Le Lucide

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Il existe une beauté tragique dans le silence que l’on porte en soi, une résignation non pas comme un abandon, mais comme une forme étrange de paix. Dans l’ombre d’une vie marquée par la toxicité s'est formé un être lucide. Lucide sur tout : sur ses blessures, sur son isolement, sur son quotidien rythmé par une solitude pesante.

Depuis plus trois décennie, l’existence s’écoule sans surprise ni illusion. Il y a les faits : seul, sans amis, enfermé dans un quotidien immuable, avec des échos de réactions conditionnées par la peur ou le devoir — vestiges d’une enfance sous le joug de l’humiliation et de la violence parentale. Les mouvements du monde extérieur importent peu. Si la mort venait demain, ce serait bienvenu, non par désir, mais par acceptation.

L’amour semble hors d’atteinte, non pas par manque de volonté, mais par une étrange conviction : un sourire fracturé n’attire pas, une âme en paix avec l’échec n’éveille pas le désir. Et pourtant, il n’y a ni amertume ni haine envers cette réalité. Simplement une forme de constance dans le constat.

« Je suis brisé, comme tant d’autres ».

Cette phrase résume tout. Elle ne contient ni plainte ni recherche de solution. Il ne s'agit pas de se débattre ou de crier au secours, mais de vivre avec. D’exister dans un état d’acceptation stoïque où les jours passent sans que rien change, sans qu’il soit nécessaire que quelque chose change.

Et néanmoins, même dans cette immobilité apparente, il y a une force. Celle de ne pas sombrer. Celle de continuer, à sa manière. Il y a aussi cette étrange ironie : tout en n’attendant rien, on se demande si, dans quelques années, le monde ou soi-même auront bougé.

Peut-être que ce bilan sera redécouvert un jour, comme un éclat de miroir du passé, et qu’alors, il permettra de mesurer le chemin parcouru, ou au contraire de constater que la constance a été fidèle.

Pour l’instant, la vie continue, dans sa beauté brisée, dans son étrange équilibre entre lucidité et paix forcée. C’est un tableau sombre, mais pas sans dignité. Et si rien n’a bougé quand ce texte refera surface, cela ne signifiera pas un échec. Cela ne signifiera rien de plus qu’un état d’être, simplement.

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