Anecdote
Certains affirment que la vie n’a pas de sens. Elle en a forcément un ! Nous par exemple, nous en avons cinq... Enfin, la plupart d’entre nous. Il y a des privilégiés qui possèdent un sixième sens, rarement plus. Et encore, avoir un sixième sens, même si c’est un avantage, encore faut-il savoir s’en servir correctement. J’ai connu une femme qui se disait voyante extra-lucide. Elle est morte sous un camion... Elle n’avait pas vu un panneau de stop.
Revenons-en au sens de la vie, si nous possédons cinq sens, la vie elle, n’en aurait qu’un ? Un sens unique alors ? Ce qui n’offre que peu de choix. A part avancer et s’arrêter... C’est vrai, vous pouvez toujours refuser de marquer un stop, mais c’est à vos risques et périls, toutes les voyantes vous le diront. Donc, sens unique, impossibilité de faire demi-tour, l’affaire est réglée !
Et c’est ainsi qu’on avance dans la vie. Avec ou sans but, sans objectif bien défini... On avance.
J’aimerais bien qu’on lui ajoute quelques sens supplémentaires, à la vie. Sans rien demander à personne moi, je me suis octroyé un sens surnuméraire : le sens de l’humour ! N’allez pas dire : « Oui, mais le sens de l’humour, tu en as hérité à la naissance, c’est juste un coup de chance, et patati et patata... » Ne croyez pas ça ! D’abord, qui vous dit que c’est une chance ? Le sens de l’humour, c’est du boulot. Moi, j’ai commencé tout petit, dès le cours préparatoire. Tenez, j’ai justement une anecdote qui va dans ce sens :
La maîtresse, elle s’appelait madame Casalta... La maîtresse, disais-je, était une jeune femme blonde, jolie quoiqu’un peu froide, pour ne pas dire rigoriste. Elle avait un travers, propre à nombre d’enseignants de l’époque : elle maniait avec dextérité une petite règle en bois qui ne ratait jamais mes pauvres phalanges. Un jour, j’en eu assez de voir mes petits doigts bleuis par ses coups répétés jour après jour. Vous allez vite comprendre comment j’ai débuté dans l’humour, et ce, à bon escient.
L’hiver et ses frimas n’étaient pas encore arrivés, à peine quelques feuilles presque mortes se ramassaient à la pelle dans la cour de récréation, mes camarades hilares, se poussaient du coude en me désignant de leurs doigts qui n’étaient point encore tachés d’encre bleue. Sous la surveillance de madame Casalta, l’ascension vers la salle de classe se déroula dans une cohue inhabituelle. Notre maîtresse me désigna rapidement comme le responsable du tohu-bohu ambiant.
Quand tous les élèves furent assis à leur pupitre, armée de sa règle de bois vernis, la grande blonde avança vers moi : « Alors mon garçon ? Dès le début de la matinée, il faut que tu fasses le pitre ? Allez, mets tes mains sur la table. » Elle leva sa baguette, je posai mes mains suivant sa requête... Et son geste vengeur s’interrompit brusquement : « Ah ça ! lança-t-elle, tu te crois en décembre, dis ? » Elle frappa de toutes ses forces pendant que moi, je gardais mon inaltérable sourire.
Ce qui avait provoqué les joyeux éclats de mes camarades était posé, bien à plat devant l’enseignante : mes petites mains innocentes, bien protégées par des moufles douillettement rembourrées pour me protéger des rigueurs de l’hiver à venir, et éventuellement, des assauts cruels de la règle de madame Casalta. Que je porte des moufles alors qu’il ne gelait pas encore, était visiblement d’une drôlerie irrésistible, mais pas pour ma jolie maîtresse.
Donc pour conclure, j’aimerais partager avec vous le résultat de mes réflexions sur le sens de vie, surtout sur celui de la mienne. Premièrement, il faut s’arrêter aux panneaux stop, jusqu’à la ligne blanche, deuxièmement, il est essentiel de se donner les moyens de garder le sourire face à l’adversité. Et l’humour est un moyen imparable !

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