CHAPITRE XX

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De la suite de la gouvernance du président don Juan de Borja, et de sa mort; des auditeurs ayant été en poste à l'Audience Royale sous ledit gouvernement. De la venue de l'archevêque don Fernando Arias de Ugarte et de sa promotion à Las Charcas. De l'entrée du marquis de Sofraga à ce gouvernement, et de celle de l'archevêque don Julián de Cortázar à cet archiépiscopat; de sa mort et de la venue de monsieur l'archevêque don Bernardino de Almansa.

Une fois terminées les noces de don Luis de Quiñones et doña Juana de Borja, qui furent célébrées, comme je l'ai dit, dans la vallée de Neiva, les jeunes mariés partirent au Pérou, et le président revint en cette ville de Santa Fe. Sous ce gouvernement vint comme auditeur de cette Audience Royale Antonio de Leiva Villarreal, qui fut ensuite muté à l'Audience de San Francisco de Quito; il mourut en ladite ville le neuf août de l'an 1609. Vint comme auditeur le docteur Juan de Villabona Subiauri, qui fut muté à Mexico, où mourut sa femme, et il se fit donc ecclésiastique, troquant ainsi la toge pour l'habit de Saint Pierre. Puis vint comme auditeur de l'Audience Royale le licencié don Francisco de Herrera Campuzano, qui en raison de la visite de Zaragoza, ainsi que pour d'autres motifs liés notamment à des histoires d'héritage, après son jugement de résidence partit en Espagne; là-bas il obtint un poste d'auditeur de l'Audience Royale de Mexico, où il mourut. Le licencié de Cuadrado Solanilla Buenaventura, après avoir servi à Saint-Domingue en l'île d'Hispaniola, vint en l'an 1602 à cette Audience Royale, où il occupa le poste de contrôleur durant de nombreuses années; et, ayant été promu auditeur, il mourut en cette ville le neuf août de l'an 1620, alors qu'il jouissait d'une excellente réputation de bon chrétien.

Le docteur Lesmes de Espinosa Saravia vint comme auditeur de l'Audience Royale, et il entra en cette ville le trente décembre de l'an 1613. Sa résidence fut jugée en l'an 1633 par le visiteur Antonio Rodríguez de San Isidro Manrique, qui le démit de ses fonctions. On dit qu'il lui saisit plus de trente mille pesos, et que le docteur mourut le neuf mai de l'an 1635, si pauvre, que la nuit de sa mort, il n'avait qu'un simple morceau de bougie de suif pour lui éclairer le corps, qui demeura sans linceul, car il n'avait pas les moyens d'en acquérir. Plus tard on dit que le visiteur avait rendu l'argent ouvré qu'il lui avait saisi pour couvrir les frais d'enterrement, qui se fit avec curé et officier civil, et auquel assistèrent de nombreux prêtres et gens du peuple. Il est enterré au couvent de nonnes de Santa Clara, où ses filles étaient nonnes.

À travers son exemple il apparut très clairement que la fortune n'oublie pas de faire tourner sa roue, puisque hier il était riche et puissant, au point qu'il présida même comme auditeur le plus ancien; et plus tard nous le vîmes aller de par les rues, places et audiences, diligentant lui-même ses propres causes, tel un homme du commun. Ainsi plaisirs, jouissances et chagrins débouchèrent-ils sur la mort. La mort est l'aboutissement et le repos des peines. Nulle grande chose ne s'obtient dès la première tentative; or mourir est une si grande chose, qu'il est fort nécessaire de bien mourir; mourons donc de nombreuses fois dans la vie, pour être en mesure de mourir du mieux possible dans la mort. Et tout comme de la mémoire de la mort procède l'évitement des péchés, de son oubli procède leur commission.

Après le docteur Lesmes de Espinosa, vint comme auditeur de l'Audience Royale le licencié Antonio de Obando, qui l'avait été auparavant de l'Audience de Panamá; puis il quitta ce Royaume, ayant été muté à celle de Las Charcas. Don Fernando de Saavedra vint comme contrôleur de cette Audience Royale en l'an 1620, avant d'y être promu auditeur, et d'en être finalement muté à celle de Lima, pour y exercer les mêmes fonctions. Le licencié Juan Ortiz de Cervantes, naturel de Lima, grand lettré, vint comme contrôleur, et, ayant été promu auditeur, il mourut en cette ville, en septembre de l'an 1629; conformément aux instructions qu'il avait laissées de son vivant, il fut enterré en l'église de San Diego, dans une chapelle qu'il avait lui-même fondée, sous le patronage de Nuestra Señora del Campo.

