Les meilleurs souvenirs de mon enfance sont associés à l'immense jardin que l'on partageait avec mes voisins et à la forêt qui était à deux pas de là où nous vivions. Je me rappelle l'odeur de l'herbe grasse, gorgée de rosée, et des innombrables animaux avec lesquels nous vivions.

Je me rappelle le jour où ma mère a décidé d'adopter un bouc nain d'une gentillesse absolue et d'un caractère en or (très comparable à celui d'un chien sur bien des aspects). Je me rappelle tous ces chats qui parcouraient la maison et les espaces autour... Du jour où, en tant que cadeau de Noël, ma soeur et moi avions eu un poney qui, après une petite phase d'appréhension, s'était avéré très sympathique (même si j'ai toujours eu ma préférence pour le bouc et le colley que nous avions).

Je me rappelle ces promenades dans la forêt où, accompagnés du bouc, du poney, de plusieurs chiens et, parfois, de certains chats, nous arrivions dans une clairière digne d'un roman arthurien. Aucun animal n'avait besoin d'être attaché.

Un peu plus loin dans la forêt, il y avait une maison abandonnée depuis au moins vingt ou trente ans. Je me rappelle parfaitement le jour où nous l'avions explorée avec mon oncle et où j'étais persuadé de tomber sur un fantôme à tout moment.

Je me souviens du cochon de mes voisins qui me terrorisait alors que dans le fond, il n'avait pas une once d'agressivité en lui. Un jour, il s'était même introduit dans notre salon et nous avions eu bien du mal à l'en déloger. Je me souviens aussi du jour où j'ai compris l'absence soudaine de ce cochon et j'ai pris connaissance de l'origine du pâté que ces mêmes voisins nous avaient offert. J'imagine que ce genre d'événements ont contribué à mon refus de consommer de la viande.

Je me souviens de ces après-midi où ma mère préférait que j'aille jouer à l'extérieur plutôt que de rester sur ma GameBoy à capturer tous les Pokémons possibles (à ce jour, je ne comprends toujours pas cette obsession que certains adultes ont à vouloir que les enfants soient en permanence à l'extérieur). J'avais donc embarqué la console dans le jardin mais, faute d'éclairage suffisant, j'avais passé la majeure partie du temps à chercher un coin assez ombragé et caché pour continuer à jouer.

Je me souviens de cette époque où j'avais un groupe d'amis, fait relativement rare au cours de ma vie pour être noté (étant très exclusif par nature, j'ai toujours eu l'habitude de n'en avoir qu'un seul à la fois; nature qui, aujourd'hui, s'est assouplie même si elle reste une composante importante de ma personnalité).

Je ne peux m'empêcher de souvent rêver de retourner dans ce paradis perdu. Tous mes efforts s'orientent d'ailleurs dans ce sens; je souhaite travailler à distance pour pouvoir rester dans un univers campagnard sans être au chômage, je souhaite mettre de l'argent de côté pour acquérir un terrain semblable à celui qui a bercé mes jeunes années, je recherche toujours la présence des animaux et, même si ce n'est pas tout à fait raisonnable, j'ai décidé d'en adopter dans mon appartement actuel. Par moments, on y est un peu à l'étroit, bien sûr, mais leur présence m'apporte un vrai bien-être au quotidien.