Ce soir, j’écris

2 minutes de lecture

J'avais à peine 6 ans.

Petite, naïve, confiante.

J'aimais jouer, j'aimais qu'on me dise que j'étais grande.

Toi, tu me le disais.

Alors j'ai cru que c'était bien.

Tu m'as montré des images.

Des corps nus, des trucs d'adultes.

J'comprenais rien.

Mais j'ai suivi, parce que t'étais de la famille.

Parce que j'pensais qu'on jouait.

Tu m'as dit : « Viens, je t'explique »

Tu m'as pris la main.

Tu m'as fait toucher.

Tu riais. Tu disais que « ça chatouille »

Moi j'ai rien dit.

J'ai juste suivi.

Parce que j'pensais qu'on jouait.

T'as dit que ma sœur aimait bien.

Et j'voulais pas être différente.

Alors j'ai rien dit.

J'ai laissé faire.

J'ai fermé les yeux.

Ta main. Sur mes fesses. Mais pas que. Devant aussi.

Puis papa m'a appelé. Fin du « jeu »

Un soir, j'suis venue dormir chez toi.

Soirée pyjama. Ta p'tite soeur, moi et un dessin animé.

Toi, dans le même lit.

Ta main... dans ma culotte.

J'ai eu mal.

T'as arrêté.

Mais pas pour toujours.

T'as déménagé.

J'avais 8 ans.

On jouait à un jeu sur la Xbox.

T'as dit : « Assieds-toi sur moi. »

T'as dit : « Enlève ta culotte. »

Et je l'ai fait.

Parce que j'voulais jouer au jeu de la Xbox .

Juste ça.

Alors j'ai laissé faire :

Encore.

Et Encore.

Parce que j'pensais qu'on jouait.

Même quand t'as insérer un bout de la manette en moi.

Même quand t'as mis tes doigts en moi.

Même quand je devais toucher ton sexe.

J'pensais qu'on jouait.

J'avais peur de dire non.

J'avais peur que tu ne veuilles plus jouer avec moi.

J'avais peur de ressembler à un bébé.

Et puis un jour, j'ai arrêté de venir.

Pas à cause de toi.

À cause d'elle, ta sœur, qui m'a frappée.

Drôle de déclencheur.

Et c'est ça qui m'a fait partir.

Pas toi.

Pas ce que t'avais fait.

C'est fou, non ?

Quand j'avais 13 ans, tu m'as recroisée.

T'as souri, t'as dit :

« Tu t'rappelles quand on jouait ensemble ? »

J'ai nié.

J'ai fui.

J'ai oublié.

J'ai fais semblant.

Et là, j'ai 17 ans, et j'écris.

Pour la première fois.

Pour ne pas devenir folle.

Je décide d'écrire pour avancer.

Pour ne pas porter ça toute seule.

Pendant longtemps, j'ai oublié.

Ou j'ai essayé.

J'ai juste fermé à clé.

Puis jeté cette clé.

Mais au lycée, y'a eu cette journée

Contre les violences intra-familiales.

Un film. Des visages

Des mots qui résonnent.

Et là, j'ai compris :

Si j'le dis pas, ça restera collé à moi.

J'ai rien demandé.

J'étais une enfant.

Et maintenant que je suis grande, je refuse de garder ça.

J'écris pas pour lui.

J'écris pour moi.

Parce qu'il est temps que ça sorte.

Que je respire.

Que je vive.

Vraiment.

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