Dossan et Kimi

3 minutes de lecture

La silhouette d’un jeune homme se dessinait dans la lumière du jour, traversant une rue fleurie par une après-midi printanière. Une brise vint ébouriffer ses cheveux noirs et soulever sa chemise blanche repassée. Les mains dans les poches, il se laissait transporter par le parfum de lilas qui embaumait la ville. Les massifs débordaient de couleurs sur son passage ; il en profita pour ramasser une fleur de cognassier qui, encore fraîche, était tombée de son arbre. Le pas léger, il se dirigea jusqu’à une palissade blanche envahie par un rosier grimpant et ouvrit la porte en bois sans mal. C’était un habitué.

Une fois arrivé devant la maison, il sonna, la fleur toujours en main. Une tête blonde jaillit aussitôt derrière la porte pour l’accueillir :

- Dossan ! Tu vas bien ?

- Bien, ça va, répondit-il, étouffé par les bras d’Alicia qui l’étreignait déjà.
- C’est gentil d’être venu. Entre, Kimi est dans son siège.

Il esquissa un bref sourire et la suivit dans le couloir, curieux.

- Louis est là ?

- Au salon ! retentit la voix de l’intéressé.

- Il s’est fait tout beau, dit Alicia, fière.

- Toi aussi, à ce que je vois, nota Dossan en jetant un œil à sa petite robe bordeaux. Tu es très jolie.

Alicia tourna sur elle-même avec un sourire maquillé de la même couleur que son ensemble.

- Merci.

Dossan s’arrêta net en apercevant Louis, penché sur Kimi qui gazouillait de bonheur. Il avait l’air heureux avec sa fille, comme apaisé par sa petite voix, malgré les nombreuses cernes qui alourdissaient son regard. Ses cheveux châtains s’éclaircissaient à travers les rayons de soleil, et son col de chemise dépassait à moitié de son pull beige. Alicia s’avança jusqu’à lui pour le remettre correctement en rouspétant :

- Aucun effort, je te jure.

- Merci, chérie, marmonna-t-il en levant les yeux vers elle.

- Bon… on va y aller. Dossan, on te laisse la petite pour l’après-midi ?

- Elle est entre de bonnes mains. Ne vous en faites pas, leur assura ce dernier.

Louis se leva et s’approcha de lui pour lui donner une tape amicale dans le dos.

- On vous laisse entre parrain et filleule, alors.

Dossan hocha la tête avec entrain, puis redevint sérieux quant à l’état de santé de son ami.

- Pas trop fatigué ?

Louis balaya l’air d’une main.

- Mais non. Je sais tenir quelques heures chez des amis, quand même.

- Je n’en doute pas, mais…

- Faut qu’on y aille, Do’, le coupa-t-il. On se voit tout à l’heure.

- Le biberon de Kimi est déjà prêt, si jamais, lança Alicia depuis la cuisine.

Déstabilisé, Dossan sentit la main de Louis quitter son dos et entendit les talons d’Alicia claquer vers la porte d’entrée.

- À ce soir !

- À ce soir, s’exclama-t-il.

Il resta immobile quelques secondes, plongé dans ses pensées. Louis l’inquiétait. Mais il ne put se faire de souci plus longtemps ; les gazouillements de Kimi le ramenèrent à la réalité. Il se hâta de la rejoindre et, s’asseyant en face de son siège, il déposa la fleur de cognassier sous son nez. Ses grands yeux bleus de bébé s’écarquillèrent. Le contact des pétales roses contre sa peau la fit éternuer. Dossan sourit et la reprit avant qu’elle ne finît dans sa bouche.

- Ça sent bon, hein ?

Kimi éleva ses poings vers lui pour essayer d’attraper la fleur. Un duvet blond commençait tout juste à parcourir son crâne lisse, et son petit nez prenait peu à peu la forme de celui de sa mère. L’expression de son visage, en revanche, appartenait plus à celle de son père.

- Je me demande déjà à quoi tu ressembleras, plus grande, lui dit-il, songeur. Aussi espiègle que ta mère, qui sait. Même si le côté plus posé de Louis peut contrebalancer.

Elle le regarda d’un drôle d’air.

- En tous cas, tu mérites toute la joie du monde, enchaîna-t-il en faisant tournoyer la fleur entre ses doigts. Et je te promets que, tant que je vivrai, il ne pourra rien t'arriver.

La vitesse avec laquelle la fleur s’agitait amusait beaucoup Kimi qui, dans un éclat de rire, ne pouvait décrocher son regard de son parrain. Il se pencha et l'embrassa longuement sur le front. La tendresse qui les unissait avait, depuis ce jour, une odeur de cognassier du japon dans l’esprit de Dossan.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 6 versions.

Vous aimez lire bbnice ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0