Alors que le couvre feu avait été déclaré il y a quelques minutes dans l’école en cette soirée de fin d’automne, la tour d'Astronomie avait d'ores et déjà

été investie par un grand groupe d’élèves, prêt à lancer l’ouverture de la saison des clubs.

Au centre de ce petit rassemblement, et parmi les organisateurs impliqués, Colin Travers, préfet des Poufsouffle chapeautait les festivités d'une main de maître. Tandis que la pièce avait été entièrement insonorisée par un Assurdiato. Les élèves déjà présents s’étaient rassemblés en de petits attroupements homogènes, empiriquement répartis sur toute la surface de la tour. Des élèves de toutes les maisons, de tous les niveaux, des joueurs de Quidditch, des duellistes, les rois de la chorale, les meilleurs élèves de métamorphose avancée, et les plus populaires parmi les fêtards de l’école étaient au rendez-vous, prêts à profiter de cette belle soirée.

Une grand table avait été dressée pour l'occasion, recouverte de friandises, de gâteaux colorés, de saladiers entiers de jus de citrouille, de deux petits tonneaux de bière au beurre, et même d'une bouteille de whisky pur-feu pour les plus téméraires. Tous semblaient profiter paisiblement de la fête, tandis qu’étaient attendus de plus en plus de participants, en espérant que ce bon vieux Branson ne mettrait pas un terme à la petite sauterie improvisée.

Le fameux Branson, cette armoire à glace, commençait alors à peine à faire son tour de garde quotidien. Cet homme large, aux épaules imposantes, et à la mine fermée, marchait d'un pas lourd, parcourant les étages une lampe à huile à la main afin de vérifier que rien d'illégal ne se passait dans le château à cette heure tardive.

Les élèves avaient désertés les couloirs et le couvre feu était désormais en vigueur pour tous. Mais déjà, la rumeur de quelques preux garnements tentant de se faufiler dans les lieux interdits se répandait à toute vitesse.

Tandis qu’elle pénétrait dans sa Salle Commune, rentrant tout juste de la bibliothèque, l’esprit encore éparpillé entre les nombreuses lignes de livres parcourues tout au long de l’après- midi, Anémone Mandrake, rêveuse, croisa William Sobek au détour d’un virage, tandis que le garçon prenait le chemin inverse de sa camarade. Il s’arrêta cependant à sa hauteur.

- Tu viens à la soirée de ce soir ? S’enquit-il discrètement auprès d’elle.

La blonde regarda William, fronçant ses sourcils, n'étant pas vraiment certaine que les premières années aient le droit de se déplacer hors de leur salle pendant le couvre feu. Elle prêta alors attention au brouhaha ambiant qui, évidemment, relatait la soirée organisée par leurs aînés.

- Une soirée ? Celle des sixièmes années ? J’ignore si c'est une bonne idée, William. Omets-tu le couvre-feu ? Je pense que s’il y a des règles c'est qu'il faut les suivre, et où se trouve t-elle cette fête en plus ?

William, tout à coup ramené à la réalité indiqua à Anémone que la soirée se déroulait dans la Tour d’Astronomie, c’est à dire juste à côté.

C’est alors que Kit Kross qui s’était faufilé discrètement dans la salle, ayant entendu parler ses camarades, sauta derrière Anémone pour lui faire peur. La sorcière bondit, comme électrifiée.

- D’où vous hésitez ? S’écria t-il avec enthousiasme. On doit absolument y aller ! Ça va être trop cool, impossible de rater ça !

- Mais Seigneur... D'où est ce que tu viens ? Cria t-elle en lui adressant un regard courroucé. C'est pas drôle Kit ! J'ai eu peur moi !

Elle regarda ses deux interlocuteurs, prenant un air très sérieux cette fois ci.

- J'ai senti un truc vraiment étrange l'autre jour dans le couloir alors que j'allais voir Georges...Il y a eu un craquement...Puis une sensation de froid et après le silence. Mais c'est comme si ce froid rentrait en moi pour me rendre mal à l’aise et...

- T’inquiètes pas, je te protégerais moi ! Coupa Kit avec courage et entrain. Hors de question qu'on rate une telle occasion de se faire des copains puissants !

- C’est peut-être ton imagination, Ajouta William, inquiet tout à coup.

Finalement, Kit trancha:

-En tout cas moi, bruits bizarres ou pas, j'y vais ! Il ne sera pas dis que je me suis préparé pour rien.

Anémone déposa deux yeux sceptiques et emplis de jugements sur la tenue de son ami. « Il appelait cela être préparé ? ». Finalement, elle soupira. Elle détestait braver les interdits, et n’avait pas envie de retourner à l'endroit où elle avait vu l'espèce de "chose" l'autre jour. Mais d'un autre coté une vraie soirée, une fois, une seule, avec "les grands" ça doit quand même être quelque chose.

- Bon, on y va, accepta la jeune fille. Mais si il y a le moindre truc bizarre je rentre à salle commune directement.

William acquiesça à son tour. Finalement, ce fut la Lady de Cumberland qui ouvrit la marche vers la sortie. Elle ne put cependant se contenir de dévoiler le fond de sa pensée à son ami à la chevelure rousse.

