Chapitre 13 - 1 : Difficultés d’endormissement

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Le dernier TD de la journée se déroula cette fois-ci dans une véritable solitude. Pas de quoi plonger le jeune homme dans sa mélancolie habituelle cependant. Outre les événements de tout à l’heure, il se trouvait que cette séance de travail dirigé était bien plus intéressante que revoir les bases d’une langue qu’il avait déjà étudié durant plus de trois ans. Ainsi, le temps défila vite et, en un rien de temps, il se retrouva libre de toutes obligations. Hormis celle de rentrer avant dix-neuf heures à la coloc.


Malgré un temps encore clément et incitant à la flânerie, il devenait un peu trop frais au goût de Donatien. Il ne tarda pas trop dans le campus ni dans les rues menant à son nouveau chez lui. Cela ne l’empêcha pas de commencer à trouver ses marques dans ce quartier urbain et calme où lui et ses amis résidaient désormais. À vrai dire, cette ambiance ne changeait qu’à moitié son quotidien. Auparavant, Donatien résidait dans un modeste pavillon, au milieu de moults autres pavillons plus ou moins modestes, allant du misérable au pompeux, en passant par du mignon et du mauvais goût. Aujourd’hui le voilà cerné par des immeubles de cinq étages, de dix à quarante ans d’après ses estimations. Il regrettait la monotonie des alentours, mais il louait de pouvoir jouir d’un calme pareil à ce qu’il avait toujours vécu.


Le jeune homme rentra enfin à la coloc. Ce soir, il était arrivé en deuxième, après Eddy. Ce dernier jouait tranquillement à la console, simplement accompagné d’un grand verre d’orangeade. Impressionné par la simplicité du bonheur de son ami, Donatien se décida à l’imiter en attendant les autres. Il alla rapidement déposer ses affaires dans sa chambre toujours non rangée avant de se servir à boire et de s’affaler sur l’un des deux fauteuils.


- Salut Dodo


- Salut Eddy


- La journée ?


- Pas mal de chose. Et toi ?


- La chance. Moi il y a juste quelqu’un qui a déjà décidé d’abandonner. Apparemment il « vaudrait mieux que ça ».


- C’est déjà quelque chose.


- Ouais… après je vais pas râler, globalement les gens sont sympas là où je suis. Juste dommage que je ne sois plus le plus fou d’un groupe de personne.


- Comme quoi on trouve toujours plus fort que soit.


Les deux amis furent interrompus par l’arrivée d’Aube, mais également de Ben qui lui fermait le pas. Ce qui ne manqua pas d’étonner quelque peu le jeune homme.


- Vous êtes rentré ensemble ?


- Oui, j’ai croisé Ben après m’être échappé d’un groupe de trois gars à l’air un peu débile.


- Ah, toi t’as des gens pas sympas dans ton école.


- Si ça va, c’est juste certains qui sont bizarres. Du genre encore plus que toi et Eddy réuni.


- Dit pas ça, Eddy a déjà l’air complétement déconfit en constatant qu’il n’était plus le plus fou de son école.


- Sérieux !? Ça veut dire que toi aussi tu passes pour un mec normal dans ta fac ?


- Euh…


La question de son amie le prit au dépourvu. Quelque part, Aube avait su formuler simplement la question que le jeune homme se posait après sa conversation avec Sophie. N’ayant pas trop eu l’occasion de s’y pencher dessus depuis, il ne savait que dire.


- Bah… je sais pas. Je crois que ça dépend des gens. Enfin, euh… en fait…


Aube abrégea ce moment de solitude de son ami s’asseyant précipitamment dans le fauteuil en face de lui. Une réunion semblait se tenir, si bien que Ben imita la jeune femme et s’installa à côté d’Eddy sur le canapé. Donatien se sentait obligé d’être transparent, il soupira de dépit avant de remettre de l’ordre dans son esprit. Il se considéra comme prêt à parler pile au moment où Eddy mourut pour la trente-septième fois face au même boss. Préférant les potentiels ragots de son ami à décéder une trente-huitième fois, il porta comme tous les autres son attention vers son ami.


- Alors… pour faire simple, moi et Émilie avons beaucoup parlé ce matin avant le début du cours. Et vu qu’elle m’avait dit qu’elle savait siffler aux oiseaux, je lui ai proposé de se balader ce midi. Ouais encore. Mais là elle a dit oui. Après on s’est baladé et oui, elle sait siffler aux piafs.


Après on s’est séparé pour la journée, vu qu’on n’avait pas les mêmes cours. Je pensais passer le reste de la journée seul, mais un groupe d’étudiants s’est installé à côté de moi et leur « meneuse » s’est mise à me parler. En gros elle me surveille et m’a plus ou moins ordonné de prendre soin d’Émilie pour une raison obscure. C’est à peu près tout ce qu’il y avait d’intéressant.


Donatien s’attendait à une réponse rapide et peu réfléchie de la part d’Aube, ou même d’Eddy. Mais rien de cela, au contraire. La jeune femme semblait plongée dans une réflexion complexe tandis que les garçons paraissaient un peu préoccupés. L’absence de répliques de la part de ses amis commençait à inquiéter le jeune homme. Que pas un des trois ne se permissent de blaguer ou d’ironiser lui paraissait d’assez mauvaise augure et les voir aussi perdus que lui n’arrangeait en rien son état de légère anxiété. Aube finit par rompre le silence, au grand regret d’un Donatien qui, malgré tout, aurait préféré que ce silence tendu se prolongeât plutôt que d’entendre cette maudite question.


- T’en pense quoi de tout ça… ?


Malgré tout, il n’en voulait pas à son amie. Quelque part, elle se contentait de lui renvoyer la balle qu’il avait lui-même lancé en acceptant de parler. Mais Donatien ne se sentait pas d’aller au bout de son initiative. Non seulement il ne comprenait toujours pas ce qu’il éprouvait depuis sa rencontre avec Sophie, mais il redoutait de dériver vers des préoccupations bien connues. Il se les trainait depuis tant d’années que le jeune homme avait appris à vivre avec eux. En vrac : son malaise social, sa peur de la confrontation, sa répression de ses émotions fortes. Préférant se confronter à tout cela de lui-même, sans personne autour de lui, il choisit sa solution de facilité favorite : botter en touche.


- J’en sais rien.


Aube se doutait de la réponse qu’elle allait recevoir, elle avait appris à connaitre son ami au fil des ans et des conversations difficiles entre eux deux. Elle espérait tout de même débloquer la situation en le poussant à mettre des mots sur les interrogations du jeune homme, en vain manifestement. S’imaginant qu’il était peut-être encore un peu tôt pour se prendre la tête sur ce genre de sujet, la jeune femme n’insista pas et se débrouilla ensuite pour détendre l’atmosphère.


- Même pas sur le fait que désormais t’es espionné quand même.


- Vous savez très bien que j’ai aucuns dossiers. D’ailleurs j’ai prévenu Sophie qu’elle allait juste perdre son temps.


- Sophie ?


- Celle qui m’a parlé en cours de latin.


- Ah d’accord.


- Et personne ne va rien dire sur le fait qu’elle parle aux oiseaux ? S’insurgea à moitié Eddy.


- Elle parle pas, elle siffle. Nuance.


- Ouais bon, elle communique avec les oiseaux quoi.


- Non, elle sait siffler aux oiseaux mais pas communiquer avec.


- Woah… c’est profond.


- Je lui dirai de ta part.


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