1.2

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Banlieue sud de Paris, 15 minutes plus tard.

Aiguilleurs et aiguillés du ciel s'engueulent encore pendant quelques minutes jusqu'au moment où, d'un simple coup d'aile, la soucoupe disparaît dans une fulgurante accélération.

Quelques secondes plus tard, la voilà qui flotte silencieusement au-dessus du jardin d'une petite maison de banlieue. C'est une modeste masure en briques rouges, à la toiture couverte de mousse par endroits. Le jardin est plus exactement une friche encombrée d'herbes folles et de ronces, d'orties et quelques splendides enchevêtrements de chiendent. Peu après, l'engin se pose pendant que ses loupiottes multicolores s'éteignent petit à petit.

Comme la capsule Apollo en son temps, la soucoupe reste quelques longues minutes immobiles sans que rien de précis ne se passe. Les aliens auraient-ils besoin de se préparer avant de conquérir la Terre ? Leurs combinaisons spatiales les empêcheraient-elles de franchir le sas forcément trop étroit (parce que mal conçu par tous ces abrutis d'ingénieurs qui sont pas foutus de lever leur putain de gros cul de leur fauteuil, bien sûr) ? Les études épidémiologiques faites à bord révèleraient-elles des virus, des microbes ou des trucs de ce genre, incompatibles avec les organismes vivant dans l'appareil ?

En fait, rien de tout ça. Dans la soucoupe en question, il y a trois mecs. Deux terriens et un extra-terrestre, un vrai de vrai.

Ils reviennent d'un long voyage sur les côtes ouest-américaines où ils ont foutu un bordel pas possible dans un casino de Vegas. Quelques jours de plus sous le soleil des tropiques, sur quelques îles où les plus belles filles du monde ondulent du prose pour se dégotter un richissime mari, les salopes, et puis d'ultimes amplettes dans les magasins les plus prétentieux du monde (pour les plus prétentieux du monde, justement...) avant de décider de revenir chez Raymond Lendoffé, heureux propriétaire de la maison où l'engin spatial vient de poser ses pieds téléscopiques.

Avec Raymond, il y a René, son pote de toujours. Celui-ci dort à point fermé dans un recoin du vaisseau. Il n'aime pas les cieux, estimant que Newton avait raison quand il disait que tout ce qui s'élève dans les airs retombe forcément, à un moment ou un autre, et toujours trop vite, ce qui provoque invariablement blessures et contusions, voire pire.

Le troisième larron, encore occupé à sécuriser les abords de sa navette n'est autre que l'alien : Conardus, rejeton du roi de la lointaine planète Pûhte, dans la périphérie de la belle constellation des Khons. Conardus, fils de Pûhte, donc, est un voyageur au long cours, baroudeur et découvreur de mondes fantastiques. Pas encore en fin de carrière, même si son séjour prolongé sur Terre risque de lui attirer les foudres de ses supérieurs qui attendent depuis des années les rapports qu'il est tenu de leur expédier. Sans ces rapports, aucune action d'invasion ne peut être envisagée, voyez-vous ? Or, il est payé, équipé et soutenu par une gigantesque Entente Stellaire qui rêve de conquêtes sanglantes juste pour la gloriole. Seulement, Conardus est d'abord un savant, un surdoué en tout, un véritable "humaniste", si on peut parler de la sorte pour un extra-terrestre. Humaniste, donc connement écologiste et persuadé de voir dans les yeux des pires assassins, des plus cupides et des plus assoiffés de pouvoir, les restes d'une intelligence qu'il est pourtant seul à posséder... Et puis, il adore la Terre parce que c'est encore sur cette ridicule petite planète qu'il prend ses cuites les plus sévères, trouvant d'ailleurs en la personne de Raymond son maître incontesté dans l'art de la picole.

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