— Billet 4

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Elle a ses rituels qui disent, les jours d’échappées, comme d’autres indices semés.
Cela m’a pris un temps à remarquer. Et puis quand bien je le remarque parfois, je l’oublie toutes les autres. Je cherche alors à rebours.
Je bois mon café et je respire dedans aussi.

Elle a recommencé cette nuit, mais je n’étais pas là avec elle le jour de cette nuit, je ne peux retracer quel rituel elle a opéré cette fois. Car des rituels, des magies au frigo, elle en a des tas.

Tout vider, étaler, sous les fenêtres à petits carreaux. Même les compartiments, et les petits recoins chiants de la porte, à grande eau, tout récurer, essuyer, passer au citron, essuyer à nouveau.

Parfois tout inventorier, au stylo noir sur un papier volant, trainant par ci ou par là, finissant sur le buffet près de l’entrée, glissé dans un de ses carnets jamais entamé, j’en ai même retrouvé un sur un pot du jardin, collé détrempé par la pluie. A croire que l’inventaire n’a pas tant d’importance, que la magie du rituel réside seule dans l’intention, l’acte, le mouvement.

Les gens qui listent me fascinent. Elle, encore plus.

Dans ses rituels qui disent, elle a ses variables et ses règles fixes.

La première, incontournable, aucun périmé. Que du présent ou du futur, l’idée d’un passé la panique. Une fois,  il y a longtemps, je lui ai imprudemment glissé,  que les dates n’étaient qu’une prudence, que je mangeais des yaourts passés de quinze jours plus tôt. De l’inconséquence à ces yeux effrayés, entre tristesse et angoisse. Pour autant, n’aller pas croire, jeter n’est pas plus envisageable. Jeter de la nourriture, c’est jeter le temps des femmes et des hommes, leur sueur, les cals des cueilleuses et des cueilleurs, les joues fardées de soleil et de vent. C’est jeter la terre, les lombrics, l’eau, le vent, le soleil, les abeilles. Comme l’on condamnerait la vie à gaspiller.
Enfin, les saisons du frigo, sont les saisons du dehors, mêmes couleurs, odeurs, saveurs, même cycle qu’elle imprime au-dedans, les hivers suivent les automnes, les étés, les printemps.

Il y a eu la période de papiers, brun glacés, celle des tissus lustrés de cire, et il semble que l’on se dirige vers une ère de bacs en verre, récipients ronds et carrés aux chapeaux colorés.

Quels rituels hier ? Il suffirait, peut-être, d’ouvrir la porte du frigo pour le dire. Mais ne serait-ce pas aussi sacrifier un peu de leur magie ?

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