7.1

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L'Emir Abel marche d'un pas décidé vers la grande Porte Dorée. Les gardes le regardent approcher sans rien dire, pendant que les trois ancêtres préfèrent rester quelques pas en arrière, des fois que... Il ne reste plus que trois mètres à faire quand Abel change brusquement de route et pique à gauche, accélérant encore un peu le pas. Raymond n'a rien vu et toise déjà les gardes d'un air ironique quand Agathe l'attrape vivement par le coude et lui intime en silence de le suivre. Surpris, il baisse la tête en direction de la vieille mais René le choppe par l'autre coude et le porte presque pour le forcer à bifurquer à gauche, puisqu'Abel a décidé de voter pour ce côté là !

  • Mais qu'est-ce que vous faites ? s'étonne-t-il.
  • La ferme, et suis l'autre escogriffe, sans faire de salade, s'il te plaît, répond Agathe d'un air faussement détendu. Je sais pas ce qu'il se passe, mais il vient de changer de voie, alors y a sûrement du vilain dans le secteur.
  • En attendant, crois-moi, faut qu'on se tire ailleurs ! confirme René. On va rattraper l'autre tordu et on verra plus tard le pourquoi du comment.

Raymond opine du chef en se dégageant de l'étreinte de ses potes, puis d'un pas qu'il voudrait nonchalant, active la cadence pour rattraper l'émir.

  • Dis-donc, mon pote, on devait pas aller de l'autre côté du mur ?
  • Si fait, si fait ! D'ailleurs, on y va en ce moment même ! répond Abel.
  • Tu m'avais pas dit que tu faisais ton affaire des gardes à la porte ? insiste Raymond.
  • Les gardes, pas de problème. D'ailleurs, tu as bien vu, non ? Mais je peux pas tout contrôler, mon ami...
  • Contrôler quoi ?
  • J'ai aperçu les aigrettes des casques d'un peloton de prétoriens, et je peux t'assurer qu'on peut vraiment rien contre ceux-là ! Sans compter que si ces dangereux assassins sont dans les rues, c'est pas pour rien. A mon avis, ils cherchent quelqu'un ou ils accompagnent quelqu'un d'important...
  • Une grosse patate, tu veux dire ?
  • Une grosse quoi ?
  • Du grossium, de l'élevé au foie gras, du gras du bide ! dit René qui veut savoir aussi. Des mecs de la haute, quoi !
  • Ah ! Je comprends ! Non, je pense plutôt à ceux qui nous gouvernent ; ces sales Romains qui nous piquent tout notre blé !
  • Pas facile pour le pain, concède René d'un air compatissant.
  • Mais non ! Le blé : le carbure, le fric, la maille, le pognon, l'artiche, la fraîche ! Le blé, quoi !
  • Ah, vous aussi, vous avez droit de vous faire racketter, alors !
  • M'en parle pas, soupire Abel. Depuis que le Grand Hérode de mes fesses est retourné en enfer, endroit qu'il n'aurait jamais dû quitter, Rome nous a envoyé un remplaçant, et celui-là veut vraiment se remplir les poches.
  • Alors, il vide les vôtres ! s'exclame Agathe.
  • C'est ça, répond Abel.
  • En attendant, ça m'explique pas pourquoi tu changes de chemin, observe Raymond. Ce serait pas toi qu'ils cherchent, des fois ?
  • Disons que je préfère pas tenter les Djins, allez savoir si ce Ponce Pilate voudrait pas se faire du gras sur ma modeste fortune. Il y a quelques temps, une de leur cohorte est passée sur mes terres et ils n'ont rien laissé debout, fait Abel d'un air sombre. En plus, ce mec est complètement taré : il se déplace toujours avec une gamelle pleine de flotte. Il paraît qu'il supporte pas la poussière sur ses mains, le pauvret ! A chaque fois, il dit : je m'en lave les mains. La belle affaire, hein ?
  • Je vois le genre, ouais... confirme Agathe, soudain inquiète. Les gars, faudra que je vous parle en urgence, dès qu'on pourra, ok ?

Raymond et René la regardent, un peu étonnés, mais donnent leur assentiment d'un signe de tête.

  • Dis-donc, Abel, si on passe pas par l'entrée des artistes, ça veut dire qu'on va passer par la porte de service ? demande Agathe.
  • C'est à peu près ça, oui, confirme Abel. En fait, on va passer par une autre porte, c'est un peu plus loin, mais c'est plus direct pour aller chez mon pote.
  • Et c'est plus discret, grommelle Raymond.
  • Voilà, c'est ça, mon ami. Tu comprends vite. Que veux-tu, on ne peut pas toujours faire ce qu'on veut dans la vie. A moins d'être de la famille d'un dieu... confirme Abel sans se retourner. Nous sommes presque arrivés à la porte, faites pas les cons, hein ?
  • Compte sur nous, glousse René. On sait se tiendre, quand y faut !

A suivre...

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