avait jamais pratiqué. En faites, il n’en avait même jamais entendu parler. Clarence connaissait bien les mécanismes de sa magie, mais les moyens pour y avoir accès avait toujours été plus flou. Dans son coven on disait que les partenaires se devaient d’être compatibles. Ils devaient se plaire, s’apprécier ou peut-être même s’aimer. Il avait aimé Jonuh de toute son âme. Une nuit, ils s’étaient aimés charnellement et sa magie s’était simplement déployée sans effort ou difficulté. Si avoir un coït avait suffi, alors à chaque viol, sa magie se serait libérée, mais ça n’avait jamais marché.

Clarence sursauta alors que les doigts de l’autre mage venaient de claquer tout près de lui.

- Reste concentré sur mon plaisir. Fais un effort Clarence. Je te l’ai déjà dit, tu es mon partenaire. Tu dois combattre avec moi.

Clarence acquiesça plus facilement cette fois-ci oubliant presque le sexe menaçant dans son dos. Il retourna à sa contemplation d’Onaskra qui se caressait paresseusement. Il avait organisé ce moment et il lui plaisait effectivement au vu de la bosse large qui déformait ses habits. Clarence ne sursauta pas autant quand un second jet de sperme s’abattit sur son corps, il parvint même à chuchoter un « merci » presque convainquant, mais il poussa un gémissement de pure terreur en sentant la pointe humide d’un sexe venir à la rencontre de son corps. L’autre ne poussa pas contre son anus, mais vient se frotter à ses cuisses, à ses fesses, à ses doigts qui tentaient de se maintenir en position ouverte, … Chaque contact fut comme un baiser humide qui le dégouta au plus haut point. Ses réticences n’ébranlèrent ni l’envie de l’homme derrière lui, ni celle du mage devant lui. Au contraire. Onaskra ouvrit son pantalon et glissa sa main en dessous pour caresser plus directement son sexe. Au bout d’un certain nombre de choc contre sa peau, l’homme derrière lui jouit à son tour. Clarence releva les yeux pour croiser ceux remplis de luxure du mage et tout le fixant il murmura :

- Merci.

Merci de ne pas leur avoir demandé de le pénétrer sauvagement. Merci pour le peu de temps qu’il lui offrait. Merci d’accepter de s’occuper d’un mage rouge aussi cassé que lui. Merci pour lui offrir la possibilité de défendre ceux qui lui étaient cher. Merci.

Onaskra hocha la tête en souriant.

- De rien. Et… au suivant.

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