Chapitre 1 : En route dans le Poudlard Express

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Saint Pancras, 1er Septembre 1936.

Comme tous les débuts d'années, en cette merveilleuse journée ensoleillée, la plus célèbre gare de Londres était en effervescence. Partout la foule affluait, autant composées de voyageurs empressés, que de familles affolées ou de membres du personnel de la gare parfois bousculés par les badauds allant tranquillement entre le hall et les voies de trains, certains arrivants, d'autres parés au départ vers de multiples destinations inconnues. Le tout se déroulant dans une absolue cacophonie, rythmée au son des roues de valises, des voix tonitruantes résonnant à tue-tête et des agressifs coups de sifflets.

Pourtant, quelque part à l'abri de tous les regards qui ne pouvaient savoir et des oreilles qui ne pouvaient percevoir, un nouveau tournant se préparait pour une poignée d'enfants de onze ans.

Car en effet, si cette gigantesque gare était un point de repère pour tous les habitants de l'incomparable ville infatigable qu'était cette capitale, elle était également le point de commencement de la scolarité de tout enfant sorcier anglais.

Derrière le mur qui séparait la voie 9 et la voie 10, dissimulée par ce qui paraissait être un mur infranchissable de briques rouges, se trouvait la mystérieuse pourtant non moins chaleureuse voie 9 trois quarts, incontournable lieu de rendez-vous annuel du monde magique.

Là, sous un panneau indiquant la direction de Poudlard, Ecole de Magie et Sorcellerie, se dévoilait une plateforme longue sur plusieurs centaine de mètres, à côté de laquelle un train à la couleur rouge flamboyante patientait, attendant son heure pour voguer sur les rails, contemplant les derniers au-revoir, parfois simplement courtois, parfois déchirants, des familles. Dans la cohue, des âmes juvéniles se détachaient de l'attention de leurs parents, des adolescents rassemblaient leurs affaires et discutaient avec leurs amis en s'installant dans les compartiments déjà habitués à ce rituel depuis longtemps maintenant, sous les appels de voix éclatants des vendeurs de journaux, tenant en main l'objet de toutes les polémiques qu'ils étaient désireux de céder pour un modique galion.

Alors que tous étaient alors fin prêts pour la nouvelle aventure, le sifflement de la locomotive résonna dans d'affreuses sonorités aigus, les roues s'actionnèrent, allant lentement dans un fracas métallique, quittant la plateforme du quai accompagnés de lestes mouvements de mains et de dernières recommandations parentales toujours criées à la volées, emportées par la vapeur s'échappant de la tête du train.

Finalement, au bout de quelques minutes, le calme s'était installé dans ce dernier.
Dans les différents compartiments, la plupart des nouveaux élèves apprenaient à faire connaissance, tandis que les anciens retrouvaient leurs camarades qu'ils n'avaient pas vus pendant les vacances.

Pourtant, un des compartiments semblait encore plus paisible que les autres, aussi silencieux que le couloir désert.

Les yeux rivés vers la fenêtre qui offrait un magnifique panoramique sur l'herbe verdoyante anglaise, un jeune garçon de onze ans, aux cheveux blonds comme les blés, regardait le paysage défiler, l'air rêveur, un sourire innocent affiché sur ses lèvres juvéniles.

Il contemplait avec tant d'ardeur l'extérieur qu'il fut pris de surprise et sursauta lorsqu'il entendit la porte coulissante du compartiment s'ouvrir brusquement dans son dos.

Se retournant rapidement, il découvrit alors avec étonnement une jeune fille à la peau très âle, ses longs cheveux blonds cendrés tombant sur ses épaules et dans son dos, un peu plus petite que lui, maigre, au visage anguleux et aux yeux bleus lavande perçants, déjà vêtue de son uniforme d'école, légèrement froissé. Elle tenait d'une main la poignée de la porte du compartiment, de l'autre une immense valise élégamment faite majoritairement de cuir.

A ses pieds, bien dressé sur ses quatre pattes, l'air fier et absolument ravi de cette promenade, se trouvait un chat au pelage blanc laiteux, dont les billes vertes scrutaient le décor et surtout l'enfant assit au loin qui le dévisageait avec attention.

- Heu...Excuse-moi..., demanda l'intruse d'une voix douce presque timide dans un accent anglais parfait, je peux venir m'installer ici ?

Affichant alors un immense sourire amusé, ses yeux bleus azurs pétillants de malice, le garçon fit signe à la nouvelle venue de prendre place sur la banquette face à lui, tout à fait ravi d'avoir une compagne de voyage pour les heures restantes, lui qui craignait de se sentir bien seul, s'il ne trouvait personne avec qui tuer le temps du trajet.

