Saint-Malo
de
Salvard

Tandis que l’océan roulait ses yeux noirs bordés d’écume fumante, elle apparut majestueuse. A ses pieds de granit la mer provocante, cognait ses flancs imperturbables. Sous un ciel gris chargé de colère et de furie, Elle, triomphante, fière, offrait à l’horizon ses remparts ancestraux. Je ne pus que me plier à l’instant présent, à cette force inexplicable qui s’échappait de ses murs.
Je la reconnus telle que je la voyais dans mes songes, sublime, indifférente au temps, aux éléments.
Religieusement, je me mis à parcourir son antre, sous mes pas résonnaient ses pavés mouillés, rongés, gorgés de sel et de vent. Ses façades grises, dressées insolemment sous des toits d’ardoises me regardaient, moi l’étrangère, moi l’inconnue, qui voulait connaître leur secret.
Tout autour de nous, grondait l’orage imminent et déjà, la mer se retirait pour revenir plus forte, plus violente aussi. Se dessina alors un combat titanesque, celui de la main de l’homme contre celle de Neptune.
Le vent froid, lourd de promesses lointaines, fouettait mon visage, balayait mes cheveux, et faisait de moi, une pauvre chose fragile, esseulée. Au loin, les phares bousculés, battus, lançaient leurs couleurs vives que des vagues immenses engloutissaient aussitôt.
En un instant tout ne devint que chaos, effroi et beauté à la fois.
Puis, comme une manne divine, le Soleil Roi, perça la colère des Dieux et Elle se soumit à sa toute puissance. Un jaune or, entaché de pourpre et de feu, illumina les ruelles, les remparts, les façades. La ville brûla d’une lumière céleste, devenant plus belle que jamais.
Tableau océanique, presque irréel, Elle me pénétra avec force et fracas, terrassant en moi tout ce qui n’était pas Elle.
Les goélands silencieux pendant la bataille, redevinrent bruyants, firent de grands cercles, et enfin, rejoignirent le large.
Trempée, embrumée, Elle alluma ses lanternes, ses tavernes, libéra sa musique empreinte de métal et d’eau, pour basculer dans une nuit imaginaire. Ses odeurs d’algues, de sable, de bois humide, soulevées par le souffle de la côte, montaient de toute part.
Tout entière à ses démons faits de pierre, de brouillard et de chants, je la vis danser sur la lande telle une nymphe sortie des entrailles de la terre.
Table des matières
Commentaires & Discussions
Saint-Malo | Chapitre | 4 messages | 4 semaines |
Des milliers d'œuvres vous attendent.
Sur l'Atelier des auteurs, dénichez des pépites littéraires et aidez leurs auteurs à les améliorer grâce à vos commentaires.
En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.
Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion