Chapitre 38- Une lueur d’espoir

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Un brin rayon de lumière venait éclairer les fleurs que beaucoup de paroissiens avaient déposées à la tombe du père Théophane. Des petites bougies étaient allumées. Vincent s’était mis à genoux pour se recueillir et avait posé une bougie à côté d’un joli bouquet de Lila. Le vent fouettait les habits du vieux père, qui regardait attentivement la tombe de son ami. Il était en train de se remémorer de tout ce qu’il avait fait de mal à ce jeune prêtre, en s’en voulant terriblement. Au fil des années, il avait commencé à nouer une amitié avec lui. Il se souviendrait de toute sa vie lorsqu’il a commencé à parler de sa femme en disant qu’elle l’avait abandonné… Et que c’était pour l’une des raisons à laquelle il s’était noyé dans l’alcool. Après la guerre, lorsque le père Théophane lui avait suggéré de faire autre chose dans sa vie au lieu de tirer bas, Vincent avait confirmé à ses collègues qu’il allait démissionner. Tout le monde en fut surpris. Lui ? Démissionner ? Alors qu’il était bien plus expérimenté qu'eux ? Avait-il perdu la tête de perdre tout cet argent ? Vincent avait eu beaucoup de mal, lorsqu’il repensait aux paroles du père Théophane « Vincent, ce n’est pas en te noyant dans l’argent que ta vie va s'arranger. Tu le vois bien, un million de personnes aurait aimé être à ta place, or, toi, tu profites de ces personnes en volant tout leur argent, penses-tu que cela est juste ? ». Lorsqu’il avait déposé son carton avec toutes ces affaires chez lui, il avait soupiré en voyant un piano à queue qu’il s’était acheté pour le plaisir, comme tous ces objets de valeurs qui ne servaient plus à rien. Il était monté au grenier et avait fouillé jusqu’à ce qu’il trouvait ce qu’il cherchait. Il était redescendu dans son immense salon et avait soufflé sur la boîte. Il l’avait ouvert et avait sorti le matériel pour la nettoyer. Puis, il l’avait monté et l’avait posé devant ses lèvres. Il commençait à jouer la Notte de Vivaldi avec sa flûte, lorsque la nostalgie lui était revenue. Il se souvenait de sa mère, qui cuisinait pendant qu’il jouait de la flûte lorsqu’il avait quatorze ans. Sa mère le trouvait très brillant dans ce domaine et l'avait conseillé d'en faire son métier. Mais lors de son passage d’examen pour devenir professeur, les juges l’avaient tellement mal jugé qu'il en était sorti les larmes aux yeux et avait décidé d’en arrêter là. Il avait jeté sa flûte au grenier et s’était concentré sur ses études. Sa mère en fut gravement attristée, cela faisait pratiquement vingt-trois ans qu’il n’avait plus retouché à ce si bel instrument. Il avait même menti à sa femme qu’il n’avait jamais joué d’un instrument… Mais cela l'avait tellement affecté, qu’il en avait oublié à quel point il aimait ce si bel instrument.

Puis, en regardant le chapelet que le jeune prêtre lui avait donné, il l’avait remis dans sa poche et s’était rendu au conservatoire de Besançon pour demander s’il pouvait repasser son examen. Quelques mois plus tard, il avait réussi avec succès et avait décroché un diplôme pour enseigner la flûte. Un élève, qui ressemblait énormément à Philémon, l’avait soudainement frappé dans son âme. Il s’appelait Théophile. Il était extrêmement timide lorsqu’il en jouait, mais à chaque fois, Vincent l'encourageait à jouer plus fort pour qu'il devienne un bon musicien. Depuis, il a gardé cette liaison avec ce jeune homme et lui avait demandé qui étaient ses parents, lorsqu’il avait répondu qu’il les avait perdus lorsque les Nazis les avaient embarqués chez eux… Très vite, il s’était rendu à l’orphelinat lorsqu’il s’était aperçu qu’il était en très mauvais état. Avec tout l’argent qu’il avait laissé de côté, il entendit la petite voix du père Théophane lui dire « l’argent n’est que matériel, il ne te servira à rien, comparé à ce qu’il t’attendra dans le royaume des Cieux ». Il avait donc décidé d’emménager l’orphelinat pour qu’il devienne aussi un lieu de scolarisation et de loisir. Il s’était même arrangé avec certains professeurs pour enseigner la musique. Depuis, beaucoup d’orphelins s’étaient intéressés à ses cours musicaux. Cela lui arrivait de tant à autre d’organiser des groupes de chants. Les moines et les sœurs qui étaient devenus plus nombreux, s’étaient installés là-bas pour donner des cours aux élèves. Puis, il avait demandé à ce qu’il adopte ce jeune Théophile. Lorsque Théophile était sorti de l’orphelinat, il en était tout content et continuait avec joie, la flûte traversière. Depuis, Vincent n’avait jamais quitté ce petit garçon qui lui tenait très à cœur. Cet orphelinat était devenu tellement célèbre que beaucoup d’autres élèves de d’autres secteurs, avaient quitté leurs écoles pour aller rejoindre cette école de musique. Vincent avait remercié le père Théophane pour tout ce qu’il lui avait apporté et il avait même confirmé que sa vie était bien plus épanouie que celle qui l’avait avant… En allant quitter le cimetière, une drôle de femme était venue vers lui. Les larmes aux yeux, il avait reconnu Clémence. Il avait baissé la tête en disant qu’il allait quitter les lieux, mais la jeune femme l’avait repris.

— Écoute Vincent… Je… Pardonne-moi d’avoir menti à notre fils…

Vincent l’avait ignoré, mais il restait tout de même intrigué.

