Je n'ai pas osé dire non, en fait.

Lui répondre sincèrement.

Quand j'ai été invitée à m'exprimer sur mon passé, j'ai répondu que oui, bien sûr, j'avais été heureuse dans ma vie, quand j'étais sous l'emprise de l'alcool dansant en discothèque.

Puis j'ai eu honte. Honte de ma vie, honte de moi, de ma lâcheté, de ce sentiment de victime.

J'aurais voulu lui expliquer, à cet homme qui me posait cette question à double tranchant, est-ce pour me trahir encore que l'on m'attaque ?

Cherche-t-on à savoir si j'ai été heureuse dans ma vie, au moins une fois - si pour eux je ne le méritais même pas ?

J'aurais voulu lui dire non, en fait, je n'ai pas été heureuse.

J'ai ressenti le sentiment d'être aimée, vraiment, pour qui je suis, et non pour ce que je peux apporter, donner, échanger, monnayer, offrir de bon coeur ou contre un service, non, inconditionnellement, je me suis sentie aimée, pour la première fois, pour la seule fois de ma vie, à 17 ans, sans arrière-pensée, sans travers, sans perversion malsaine, dix petites secondes de ma vie.

Sur 46 ans d'enfer.

Qui m'ont seulement apprise une chose : tout se monnaye, même l'amour.

S'il avait été richissime, si j'avais été plus confiante, si j'avais osé dire non, je ne veux pas le quitter pour toi, l'enfant du diable mais parent d'un ange, parent abusant de son autorité, je n'aurais pas eu à répondre à cette question débile et menaçante.

Car si j'avais osé dire non, je n'ai pas été heureuse dans ma vie, dix secondes d'amour ça ne compte pas, tu m'aurais sûrement répondue : mais l'amour est partout.

Sauf que... tout se monnaye un jour, chéri.

Et on te fera à jamais regretter d'aimer en retour. Même pour dix secondes de ta vie.