En silence, il regarda l'inconnue d'abord installer sa valise sur le sol, près d'elle. Il lui semblait que son bagage pesait six fois plus lourd qu'elle et il peinait à croire qu'elle avait pût transporter cette valise avec elle jusqu'ici sans encombre. Puis, il l'observa s'asseoir confortablement sur la banquette, près de la fenêtre, face à lui, son chat au pelage immaculé venant s'allonger sur ses genoux dans un geste purement affectueux et automatique.

Durant quelques secondes,qui parurent de longues minutes, le duo ne pipa mot, s'observant du coin de l'oeil, lorsqu'ils ne faisaient pas semblant de trouver la paix intérieure en admirant le paysage, qui n'était plus la campagne anglaise, mais une vue imprenable sur un immense lac aux couleurs oscillantes entre un bleu sombre et un vert profond selon la lumière. Leur silence était rythmé par le bruit répétitif des roues à pleine vitesse sur les rails anciens.

Finalement, désireux de créer du lien et de détendre l'atmosphère étrange, le garçon au cheveux couleur du soleil, apparemment bien plus à l'aise que sa camarade, sorti de sa poche un paquet de bonbon colorés bien rempli qu'il tint dans sa paire de mains, toutes deux cachées sous une paire de gants blancs d'un tissu de très belle facture. Tout en salivant presque, il ouvrit avec vigueur le sachet, s'empara d'un bonbon puis tendit son trésor inestimable vers sa comparse de wagon.

- Hé ! Ce sont des dragées de Bertie Crochues. Lui dit-il, s'adressant à elle avec un accent français à couper au couteau. Tu en veux ?

Face à lui, la demoiselle regarda en premier le paquet posté sous son nez, avec attention ainsi qu'une étrange curiosité avant de relever ses prunelles bleues améthyste vers le gourmand.

- Non merci. Mais c'est gentil de demander.

Tout d'abord étonné par cette réaction peu habituel selon lui, puis acceptant finalement la réponse de son interlocutrice, le jeune garçon haussa les épaules, avant de jeter un nouveau bonbon dans sa bouche goulument, s'adossant de nouveau de tout son poids sur la banquette moelleuse.

- Je m'appelle Emilien ! Déclara t-il fièrement, arborant son sourire le plus amical. Emilien Remus Vitalie de Baudry !

La blonde le fixa longuement, le détaillant d'un regard chirurgical de haut en bas comme si elle cherchait à analyser le moindre détail du visage, du corps et de la tenue de cette joyeuse nouvelle rencontre. Elle, cependant, n'arborait pas l'ombre d'un sourire, bien qu'il semblait que l'énergie positive de cet inconnu qu'elle côtoyait était quelque peu communicative.

- Alestra Lyre.

Emilien ouvrit de grand yeux amusés, entendant le nom de sa nouvelle amie avant de lui tendre une main gantée, après avoir encore enfourné un autre bonbon entre ses lèvres. Hésitante, elle tendit finalement son bras à son tour, prenant la paume du garçon dans la sienne avant de briser plutôt rapidement la poignée de main.

- Enchanté, Alestra Lyre ! Déclara t-il, avec une jovialité teinté de solennité. Il est beau ton chat, il s'appelle comment ?

Elle esquissa un bref sourire qui s'effaça au bout de quelques secondes, passant une main affectueuse sur le pelage de l'animal, étendu sur ses genoux avec élégance et délectation.

- C'est Agrimony. Tu as un chat aussi ? S'enquit-elle poliment de son ton de voix délicat.
- Non ! Moi j'ai un hibou grand duc ! Répliqua le blond avec énergie et contentement. Son nom, c'est Marc-Antoine !

Il semblait à la jeune fille que ce drôle de jeune homme était infatiguable et surtout heureux de tout. Seulement, un petit quelque chose la troublait fortement.

- Dis moi, demanda t-elle avec précaution, ton accent...
- Ah ça ! La coupa Emilien avec un léger rire perdu entre de la gêne et de la plaisanterie. Je suis français ! Mon frère est allé à l'école de Magie de Beaux-Bâtons, mais pour moi, mes parents, qui sont de grands diplomates, ont voulu faire un échange avec un autre élève, alors je suis venu ici à Poudlard !

Tandis qu'elle écoutait l'histoire du garçon à l'allure perpétuellement joyeuse, Alestra hochait brièvement la tête. Cela expliquait en effet pourquoi son compagnon de route avait une façon de prononcer les mots aussi particulière, presque drôle d'ailleurs, s'était-elle dit en son for intérieur. Elle avait abaissé ses prunelles vers la moquette lorsque la voix de son camarade de voyage vint capturer à nouveau son attention.

