Le manuscrit perdu

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Dans le jours qui suivent, sept ouvriers sont sauvés. Six périssent. Les responsables de l’expédition annonce que cela risque de retarder l’avancée du travail. Ils demandent si certains membres de l’expédition seraient disposés à aider les mineurs dans les travaux. Lucien comprend, en croisant le regard de Symphorine, qu’en tant que traducteur et dagrotypeur, il a tout intérêt à justifier sa présence parmi l’expédition en se portant volontaire, ce qu’il fait.

Dès ce moment, il rejoint les ouvriers dès le matin et fait de son mieux pour ne pas leur être une gène. Malgré tout, il rentre chaque soir exténué. Sa tache consiste principalement à aider à l’étançonnement. Dans la chaleur sèche de la mine, il croit étouffer à petit feu. Les images qu’il s’était mises en tête du travail de la mine se heurtent à la réalité. Ainsi confronté à la peur, à la sueur et à la fatigue, la situation perd tout son romanesque.

Autour de lui, se battent des hommes, parfois moins âgés que lui d’une dizaine d’années, parfois ayant les traits de vieillards crachotant des glaires aussi sombres que la roche qui les entoure. Ils luttent contre la Mine, entité malveillante dont le seul but semble être de les broyer vivants et se transformer en leur tombeau. Ils sont autant de microbes dans le corps de cette terre qui cherche à les éradiquer.

Dans cette atmosphère pesante, le dagrotypeur partage sa réalité avec Symphorine Montdory et quelques apprentis archéologues, amenés dans ces entrailles contre leur gré. La cheffe de projet n’hésite pas à se salir les mains, même si certains médisent en arguant qu’elle refuse en réalité de laisser l’honneur de la découverte de la Chambre D. à qui que ce soit d’autre qu’elle.

Jour après jour, le boyau s’étend en serpentant. Lucien, pour sa part, se perd dans les ténèbres, ne remontant que pour faire le plein d’autres ténèbres, lesquelles ne se distinguent que par la différence de température et quelques scintillements noyés dans le ciel. D’aussi loin qu’il se souvienne, le ciel a toujours était voilé de nuages gris ou noirs. Mais pendant ces quelques semaines de l’année plus calmes, il est parfois possible de distinguer Arcturus, Canopus ou Vega.

Un matin, Hubert, le contremaitre, annonce à toute l’équipe qu’il s’agit certainement de la dernière journée de travail. Si les calculs sont corrects – et ils le sont, pense Lucien – la Chambre D. devrait se trouver à quelques dizaines de mètres de leur position. Malgré l’impression

Enfin, l’ouvrier donne le dernier coup de pioche qui produit un bruit sourd. Il a touché une structure en bois. Il déblaie ce qu’il reste de terre et met à jour un panneau. Le mineur sort de son sac un piédebiche et force le passage, en grognant et suant. De l’autre côté, on distingue déjà une forme qui ressemble à un coffre, large mais pouvant tenir dans les bras d’une personne. Il se recule pour laisser passer Symphorine qui approche sa main de l’arche et l’amène à elle, précautionneusement. Elle demande de l’aide à Lucien et, à deux, ils dégagent le trésor de sa gangue de terre.

Le jeune germaniste croise un instant le regard de sa supérieure, qui dissimule difficilement son impatience. Lui aussi a du mal à cacher son émoi. Ensemble, ils chargent leur butin étonnamment lourd sur le chariot qui les emmène jusqu’à la sortie, après plus d’une heure de marche pénible dans la chaleur étouffante de la mine.

De retour au campement, toute l’équipe se réunit autour de Symphorine. Elle est armée d’une série d’outils que ne reconnait pas Lucien. Peu à peu, elle dégage la serrure et finit par ouvrir le coffre. À l’intérieur se trouve un autre coffre, plus petit, en métal, hermétiquement fermé. L’archéologue soupire et se remet au travail, dans un silence pesant et oppressant. La seconde serrure résiste moins longtemps aux efforts de la crocheteuse et cède pour révéler des paquets de livres emballés dans de la toile cirée. Elle extrait délicatement le premier livre de la pile et le tend à Lucien qui lit :

Theorie und Konstruktion eines rationellen Wärmemotors zum Ersatz der Dampfmaschinen und der heute bekannten Verbrennungsmotoren, c’est-à-dire « De la théorie et de la construction rationnelle d'un moteur thermique pour remplacer la machine à vapeur et moteurs à combustion connus aujourd'hui ». C’est ce que nous cherchions ! Je le savais ! Il existe !

Agathon s’approche de lui et se saisit du livre, nerveux.

– Si ce que vous nous avez dit est vrai, mon bon Lucien, alors l’invention de votre ancêtre pourrait changer la face du monde. La fabrication d’un moteur Diesel sera certainement la solution à nos problèmes de pollution. Demain, nos enfants respireront peut-être un air plus pur grâce à lui.

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