- Passe un veston au moins, Kit. On ne peut pas aller à une party sans veston !

❖

Une demi-heure plus tard, dans le couloir du quatrième, trois ombres courageuses se faufilaient dans le décor endormi.

Reiner, en compagnie d’Ainhoa et Alestra, s’était échappé de son dortoir. Seul Bertolt, malade, était resté se reposer dans l’antre des Serpents. Le trio continuait son ascension discrète en direction de la Tour d’Astronomie. Jusque ici, les trois petits garnements avaient réussis à échapper à Branson, progressant à pas silencieux dans le couloir sombre.

- Psst!

Tandis que le brun guidait ses amies vers les escaliers qu’il pouvait discerner dans la pénombre, un son résonna légèrement dans le corridor. Interpellé, le garçon se retourna, découvrant ses deux homologues Serpentard elles aussi tournées en direction d’une quatrième silhouette dissimulée derrière une statue.

C’est alors qu’il découvrit Emilien de Baudry, apparemment lui même décidé à jouer les mauvais élèves pour se rendre à la soirée. Il vit le blondinet adresser un signe de la main silencieux au groupe et s'approcher d'eux. Reiner discerna sur son visage juvénile et angélique une seconde d’étonnement lorsque leur regards se croisèrent, mais comme s’il privilégiait la discrétion, le jeune Gryffondor ne pipa mot et se contenta de les rejoindre sans bruit à la grande satisfaction du Sayre.

- Dépêche-toi on est suivis ! Chuchota t-il au nouvel arrivant, de l’agacement dans les accents de son murmure.

« Un seul étage à supporter ce lourdeau. » Pensa t-il très fort dans son esprit.

Tous avancèrent à pas de loup, groupés. Jetant un bref coup d’oeil à sa gauche afin de voir comment se débrouillait sa camarade aux cheveux blonds cendrés, les yeux vairons de l’hériter Serpentard captèrent le petit sourire espiègle qu’Alestra décocha à son ami de la maison rouge tandis qu’ils traversaient les lieux. Immédiatement, Reiner détourna ses prunelles vers le plafond de dégoût et d’incompréhension.

Alors que le petit groupe arrive au bout de ce long passage très silencieux, l’accalmie des lieux fut soudain brusquement renversée par un bruit sourd et l’apparition fugace d'une lumière.

Un peu plus loin devant eux, juste avant les escaliers du cinquième étage, une porte sur leur droite s’ouvrit à la volée et quelqu'un s’apprêtait manifestement à en sortir. Les jeunes gens devaient au plus vite se cacher.

Autour d'eux, peu de solutions. Prit au dépourvu, Reiner, instinctivement, attrapa Alestra, sa camarade la plus proche, l’entraînant avec lui pour se réfugier derrière de grandes statues de pierre, tandis qu’Emilien choisit de se placer derrière une armures de chevalier un peu plus loin, et Ainhoa trouva une petite place dans un placard à balais.

Mais alors qu'ils étaient tous dissimulés dans le paysage, les jeunes élèves entendirent un ensemble de bruits inattendus.

Quelques pas, suivit de ce qui semblait clairement être un battement d'ailes, qui s’interrompit subitement. Les pas progressaient à un rythme régulier dans le couloir.

Une chose cependant, les interpella : ils ne percevaient nettement que les pas d’un seul individu dans ce couloir. Une femme, qui s’exprimait à voix haute. Une voix les élèves eurent l'impression de connaître, incapables pourtant de l'identifier clairement.

Les pas allaient dans la direction du petit groupe tout comme cette voix, complètement ignorante de la présence des élèves, chuchotant si bien que le groupe n'arrivait toujours pas à identifier son propriétaire.

- Tu t'es mis dans de beaux draps mon ami... Même si je te trouve très beau ce n'est franchement pas ta meilleure apparence.

Puis quelques murmures inaudibles s’additionnèrent avant que de nouveau, une tonalité aux accents agacés résonne entre les murs de pierres.

- Il va falloir que tu la trouve plus vite que ça, les autres commencent à s'inquiéter. Cette entrée ne peut pas être si difficile à trouver enfin !

La voix passa à leur niveau, au moment où Reiner jeta un coup d'oeil, miraculeusement discret. Il n'eu pas le temps d'observer longtemps, ayant trop peur de se faire prendre... Il fut cependant très surpris de sa vision.

Déambulant dans le couloir, il reconnu Lucie Black, professeure de divination. Elle s’adressait à un magnifique oiseau rouge, perché sur son bras, dont quelques plumes se dressaient au dessus de la tête. Les pas lentement s'éloignèrent dans le couloir, jusqu’à disparaitre complètement, s’évanouissant au lointain.

Prisonnier entre le mur et la statue, le Sayre songeait à toute allure. L’oiseau rouge.. Il avait déjà entendu ça quelque part... Mais oui ! Cette nuit là dans les cachots...!