- Et toi ? Tu viens d'où ? Ils font quoi tes parents ?

La jeune fille hésita quelques secondes, cherchant ses mots, puis répondit de la même manière qu'on récite un texte apprit par coeur, face à Emilien qui avalait sa dixième dragée avec ravissement:

- Je suis anglaise. Mon père est Auror.
- Woah ! Mais c'est trop bien ! Il doit être super fort ton papa !
- Evidemment, répliqua calmement la blonde, une minuscule lueur espiègle dans le regard. Et quand je serai grande, je serai encore plus forte que lui.

Le jeune homme face à elle arqua un sourcil intrigué, presque rempli de défi envers sa nouvelle amie.

- Je suis curieux de voir ça, madame.

Il avait prononcé le dernier mot en français, égaré entre la galanterie et la douce provocation.

Piquée au vif, Alestra sorti une baguette faite de bois d'if, qu'elle tint fermement, presque religieusement entre ses doigts maigres et blafard.

- Tu veux que je te montre un sort ? Répliqua t-elle, désormais pleine d'entrain à son tour, avide de montrer ses talents devant les pupilles océan de sa nouvelle rencontre.

- Pour sûr !

Le spectateur déposa son paquet de bonbon à côté de lui, attrapant le tissu de la banquette du bout des doigts afin de se préparer à la réalisation du tour de magie de sa camarade, ses prunelles aigue-marine aux aguets de la moindre petite étincelle, prêt à être émerveillé.

Alestra se prépara quelques secondes, se concentrant au maximum. Il était important qu'elle fasse sensation et n'avait pas le droit à l'erreur ! Pourtant, alors qu'elle ouvrit la bouche et s'apprêta à agiter sa baguette, un cri de jeune fille strident résonna dans tout le couloir, suivi de deux rires diaboliques presque identiques et tonitruants.

Dans un bruit de course effrénée, deux garçons de la même stature, donnant la sensation d'être tout à fait semblables, passèrent en courant à toute vitesse devant la porte du compartiment, non sans laisser entendre quelques ricanements sonores et vils qui disparurent avec eux dans leur trajectoire folle. Quelques instants plus tard, la silhouette d'une grande dame à la chevelure blonde blonde, traversa le couloir à son tour d'une démarche qui traduisait un agacement évident. Elle se stoppa quelques instants devant le compartiment d'Alestra et Emilien, son ombre surplombant les deux enfants tandis qu'elle jeta un vague coup d'oeil sombre à l'intérieur, incitant Alestra à dissimuler rapidement sa baguette derrière son dos.

Puis, ne trouvant pas ce qu'elle était venue chercher, la femme s'écarta de la porte, puis reprit sa route, laissant de nouveau le duo seul.

Les deux blonds éclatèrent de rire, un rire juvénile et retentissant pour Emilien, un rire plus réservé et discret pour Alestra.

- Je crois bien qu'il y a eu une catastrophe ! Lâcha le jeune garçon, lorsqu'il retrouva enfin son calme, ses mains appuyant sur son ventre qui le faisait souffrir, tant il avait peiné à respirer.

Sa camarade, elle garda le silence, notant simplement pour elle-même qu'il lui semblait qu'une étrange odeur de chocolat se propageait dans le train. Il s'en faudrait de peu avant qu'Emilien aussi ne s'en rende compte d'ailleurs. Cependant, elle n'était pas seule à avoir sentie les effluves délicieuses, puisqu'elle vit son chat, le museau levé en l'air, décidé à se mettre en chasse afin de savoir d'où provenait ces saveurs alléchantes.

Décochant un regard désabusé au félin, la jeune fille rangea finalement sa baguette dans sa robe, pour éviter les potentiels ennuis, et s'empara de sa boule de poil avant même qu'elle ne songe à s'extirper de sa place, la contraignant à troquer la banquette pour ces genoux, tandis qu'elle retourna à sa place sur la banquette. 

Cependant, lorsque cette fois elle reporta son attention vers l'extérieur du train, le paysage la frappa véritablement. Subjuguée, l'enfant resta un petit temps pantoise face à la vue qui se découvrait à ses yeux enfantins. Là, au lointain, illuminé par les rayons pastels du soleil couchant, se dessinait sous lumière de la lune l'imposant château de Poudlard, l'illustre palais écossais qui abritait la plus célèbre et prestigieuse école pour sorcières et sorciers.

- Regarde, murmura t-elle dans un souffle émerveillé à Emilien.

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