— Depuis quelque temps, je… Je pense à toi… Et je me suis rendue compte que je t’ai abandonné pour un autre homme… Alors que je pensais chaque jour à toi… Je ne sais pas ce qu’il m’a pris alors que c’est toi que j’aime, c’est toi et toi seul qui m’a fait comprendre à quel point notre amour était grand et si beau… Je, je suis désolée pour tout ce que je t’ai fait !

Clémence avait commencé à pleurer en ne demandant que pardon. Elle insistait sur le fait qu’elle n’était encore qu’une gamine à l’époque et qu’elle était inconsciente du mal qu’elle faisait. Elle disait qu’elle était complètement immature encore… Mais qu’elle s’était rendue compte que Vincent lui avait apporté un soutien qu’aucun homme n’avait pu faire jusqu’à présent : l'aimer de tout son cœur. Elle s’en voulait terriblement d’avoir détruit leur couple. Oui, il était vrai qu’elle avait retrouvé un ancien amour perdu et qu’elle pensait que cela allait arranger son amour, mais elle avait eu tort… Le seul qui avait pu le faire était Vincent… Elle disait qu’elle était parfaitement d’accord s’il ne voulait pas se remettre avec elle, mais Vincent s’était approché d’elle pour l’embrasser. Clémence, heureuse de retrouver son ancien mari, l’avait aussi embrassé. Ils pleuraient tous les deux de se retrouver. Vincent en avait rêvé jour et nuit de cet amour oublié… Maintenant, Dieu les avait remis ensemble et il le remercia en serrant Clémence contre lui.

— Pardonne-moi Vincent, pardonne-moi…

— Je te pardonne Clémence.

Puis, ils étaient restés tous les deux, près de la tombe, en se tenant la main pour remercier le père Théophane de réunir à nouveau, leur famille.

* * *

15/08/1944

Cher Seigneur Jésus Christ,

Alors que tout semblait perdu, une petite lueur d’espoir était venue combler ces nuits obscures que je venais de passer… J’avais fait un rêve à la fois étrange et mystérieux… Alors que je repensais à Marguerite, j’avais vu soudainement une main… Une main qui était venue se tendre vers la mienne. Au début, je gardais ma croix en disant que c’était moi qui devait la porter, mais vous avez insisté en me disant ceci : « Théophane mon fils, ne crains pas et prends ma main ». À ce moment-là j'étais tout tremblant. Puis, je l’avais accepté et vous m’avez relevé en prenant ma croix, vous avez insisté sur le fait que je devais vous faire plus confiance… Mais vous m’avez dit que ce n’était pas de ma faute puisque c’était Marguerite qui m’avait enlevé cette confiance… J’ai marché à côté de vous en tenant ma main dans la votre. Puis, vous m’avez posé sur un rocher pour soigner mes blessures. J’en avais les larmes aux yeux de vous voir… Je vous ai demandé si j’étais au royaume des Cieux, mais vous m’avez répondu : « non mon fils, pas encore ». Vous m’avez souri et avez soigné soigneusement toutes mes plaies. Vous m’avez dit que l’espoir existait toujours dans ce monde et que dès demain, je serais libéré de tout mal. Je vous avais remercié en me jetant dans vos bras et j’ai pleuré en disant que j’avais peur… Peur pour tout le mal que j'avais commis contre vous et vous avez insisté sur le fait que c’était Marguerite qui m’avait du mal, mais je n’arrivais pas à le croire. Vous avez caressé mes cheveux en disant que tout était fini et que j’avais réussi à affronter ce qui était le plus douloureux. Je vous ai répondu à quel point l’homme pouvait être cruel envers vous, et que Satan ne cherchait qu’une seule chose : à nous nuire… Vous m’avez répondu que c’était vrai, mais que c’était en passant par la mort, qu’on découvrait une nouvelle vie. J’ai répondu que vous aviez raison et vous êtes parti en portant ma croix. Le lendemain, tout ce que vous m’avez dit avait été accompli. Des soldats Français avaient défoncé la porte et étaient venus me libérer. Marguerite avait fait tout son possible pour mentir, mais un des soldats l’avait tué. Ils m’avaient déposé dans un hôpital pour me faire soigner. On avait remis mon épaule gauche à l’endroit. J’étais resté pendant un bon moment, jusqu’à ce que je fus totalement rétabli. Je vous avais rendu grâce et avais pris le train pour me rendre à Besançon. J’avais commencé à pleurer lorsque j’avais rencontré une jeune fille qui était aussi triste. Je m’étais approché d’elle pour la rassurer, et elle m’avait raconté toute son histoire. C’est fou, parce que notre rencontre n’était pas un hasard. Cette petite âme cherchait aussi votre amour et j’espérais lui avoir donné les bonnes indications. Une fois de retour au monastère, les moines étaient venus vers moi pour me raconter qu’ils étaient complètement perdus depuis qu’ils n’avaient plus de père supérieur. Ils m’avaient aussi demandé si mon voyage d’affaire s’était bien passé et je leur ai mentis en leur racontant que j'avais eu beaucoup de choses à faire. Je m’étais recueilli sur la tombe de mon ancien père supérieur en vous demandant pardon… Parce-que je m’en voulais terriblement de sa mort… Mais j’avais cette lueur d’espoir, que vous, mon père supérieur, continuez de veiller sur nous. Oui, cette lueur d’espoir qui nous permet d’affronter tous les jours, les obstacles de la vie. À bientôt mon Doux Jésus,

Signé, le père Théophane qui a écrit sa dernière lettre.

Au moment de finir, sœur Humbeline avait versé une petite larme d’émotion et avait rangé dans l’ordre toutes les lettres. Puis, soudainement, elle s’était posée cette question.

Donc si j’ai bien compris, ce sont des soldats français qui sont venus secourir le père Théophane. Mais alors, qui en est le responsable ?

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