Cette image est de pierre, et elle demeura de nombreuses années en rase campagne, au bord de la grand-route qui va de cette ville à celle de Tunja, sans recevoir vénération aucune. Grâce aux frères de San Diego et au zèle chrétien de l'auditeur, elle fut déplacée au couvent où elle fut ornée; l'auditeur lui fit bâtir une chapelle à ses frais, où il la plaça, ce qui fut l'occasion de donner de somptueuses fêtes. Un an plus tard il mourut, et la Vierge l'emmena avec elle, c'est du moins ce que l'on peut pieusement croire, et elle payait ainsi à l'auditeur le service qu'il lui avait rendu en sauvant cette image de l'abandon, et en la plaçant là où elle recevrait la vénération qui lui était due. Car ce qui est certain, c'est que cette image fait l'objet d'une grande dévotion. L'auditeur est enterré dans la même chapelle, à côté de l'autel, et les frères de ce couvent font preuve d'un grand soin tant envers les dons qu'ils ont reçus qu'envers leur bienfaiteur.

Le docteur don Francisco de Sosa, naturel de Lima, professeur à l'Université de ladite ville, vint comme auditeur de cette Audience Royale en l'an 1621, et il y occupa son poste jusqu'en l'an 1634, où il fut muté à l'Audience de Las Charcas. En l'an 1624 vint comme auditeur de cette Audience Royale le licencié don Juan de Balcázar, et il y sert toujours aujourd'hui, en la présente année 1638. Le licencié don Juan de Padilla, naturel de Lima, vint comme auditeur de cette Audience Royale en l'an 1628; en l'an 1632 il fut démis de ses fonctions par le visiteur don Antonio Rodríguez de San Isidro Manrique. Il se trouve à présent en Espagne.

Tous ces messieurs servirent comme auditeurs à l'Audience Royale sous le gouvernement du président don Juan de Borja. Ce dernier, une fois terminée la guerre contre les Pijaos, une fois rendus sûrs les chemins (tel qu'ils le sont toujours aujourd'hui), une fois les terres pacifiées et peuplées de résidents, veuf de doña Violante de Borja, sa femme, et mariée doña Juana de Borja, sa fille, à l'auditeur Quiñones, il tomba malade en cette ville et y mourut le douze février de l'an 1628. On lui fit de somptueuses funérailles. Il repose sous l'autel majeur de la sainte église cathédrale de cette ville.

Et à présent revenons au docteur don Fernando Arias de Ugarte, nommé archevêque de ce Nouveau Royaume, et que nous avons laissé à l'Audience Royale de Panamá, y exerçant les fonctions d'auditeur. De là il fut muté à Las Charcas, où l'Audience Royale le nomma corrégidor de Potosí. Il y servit avec une telle droiture, que les gens vicieux le craignaient, et ils s'abstinrent de commettre des sottises tandis qu'il occupait ledit poste. Puis il fut promu juge supérieur aux mines de mercure de Huancavélica, qu'il administra avec une grande fidélité. Puis il fut muté à l'Audience Royale de Lima, où le précéda une telle réputation de bon juge, que le marquis de Montesclaros, le vice-roi du Pérou d'alors, en fit son assesseur personnel, lui confiant une importante part de son action gouvernementale.

Avant même de venir aux Indes, ce grand homme avait nourri des intentions et de grands désirs de se faire ecclésiastique, et ainsi il adopta de si austères habitudes de vie qu'il paraissait un moine. Finalement il fut ordonné suite à une distribution du pape; et en peu de temps, avec l'aide du Vice-roi, qui toujours le soutint et loua ses vertus, il fut promu évêque de Quito; et lorsqu'il fut consacré, le Vice-roi fut son parrain; avant le sacre, ce dernier l'avait prié, en tant que lettré, de lui dresser un inventaire de ses biens, avec bon espoir de pouvoir en employer une partie dans une œuvre pieuse mémorable, qui fut le couvent de nonnes qu'il fonda ultérieurement, tel que nous le verrons plus avant.

