Prologue

3 minutes de lecture

Ce qui m’avait frappé en ces temps de printemps, c’était qu’il faisait froid, anormalement froid. Du fond de mon lit fait de paille et de coton, je remarquais la petite tête blonde de mon cousin dépasser de son édredon. Il grelottait. Je me levais alors, passant ma tête à travers la fenêtre de bois et le paysage qui s’offrait à moi n’avait rien d’envieux. Les rues étaient sales et poussiéreuses, le ciel taciturne, il était chargé de gris et d’une sorte de pigmentation verte qui se trouvait là bien avant ma naissance. Personne de ce pittoresque bourg ne savait ce qu’il s’était produit.

Personne n’avait d’ailleurs le droit de quitter Cartétoile, pas depuis le décret d’interdiction que le Jarl Frédérik avait mis en place. Parfois, lorsque je forgeais une ou deux épées avec Rybald, mon oncle, je songeais à ce qu’il y avait au-delà de ces murs, me laissant envahir par ce doux parfum d’aventure et de conquête. Les rares individus qui avaient franchi les portes de Cartétoile n’étaient jamais revenu pour la plupart, et les autres étaient devenus muets, pour ne dire complètement fous.

« Rin’ ? C’est l’heure de notre entrainement ! »

La voix grave de Loïs, me fit sortir de mes rêveries. Je dévalai alors les escaliers contestables de notre logis avant de débouler dans la forge de mon oncle. Une forte odeur de métal embaumait la pièce. Notre forge était la plus réputée de cette bourgade. Le jarl en personne passait quelques fois commande chez nous pour approvisionner ses troupes. Nous ne sommes point les plus à plaindre ici, mais je rêvais d’autre chose. Je voulais découvrir Mivaar et ses secrets, je me sentais prête à affronter le monde, prête à découvrir ce qui était arrivé à mes parents, qu’ils n'en déplaisent à certains.

Tous les matins, mon oncle, prenait le temps de nous entrainer, son fils et moi, au maniement des armes. En quelques années, je m’étais perfectionnée, je sentais qu’il était bientôt temps que je m’enfuisse d’ici. Loïs et moi aimions croiser le fer, après quelques coups bien placés sur ses protections de bois, oncle Rybald me déclara vainqueure de ce duel.

« Elerinna, j’ai besoin de fer pour la commande de la hache de guerre du Jarl. Je dois la finir avant l’aube, tu pourrais en chercher pour ton vieil oncle je te prie ? J’ai déjà fait parvenir ma requête au Jarl, il informera les gardes.

- De suite, oncle Rybald.

- Loïs t’accompagnera, ne rentrez pas trop tard. »

Loïs n’avait que seize ans, bien qu’il semblât robuste du fait de sa forte corpulence, il restait encore un gamin. Pour moi, l’amener hors du village était de prendre un risque inutile. Or, mon oncle semblait penser qu’il garantissait mon retour ici si son fils m’accompagnait, ce qui n’était pas complétement dénué de sens. Je n’oserais pas le laisser seul et encourir à sa disparition, ou pire encore.

Le trajet de la forge à la muraille de Cartétoile s’était fait sans un mot, les regards des villageois étaient fixés sur moi, me jaugeant, certains même rentrer dans leur modeste habitation forçant même leurs mômes à les suivre. Je n’y prêtais plus grande attention, cela avait toujours été ainsi. Les habitants de ce bourg m’évitaient tous comme la peste, à la moindre occasion. Un jeune garçon dont la mère tentait en vain de tirer vers elle s’arrêtait brusquement devant moi, me pointant du doigt.

« Maman, c’est quoi cette chose dans le cou de la dame ?

-Ce n’est rien mon chéri, allez, on rentre ! »

Elle réussissait finalement à l’entrainer jusqu’à ce qu’il me semblât être chez eux, ils s’y étaient enfermés. Cette chose. C’est comme cela qu’il l’avait appelé, c’est comme cela qu’ils l’appelaient tous. Même oncle Rybald et Loïs n’osait aborder ce sujet sans feindre le dégout. Cette chose me rendait différente d’eux, d’eux tous.

À la sortie de Cartétoile, le garde nous barrait la route à l’aide d’une lance aiguisée, sans doute forgée par mon oncle.

« Halte-là, où allez-vous ?

- Sous les ordres du Jarl Frédérik, nous sommes autorisés à franchir la porte.

- Vos noms.

- Elerinna et Loïs Fidgerald. »

À l’entente de nos noms, le bougre recula d’un pas avant d’informer d’un signe de la tête son collègue qui nous ouvrit les gigantesques portes de la ville. Une fois à l’extérieur, une sorte d’excitation prit place dans l’entièreté de mon estomac, je découvrais chaque fois un nouvel univers à l’opposé de ce qui se trouvait en ville. Le feuillage des arbres était orangé presque doré, et dans les buissons se cachaient de petits animaux, dont je ne connaissais pas les noms. Cet univers semblait magique, et cela aiguisait ma curiosité à ce niveau. Pourquoi cacher un tel monde aux yeux de tous ? De quoi pouvait bien regorger cet endroit ? Était-il dangereux ?

« Rin’, il y a quelque chose derrière toi ! »

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire Essilem ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0