Chapitre 2

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Par la suite de la crise économique en Italie, nous décidâmes de revenir en France. (Mes parents et mes sœurs avaient quitté l'Italie un peu avant nous) Je n’arrivais pas à trouver de travail, mon contrat à la boulangerie n’étant que de trois mois et Michaël avait ouvert une entreprise mais ne trouvait pas beaucoup de clientèle. Il me notifia toutefois que si nous devions partir de ce pays c’était entièrement de ma faute, (avec les manipulateurs, tout mais alors tout est de votre faute, vous êtes le seul coupable) et qu'en France je me devais absolument de trouver un travail pour aider à maintenir la famille. « C’est le haut de la pyramide, avait-il dit en dessinant un triangle de ses mains. Il n’y a pas plus important que le travail dans une famille, tout le reste vient après. Si le travail va alors tout dans la famille va. »

Nous voilà donc de retour dans le petit village de la Côte d'Azur que nous avions quitté quelques temps auparavant. Je trouvai du travail dans le supermarché dans la ville voisine. Les horaires me convenaient parfaitement, le matin de cinq heures jusqu'à onze heures du lundi au samedi. (Là aussi question de préférence, pour ma part je n'aime pas les coupures) Deux mois plus tard, une place à l’épicerie du village se libérait et mon mari accompagné de sa mère firent tout leur possible pour que j’y sois embauchée. Sans vraiment le choix, je quittai la grande surface et acceptai le poste, mais je déchantai très vite. Le patron était odieux, il me rabaissait sans cesse. Il m'appelait pour l'aider en caisse, il s'écriait devant les clients : « Mais regardez-moi ça ! Elle ne sait même pas mettre des articles dans les sacs ! Elle est tellement nulle ! ». Beaucoup d'entre eux me regardaient embarrassés, ne sachant pas quoi dire et quittaient en vitesse le magasin. Ou bien alors que j’étiquetais les produits, il me regardait et secouait la tête l'air désespéré. Et quand venait l'heure du nettoyage, il s'exclamait : « Tu ne sais même pas comment on passe un balai, mais pff, mais pff ! ». Quand j’en fis part à Michaël, celui-ci se fâcha en me rétorquant que si j’agissais de cette manière, c’était parce que je ne voulais pas travailler. J'essayai de lui expliquer la situation, mais il ne voulut pas m'entendre. Il décida pour me faire « réagir », ou comprendre les choses comme il disait, de partir vivre pour un peu de temps chez un de ses amis. Il y vécu pendant quelques mois et allait faire la fête à longueur de temps. Il venait quelques fois à la maison pour manger, faire l’amour avec moi ou déposer du linge à laver (oui comme c'est pratique...), d'ailleurs il ne voyait les filles qu'à ce moment-là. Il m’avait formellement interdit toutefois de l’annoncer à sa mère par peur des représailles qu'elle aurait pu lui faire, ni à aucun membre de ma famille. Je devais faire comme si tout allait bien (en italien il y a cette expression : « fare buon viso a cattivo gioco » qui explique bien cette situation) et je gardais tout au fond de moi. La situation à l’épicerie ne s’arrangeait pas du tout, j'étais au plus bas. Un soir j’étais effondrée dans mon lit, je le suppliais de rester avec moi mais rien n’y fit, il décida d’aller tout de même à un concert avec ses amies (oui oui, amies uniquement de sexe féminin). Je me demandais comment je pouvais m’en sortir sans lui (ils vous rendent tellement dépendants que vous pensez ne pas réussir) Pourquoi me laissait-il dans cet état-là à pleurer toutes les larmes de mon corps et s’en foutre totalement ? Puis d’un coup à bout de souffle et n’ayant plus aucune larmes à verser, je me dis que si je voulais que les choses changent alors je devais d’abord changer moi-même. Mon mari m’avait quittée, très bien ce n’était pas la fin du monde. Je me levai le lendemain matin et décidai de sourire à la vie. Je recommençais à avoir envie de m’habiller et même de me remaquiller, mais les manipulateurs gardent toujours un œil sur vous et vous surveillent. Vous êtes leur proie, vous ne pouvez pas leur échapper si facilement. Il me dit un jour : « Je vois que tu fais des efforts pour t’arranger. » Et quand je lui demandais qu’il s'occupe des filles un week-end sur deux, il accepta et les emmena passer une journée à l’aquarium de Monaco. Cela ne dura pas car il revint à la maison deux semaines après lui avoir fait cette proposition. Il ne s'informa jamais sur ce que j'éprouvais ni comment je me sentais, non il continuait de sortir pratiquement tous les soirs avec ses amis pour ne rentrer que le lendemain au petit matin, ou une fois carrément le lendemain après-midi. Quand enfin je l’eus au téléphone ce jour-là il me répondit qu’il était trop bien là où il était et qu’il n’avait aucune envie de rentrer, surtout s’il se sentait obligé. Je sais oui, je vois déjà certains d’entre vous faire la grimace et vous allez me dire : « Comment t’as fait pour accepter ça ? » ou encore « Moi à ta place je n’aurais pas laissé passer, je l’aurais mis dehors ! ». Et j’imagine que d’autres vont me dire : « Je lui aurai dit de prendre ses affaires, il aurait plus jamais mis les pieds à la maison ! » Et c’est bien le problème avec la manipulation, et l'emprise qu'ils ont sur vous, toutes ces phrases on est incapables de lui dire en face ce qu'on ressent. J'entendais souvent cette phrase : « Oh, on va pas divorcer pour ça quand même ! On est pas comme tous ces couples qui n’essaient plus d’arranger les choses et se quittent à la première difficulté. On va penser qu’on est comme tous les autres ». Certains d'entre vous me diront également que si son ou sa compagne agissait de la sorte, vous auriez verrouillé la porte de la maison de l'intérieur, et ce faisant il ou elle n'aurait pas pu dîner et aurait dormi dans la voiture. Ainsi l'envie de rentrer tard le soir, après un apéro à rallonge, lui passerait assez vite. Mais si la personne qui partage votre vie a le même comportement que mon mari, un manipulateur, vous savez très bien qu'il est impossible d'agir de cette façon avec lui – ou elle. Si ils trouvent la porte de la maison fermée, cela ne les dérange pas le moins du monde, car ils vous ont sous-entendu un jour que s'ils seraient confronté à cette situation, ils seraient partis manger au restaurant ou seraient hébergés chez l'un de leurs amis, parti en boîte de nuit ou que sais-je encore. Vous savez également dans votre for intérieur, qu'il – ou elle – aura passé une bien meilleure soirée contrairement à vous, qui vous seriez inquiété toute la nuit.

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