Après avoir pris congé du Vice-roi et de ses conseillers, prélats, inquisiteurs, auditeurs, religieux et autres gens vertueux, il partit pour son évêché de Quito, qu'il visita entièrement et personnellement. Là-bas il obtint une promotion d'archevêque en sa patrie, et partit sans tarder pour prendre ses fonctions à l'archevêché de Santa Fe. En chemin il reçut le pallium en la ville de Popayán, des mains de son évêque don fray Juan González de Mendoza. Il entra en cette ville de Santa Fe le neuf janvier de l'an 1618, où le président don Juan de Borja, fort affectueusement, lui avait prévu un accueil chaleureux et festif; les habitants manifestèrent eux aussi l'immense joie que leur procurait le retour tant attendu de ce fils de leur République, dont la prestigieuse présence les honorait tant.

Après avoir rendu visite au clergé et aux nonnes, il partit faire celle de tout son archevêché personnellement, refusant de la déléguer à des commissaires. Et cette entreprise représenta pour lui un labeur titanesque, car elle le mena jusqu'en des lieux aussi lointains qu'isolés, où jamais nul de ses prédécesseurs ne s'était rendu, tel San Juan de los Llanos, d'où il poursuivit ensuite jusqu'à la ville d'El Caguán, traversant ces plaines incultes et vides de gens sur plus de quatre-vingt-dix lieues. Arrivés au bout desdites plaines, les guides, par erreur, s'engagèrent dans une chaîne de montagnes infranchissables, et bientôt ils se retrouvèrent dans l'impossibilité d'avancer; ce contretemps leur fit épuiser leurs provisions, sans possibilité de se ravitailler. Ils eussent donc sans nul doute tous péri de faim, si ne les eût trouvés un résident d'El Caguán, qui, guettant attentivement leur venue, était allé à leur rencontre, et il les secourut tous.

D'El Caguán, il revint par la vallée de Neiva en cette ville de Santa Fe, avant d'en repartir pour visiter celle de Tunja et son district, qui s'étend jusqu'aux plaines de Chita, où les Indiens de paix confinent avec d'autres de guerre. Ces derniers témoignèrent autant de bienveillance et de respect envers le prélat que s'ils eussent été des chrétiens imprégnés de sainte doctrine, ce qui suscita l'admiration de tous ceux qui accompagnaient monsieur l'archevêque et qui, soucieux de sa sécurité, l'avaient averti de ce risque, qui était, certes, très grand, pour qu'il usât de toute la prudence requise. Après son retour de ces plaines il effectua la visite de la ville de Pamplona, suivant le cours du río Loro, dans lequel il manqua de se noyer. En la ville de Pamplona il consacra son proviseur, le docteur don Leonel de Cervantes Carvajal, archidiacre de cette sainte Église cathédrale, suite à quoi le docteur partit pour Santa Marta, où il avait été élu évêque. De son côté l'archevêque poursuivit avec la visite de la ville de Mérida et son district, qui comprend les villes de La Grita, Barinas, Gibraltar et Pedroza, ainsi que les terres qui les environnent.

Après cela il revint à Tunja, d'où il partit visiter Vélez, Muzo et le bourg de La Palma. Toutes ces visites l'occupèrent plus de trois ans, obtenant ainsi la confirmation de plus de douze mille âmes, avant de revenir en cette ville de Santa Fe, où il convoqua les évêques suffragants pour célébrer un concile provincial, ce qui était son souhait le plus cher.

Ne vint pas celui de Popayán, car il était malade; il envoya donc, pour le représenter lui et sa cathédrale, le père Alonso Garzón de Tauste, curé de la sainte Église dudit évêché. Le siège épiscopal de Carthagène étant à ce moment-là vacant, il fut représenté par l'évêque de Santa Marta et deux de ses prébendiers. Monsieur l'évêque de Santa Marta vint donc personnellement, et il fut reçu fort chaleureusement par monsieur l'archevêque. Ainsi se tint la célébration du concile, qui fut l'occasion de nommer des prébendiers de cette sainte église récemment diplômés qui y assistaient, et des lettrés de tous ordres avec leurs prélats. Y assistèrent également monsieur le président don Juan de Borja et le licencié Juan Ortiz de Cervantes, grand lettré et contrôleur de l'Audience Royale de ce Royaume, ainsi que deux régisseurs de cette ville; l'un d'eux, Juan Clemente de Chaves, en fut lieutenant royal, et était un homme discret, qui reçut des pouvoirs d'autres Cabildos de ce Royaume. Le secrétaire de ce concile fut ledit curé Alonso Garzón de Tauste.

