Vous la verrez assise au bord du monde, tout en haut de cette falaise abrupte qui plonge dans l'immense océan de la vie. Vous la verrez quelque soit le temps, parfois la pluie et le brouillard vous donneront l'impression qu'elle à quitté son poste mais même invisible à vos yeux, caché par les éléments, elle sera là. Parfois le vent vous apportera sa voix avant même que vous ne la distinguiez, d'autre fois encore elle restera muette et alors ce sera presque comme si elle n'existait pas et pourtant...

Passez aux abords de cette falaise, qu'importe le jour, qu'importe le temps, passez et vous la verrez, assise au bord du monde, les yeux perdus au loin, dévorant l'horizon de son regard avide. Bien que vêtue, elle vous paraîtra nue, sans aucune protections, sans aucun artifices.

Vous vous demanderez pourquoi rester ainsi, immobile, comme statufié par le temps. Vous imaginerez bien des choses la concernant, vous la plaindrez peut être, la jugerez sans doute, vous émettrez des hypothèses toutes plus farfelues les unes que les autres pour vous expliquez la raison de sa présence ici. Oh ça oui, elle sera le sujet de nombreuses discussions, parce que la vie et les prétendues curiosités des autres sont tellement intéressante. Elle fera parler d'elle jusqu'à que vos attentions, vos médisances, vos spéculations soit accaparées par d'autre et alors vous l'oublierez. Alors vous passerez le long de ce chemin, en haut de cette falaise sans la voir mais elle ne disparaîtra pas pour autant.

 Cette femme restera assise là, au bord du monde, au bord de votre monde, au bord de son monde, à contempler l'infini, le néant, le gouffre de vide en dessous d'elle. Les questions qu'elle aura un temps suscitées en vous n'auront pas répondu aux siennes. Cette femme continuera de se demander s'ils arriveront vraiment un jour à avoir raison de ses rêves, de ses espoirs, si elle cessera un jour de se battre pour ce en quoi elle croit. Elle se demandera encore, combien de temps avant que le feu ne s'éteigne ? Cette femme se posera les mêmes questions, attendant encore et toujours d'en trouver les réponses sans savoir si réponses il y aura un jour. Pourtant malgré ses doutes et ses peurs, elle ne cessera jamais de regarder les étoiles briller et leurs lumières continuera de l’emplir nuit après nuit d'amour et de gratitude.
Oui, d'amour et de gratitude parce que ne vous y tromper pas, cette femme n'est au fond d'elle même, dans son cœur, derrière toutes ses peurs et ses questions, cette femme n'est qu'amour. Elle sait ce que la vie lui à déjà offert et c'est peut être l'une des raisons pour lesquelles elle reste assise là, pétrifiée au bord du monde. Parce qu'elle sait le bonheur qui est le sien et la tristesse qu'aurait pu être sa vie, pour cela elle est terrifiée, terrifiée de sentir un immense vide noir et gluant se former en elle et lui faire oublier parfois l'espace d'un instant ce bonheur qui est le sien. Elle à peur que si elle cesse de remercier, si elle ne s'estime pas chanceuse chaque secondes de tout ce bonheur qui est le sien, si elle ose ne serais-ce que penser à ce qui lui manque, à ce dont elle se sent encore privé, alors cette femme à peur que tout s’effondre et que loin de gagner un peu plus, elle finisse par tout perdre.

 Voilà pourquoi elle reste assise là, sans bouger, elle a peur de demander encore alors elle attends en se disant qu'en continuant de remercier, peut être un jour ses souhaits restant seront exaucés. Mais en attendant elle laisse le noir et le gluant s'emparer un peu plus de ses rêves, de ses espoirs, de ses envies et elle déteste cela. Cette femme déteste celle qu'elle est en train de devenir mais comme elle n'arrive pas à bouger, quand tout devient trop dur, quand ses peurs et ses doutes la submerge et qu'elle se sent faiblir, alors elle pense à lui.

 Elle pense à son amour, à l'homme qui a su toucher son cœur, à celui qui a su voir en elle la femme qu'elle est vraiment. A cet homme, elle à tout montré, elle n'a rien caché, elle s'est laissée être, entière et nue, parce qu'elle à sentie comme un pressentiment bien avant d'en être certaine, elle a sentie que cet homme saurait l'aimé entière et nue. Cette femme a su dès le premier instant qu'il serait celui à qui elle pourrait ouvrir la totalité de son cœur avec confiance et passion et qu'ensemble ils pourraient construire leur avenir.

 Alors quand elle est sur le point d'abandonner, de les laisser détruire ses rêves, de laisser ses envies se déliter, alors elle ferme les yeux et elle pense à lui. A ses bras autour de son corps qui font comme une muraille étanche aux tempêtes, solide face aux rafales des vents les plus violents, ses bras fort et ferme et pourtant si doux, rempli de toute la tendresse, de tout l'amour qu'il a pour elle. Elle pense à ses yeux dans lesquels brillent le firmament de ses nuits les plus belles, à son sourire qui fait monter en elle une bouffée de chaleur lui donnant instantanément la force et le courage de soulever cent montagnes.
Un jour, vous repasserez par cette falaise et sans savoir pourquoi, ce jour là vous remarquerez l'absence de cette femme et son absence se vérifiera jours après jours et alors elle recommencera à susciter toutes ces questions en vous et puis le temps passera et à nouveau vous oublierez et au fond qu'elle importance.

 Cette femme continuera d'exister avec ou sans vous, elle continuera de contempler les étoiles mais plus au bord de cette falaise, elle sera partie, se sera levée. Peut être qu'elle n'aura pas répondu à toutes ses questions mais dans le regard de cet homme, dans son sourire et dans ses bras, elle aura puisé la force nécessaire pour se lever et avancer malgré ses peurs et ses doutes. Cette femme se trouvera quelque part dans le monde, elle continuera de se battre pour ses rêves, pour ce en quoi elle croit et son cœur débordera de joie même sous la pluie à chaque fois qu'elle sentira la main de cet homme dans la sienne. Chaque matin où le soleil se lèvera sur leur corps enlacés, cette femme remerciera et goûtera le bonheur d'un jour de plus entre ses bras.