PARTIE V

3 minutes de lecture

Elle avait parcouru huit cents kilomètres depuis sa maison pour venir jusqu’ici, alors elle aurait dût préparer une petite phrase, un mot d’excuse, au lieu de cela elle ne savait toujours pas quoi leur dire. Et si ils ne la reconnaissaient pas ? Cela faisait plus de quatre ans qu’elle ne leur avait pas rendu visite… Ils étaient bien venus la voir évidemment, à une réception de Noël, mais elle sentait qu’ils étaient mal à l’aise, qu’ils n’arrivaient pas à suivre les conversations et que les plats n’étaient pas à leur goût. Puis il n’y eut plus de coups de téléphone et bientôt plus de cartes.

Ève restait assise les jambes repliées dans la voiture, qu’elle avait louée pour l’occasion, garée en face de la maison où ses rêves avaient germé. Elle sentit une gêne dans la poche de son jean, et décida de sortir la lettre qui y était glissée. En dépliant le papier froissé elle réalisa qu’elle avait dormi toute habillée. Elle la relut encore une fois, et encore une fois, et encore une fois… Deux heures passèrent ainsi, entre larmes et soupirs.

« Pour Ève,

Je suis désolé de t’apprendre la nouvelle de cette manière. Sache que je peux comprendre ton désarroi. J’ai reçu un message d’un journaliste qui m’a dit que les unes de demain seront consacrées à cette affaire. »

Elle alluma une cigarette. Des oiseaux nichés dans les arbres se mirent à siffler, Ève leva les yeux vers les feuillages verts pour apercevoir l’un des leurs, au plumage flamboyant.

Deux d’entre eux sautèrent d’une branche, rebondirent dans les airs et parcoururent le ciel clair. Le chant du printemps commençait.

« C’est à cause des clichés qui ont été pris ce soir-là. L’homme avec qui tu étais dans cette suite ne s’est pas prononcé à ce sujet, mais toi tu avais une certaine réputation que tu te devais de tenir intacte. »

À chacune de ses bouffées Ève faisait bien attention à garder l’air dans ses poumons, elle voulait s’imprégner du tabac, de cette cigarette au bout brûlant entre ses doigts. Ce feu qu’elle contrôlait la rendait à nouveau forte, et l’élança jusque sur le perron. Elle s’arrêta à côté des hortensias que sa mère arrosait déjà quand elle habitait les lieux.

« Tu dois t’en douter, sur ces clichés on vous voit en train de préparer des lignes de cocaïne. Mais surtout, on te voit, toi, le nez dans la poudre, ne laissant aucune place au doute. »

Sans qu’elle eu le temps de trouver la sonnette, ni de taper contre la porte, elle s’ouvrit. La femme venait à peine de sursauter de la présence de quelqu’un derrière leur entrée qu’un grand sourire égaya son visage troublé.

« Viens vite ! Regarde qui est revenue. »

Son père courait presque vers elles, ayant hâte de serrer sa fille contre lui.

La femme qui s’accrochait à la poignée examina sa fille. Sa mine s’assombrit, en comprenant le sujet de sa visite. Ses yeux injectés de sang, ses vêtements tâchés de vin, ses chaussures recouvertes de boue. Un masque de pleurs habillait le visage d’Ève et sa bouche s’ouvrit dans un gémissement.

« Je croyais ne jamais vous revoir. », avait-elle à peine articulé.

« Suite au scandale qu’y va s’en suivre, mon expérience me dit que ta carrière est terminée. Je suis au regret de t’annoncer que je ne m’occuperais plus de toi. »

Les bras de sa mère l’enveloppèrent doucement, en prenant soin de ne pas lui faire mal:

« Oh ma chérie, qu’est-ce-qu’ils ont fait de toi ? »

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire alexia_mte ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0