Le concile fut célébré le vingt mai de l'an 1625, et y furent promulguées et signées les nominations desdits prélats; après les avoir ratifiées, ledit secrétaire les garda dans les archives de cette sainte Église, et en envoya copies à Sa Sainteté, l'implorant de bien vouloir les confirmer.

Après ledit concile, le vingt-deux juillet de la même année 1625 précisément, monsieur l'archevêque reçut les bulles relatives à sa promotion à l'archevêché de Las Charcas, pour lequel il partit huit jours plus tard. Ce voyage dura un an, car il le fit par voie terrestre, ce qui représente plus de huit cents lieues. Là-bas il célébra un autre concile provincial, au terme duquel il fut promu archevêque de la ville de Lima, où les résidents le reçurent en février de l'an 1627 en lui témoignant tout l'amour et le respect qu'inspire un homme saint.

Il laissa en la sainte Église de cette ville de Santa Fe une chapelle bâtie à ses frais, dans laquelle fut célébré le concile, étant la meilleure de toutes, riche en ornements et reliques, et généreuse en indulgences qu'on cherche à y gagner. Il la laissa dotée d'une chapellenie que servent messieurs les prébendiers. Cette chapelle possède une crypte dans laquelle il reposerait aujourd'hui s'il n'eût point été promu archevêque de Lima, à l'exemple du docteur don Bartolomé Lobo Guerrero, qui est enterré dans sa propre chapelle. Furent enterrés dans ladite crypte un régisseur et un chanoine de cette ville, frères dudit archevêque, tandis qu'une sienne sœur fut enterrée au couvent de Santa Clara. Tous trois moururent en un laps de temps de trois mois, de la peste générale qu'il y eut en ce Royaume en l'an 1633, et qui tua monsieur l'archevêque don Bernardino de Almansa, un archidiacre, trois chanoines, quarante prêtres et autant de religieux, deux alcades ordinaires, un de la Confrérie, quatre régisseurs ainsi que de nombreux nobles et plébéiens, sans compter les esclaves, Indiens et mulâtres, parmi qui le nombre de victimes fut immense. Et la mortalité fut également très élevée dans les villages de cette juridiction, tant chez les Espagnols que chez les Indiens.

Monsieur l'archevêque acheta un terrain en cette ville, qu'il laissa à son frère le régisseur Diego Arias, qui à ses frais fit édifier un couvent de nonnes de l'ordre des Clarisses, où les sœurs s'établirent le sept janvier de l'an 1629, sur ordre de monsieur l'archevêque don Julián de Cortázar, en vertu de la licence qu'avait requise monsieur l'archevêque don Fernando Arias de Ugarte au pape et au Roi pour fonder ce couvent. Y entrèrent une sœur et deux nièces siennes, nonnes du Carmel, qui, fortes d'une licence papale pour s'y installer, en furent les inauguratrices. Monsieur l'archevêque don Julián de Cortázar nomma la plus âgée d'entre elles supérieuse, et sa nièce vicaire. Plus tard entrèrent au dit couvent d'autres sœurs, nommées par son fondateur, jusqu'à y atteindre le nombre de vingt-quatre; leur sustentation est à sa charge, et cette œuvre a été grandiose et mémorable.

Une bonne œuvre, réalisée au service de Dieu Notre Seigneur, est un escalier vers le Ciel; mais qu'en soient avisés les candidats: n'y laissez point interférer la vanité, car elle en serait détruite. N'en obtient nul fruit qui travaille aux bonnes œuvres, comme le dit Saint Grégoire, sans persévérance; car tout comme les vêtements couvrent le corps, les bonnes œuvres couvrent et ornent l'âme, et ainsi l'homme du monde vertueux fait des monastères. Ainsi Joseph vivant parmi les Égyptiens, Abraham parmi les Chaldéens, Daniel parmi les Babyloniens et Tobit parmi les Assyriens, furent saints et bienheureux. L'homme, avec la vertu devient plus qu'un homme, et avec le vice moins qu'un homme. La vertu est une forteresse imprenable, un fleuve infranchissable, une mer innavigable, un feu inextinguible, un trésor inépuisable, une armée invincible, un agent incorruptible, un guetteur imperturbable, un chemin invisible et une réputation impérissable.