Son sang se glaça en se remémorant l’aspect du volatile. Mais que faisait Madame Black avec lui et que cherchait-il ? Reiner commença à paniquer légèrement. Non, ce n'était pas le moment, il fallait se ressaisir, il pourrait avoir de gros problèmes s'il était vu. S’ils étaient tous vus. Il s'adossa contre la statue et ferma les yeux pour maîtriser sa respiration, les rouvrants quelques secondes plus tard, affrontant un regard en coin mi-curieux, mi-obscur de sa camarade de cachette. Cette dernière, téméraire, lui fit signe afin qu’ils osent finalement quitter leur coin secret.

Les quatre compères se retrouvèrent au centre du couloir désormais vide. Les questions se bousculaient dans leurs têtes enfantines, néanmoins, il fallait faire vite. Le petit groupe, un peu choqué par l'évènement étrange, accéléra jusqu'à la tour d’Astronomie, allant aussi vite que possible jusqu’à la leur destination.

Et lorsqu’enfin ils distinguèrent cette salle pour laquelle ils avaient bravés tous les interdits, ils purent enfin s’engager à l’intérieur, victorieux.

Parvenus à la fête, les premières années s’émerveillèrent. Dans la foule, certains se reconnaissaient, d’autres faisaient connaissance.

Dans la masse qui entourait Reiner, ce dernier remarqua le visage du jeune Arcturus Graves, un ampoulé de Poufsouffle à l’attitude suffisante, perpétuellement distante. Non loin, il retrouva cette prétentieuse mademoiselle-je-sais-tout d’Anémone Mandrake toujours accompagné de ses insupportables copains Serdaigle. Eux aussi avaient réussi à se frayer un chemin jusqu’à la plus haute tour de Poudlard. En même temps, leur salle commune était proche. C’était à se demander si, en ayant un objectif aussi proche, ils brisaient vraiment les règles du couvre-feu.

Parcourant les lieux de son regard bicolore, il découvrit au milieu d'une petite foule d'admirateur, une grande et belle fille, dont les yeux noirs profonds dénotaient avec sa chevelure blonde, créant un contraste étrange et envoutant.

- Regardez c’est Erin Williams, elle est super réputée au Quidditch ! C’est la capitaine des Serdaigle ! Lança alors la voix de William mêlée au brouhaha.

Reiner acquiesça intérieurement. En effet. Puis Il tourna son oeil saphir en direction de celle qui se prenait pour la première de sa classe, cependant, il sembla au Sayre que Miss Intelligence préférait rester dans son coin à dévorer des yeux la sportive. Elle était peut-être brillante, mais elle était clairement socialement inadaptée, cette fille. Non loin d’elle, son acolyte rouquin, paraissait être venu uniquement pour profiter du buffet à volonté et ses boissons raffinées.

C’est alors que l’accent français d’Emilien coupa nette la contemplation du Sayre.

- Attendez, est-ce qu'on peut parler un instant de ce qu'il vient de se passer, quelqu'un à vu qui c'était ?

- Oui, c'était Lucie Black si tu veux tout savoir. Répondit Reiner d'un air un peu blasé de parler à un Gryffondor, et particulièrement celui-ci.

Alestra l’observa d’un regard en coin, apparemment intéressée à son tour.

- Elle te fais un sale effet en tout cas. Si jamais t’as besoin de parler tu peux venir me voir.

Le concerné fût touché par la remarque de sa camarade, pourtant ne laissa rien paraître, gardant un visage de marbre devant son homologue Serpentard.

- Merci mais ça ira, t'inquiètes ! Je n'ai pas vu à qui elle parlait. Evidement, il avait menti.
Finalement, le groupe se dissipa.

Alestra entraina Emilien vers Théodore Beauregard, un jeune homme au visage fin et à la chevelure argenté, arborant les couleurs de Gryffondor, réputé dans toute l'école pour être double vainqueur du tournoi annuel de duel.

Pendant ce temps, Reiner et Ainhoa tentèrent leur chance auprès de Seamus Bullstrod, capitaine de l’équipe de Quidditch de Serpentard, qui avait eu l’honneur de remporter plusieurs fois la coupe.

Soudain, au bout de quelques temps, des pas rapides et énergiques se firent entendre dans l'escalier de la tour. Un élève, essoufflé, déboula en trombe dans le lieu de la fête.

- BRANSON ARRIVE.

Instantanément, la foule s'agita. Un élève haussa sa baguette, et à l'aide d’un Failamalle, empacta le contenu du buffet dans une immense valise qu'il fit disparaitre dans un sac minuscule.

Des étudiants disparurent instantanément, comme rendu invisibles, l'un d'eux emportant la radio, tandis que deux autres empruntèrent l'escalier en courant, portant à bout de bras les fûts de bière.

Seamus sauta sur son balais, s'envolant vers le parc, suivit de quelques autres élèves, tandis que Théodore s'éclipsa d'un bond.

Certains élèves se transformèrent en petites souris galopantes, et d'autres se mirent à dévaler les escaliers en trombe. C’était la panique.

Dans un mouvement vif et rapide, les élèves coururent afin de sauver leur peau du grand colosse, chacun traçant sa route, seul ou en groupe, afin de rejoindre le plus vite possible son dortoir.