Cent ans ont passé depuis la conquête de ce Nouveau Royaume de Grenade, car on en compte autant depuis qu'y sont entrés l'Adelantado don Gonzalo Jiménez de Quesada et ses capitaines et soldats. Nous sommes aujourd'hui en l'an 1638, et ils arrivèrent sur ce site en l'an 1538; et de tous ses présidents et gouverneurs, il n'y en eut aucun qui fût porteur d'un titre de noblesse. Le premier fut don Sancho de Girón, marquis de Sofraga, de l'ordre d'Alcántara, qui vint gouverner en occupant le siège de président, à la mort de don Juan de Borja. Il entra en cette ville le premier février de l'an 1630. Il amena avec lui sa femme et ses enfants, et de nombreuses personnes de son accompagnement et service; la suivante année de 1631 y entra en tant que visiteur de l'Audience Royale le docteur don Antonio Rodríguez de San Isidro Manrique. Et pour que l'on comprenne mieux cette représentation du monde il faut que tous les personnages se présentent sur scène, car l'œuvre me semble prometteuse et peut certainement nous en apprendre beaucoup.

Suite à la promotion qu'obtint l'archevêque don Fernando Arias de Ugarte, fut élu archevêque de ce Royaume le docteur don Julián de Cortázar, évêque de Tucumán, naturel du bourg de Durango dans le fief de Biscaye. Il étudia au Collège de Sancti Spiritus, dépendant de l'Université d'Oñate, où il enseigna plus tard la théologie des vêpres, avant d'étudier à nouveau au Collège de Santa Cruz de Valladolid, où il enseigna les arts. Puis il obtint un poste de chanoine à la cathédrale de Santo Domingo de la Calzada, avant d'être promu évêque du Tucumán. Pour venir à cet archevêché du Nouveau Royaume de Grenade, il fit d'abord le voyage du Tucumán jusqu'au Chili par voie terrestre, ce qui représente plus de cent vingt lieues; de là, par mer, il gagna la ville de Lima, puis le port de Guayaquil; de Guayaquil, à nouveau par voie terrestre, il gagna Quito, d'où il poursuivit jusqu'à Santa Fe, ce qui représente plus de deux cent cinquante lieues.

Il entra en cette ville le quatre juillet de l'an 1627, et le suivant de 1628 il descendit le grand río de la Magdalena, pour rencontrer l'évêque de Santa Marta, don Lucas García, de la main de qui il reçut le pallium dans le village de Tenerife, du diocèse de Santa Marta. Au retour il passa par Ocaña, puis par Pamplona, ne manquant pas de rendre visite à ses ouailles. Il mourut en cette ville de Santa Fe, consacré, le vingt et un octobre de l'an 1630.

À sa place fut élu archevêque de ce Royaume le docteur don Bernardino de Almansa, archevêque de Saint-Domingue, naturel de la ville de Lima, diplômé de l'Université de la même ville, de laquelle il sortit pour servir au bénéfice des Indiens, avant d'être promu trésorier de Carthagène, puis archidiacre de Las Charcas. Il fut proviseur dudit évêché pendant de nombreuses années, au cours desquelles il eut le temps d'en faire la visite. Et se retrouvant riche, il alla à la Cour d'Espagne, où il obtint le poste d'inquisiteur de Calahorra, et enfin celui d'archevêque de Saint-Domingue, primat de ces Indes; et avant même de sortir d'Espagne il fut promu à cet archevêché du Nouveau Royaume de Grenade.

Il entra en cette ville de Santa Fe, sans bulles et avec la seule cédule royale, le douze octobre de l'an 1631, et le suivant de 1632 il reçut les bulles autorisant le diacre et l'archidiacre de cette église métropolitaine à lui remettre le pallium. Ainsi le lui remirent le docteur don Gaspar Arias Maldonado, diacre, et le docteur don Bernabé Jiménez de Bohórquez, archidiacre, le jour de la Fête de l'Immaculée Conception de Notre Dame, de ladite année 1632.

Avant la Noël de la même année, il partit de cette ville de Santa Fe pour effectuer la visite de son archevêché. Il alla donc jusqu'à la ville de Pamplona, d'où il revint par celle de Tunja, d'où il gagna le bourg de Leiva, où il tomba malade de la peste générale et mourut, consacré et laissant testament et codicille, le vingt-sept septembre de l'an 1633. Il fut enterré en l'église dudit bourg. En la ville de Madrid, siège de la Cour d'Espagne, il dota un couvent de nonnes, duquel il reçut le titre de patron. Ce fut un prélat valeureux, et des plus éminents qu'il y ait jamais eu en ces Indes. Durant le peu de temps qu'il occupa ce siège d'archevêque, ne manquèrent point les heurts entre lui, le président et le visiteur, et il m'est entendu que la cause en était que le mal ne lui paraissait pas bien. D'autres en diront davantage à ce sujet, car pour ma part j'estime en avoir dit suffisamment.

Conformément à son testament, ses os furent transférés au couvent de nonnes duquel il était patron. Aujourd'hui son corps se trouve en cette ville de Santa Fe, dans la maison de Pedro de Valenzuela, chirurgien, dans une chapelle ornée, car le docteur don Hernando de Valenzuela, fils dudit licencié et de doña Juana Vázquez Solis, sa femme légitime, doit l'emmener en Castille dès que s'en présentera l'occasion en cette année 1638.

Les linceuls et ornements mortuaires avec lesquels il fut enterré, malgré leur séjour sous terre, sont en bon état; et le corps embaumé ne s'est point défait. Existent différentes opinions, auxquelles je réponds: s'il est saint, cela resplendira, et s'il est vain, cela se disloquera. Le marquis de Sofraga entendait diriger son gouvernement, et le visiteur Manrique de San Isidro sa visite, qui fut à l'origine de la suspension du docteur Lesmes de Espinosa Saravia, et de la saisie de ses biens. Le visiteur suspendit également le licencié don Juan de Padilla, qui est aujourd'hui en Espagne. À l'encontre des autres messieurs de l'Audience Royale ainsi que du président il prononça des condamnations, sans pardonner à d'autres particuliers, car chacun a sa plainte.

Peu avant son départ pour la ville de Quito, où il avait été promu auditeur de l'Audience Royale, furent émises à l'endroit du visiteur quelques satires, dans le détail desquelles je n'entrerai point ici en raison de leur mauvaise odeur. Il avait amené de Castille une femme pour le servir, ce qu'on ne lui pardonna pas, et on disait qu'ensemble ils ourdissaient de perverses machinations. Je fus témoin de l'envoi d'une lettre écrite par monsieur l'archevêque don Bernardino de Almansa, dans laquelle Sa Seigneurie s'exprimait en gardien de la doctrine évangélique; il en résulta que le visiteur tempéra ce furieux ressentiment, qui avait déjà tant malmené présidents, auditeurs et archevêques.

Le président don Sancho Girón, marquis de Sofraga, poursuivit son action à la tête du gouvernement avec une grande ponctualité, maintenant paix et justice sur ces terres. En ce qui concerne les finances, je ne dirai rien, car est actuellement en cours le jugement de sa résidence, et il y a de nombreuses personnes pour traiter de ce point. Je me demande seulement qui reçoit une somme d'argent pour la jeter et n'en faire nul usage. Ce qui est certain, c'est que chacun suit le chemin du piège qu'il a ourdi, et que si celui-ci s'avère avoir été mal tendu, il n'y a point lieu de se plaindre, car que l'on perde ou l'on gagne, on demeure un négociant. Je souhaite à présent en terminer avec tous ces gens, et pour conclure je dirai: opera enim illorum sequuntur illos.

Et puisque nous sommes arrivés au centenaire de la conquête du Nouveau Royaume de Grenade, il nous faut mentionner quels bourgs, villes et autres lieux y sont habités et assujettis à cette sainte Église métropolitaine et à l'Audience Royale. Nous reviendrons donc sur ce point après avoir traité du jugement de résidence du marquis de Sofraga.

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