Le Jardin Secret de Nathaniel
Ce samedi soir, Nathaniel est de très mauvaise humeur. Il fait tourner la clé dans la serrure de la porte de son appartement, tourne la poignée d'un coup sec, entre, referme derrière lui et jette la clé sur la table basse du salon. Il y pose négligemment son portable.
Lorsqu'il retire ses chaussures, Blanche, comme chaque jour, vient l'accueillir en ronronnant contre ses jambes. Nathaniel grimace.
- Pas maintenant, Blanche...
Mais celle-ci insiste et frotte sa tête contre ses mollets. Il sourit, vaincu par cette petite boule de poils couleur neige.
- Ça va, tu as gagné, ma belle !
Il passe deux doigts sous son museau qu'il caresse doucement.
En réponse, la chatte lève la tête, les yeux fermés, savourant l'attention de son maître. Il prend sa gamelle, la remplit de croquettes et verse un peu d'eau dans la deuxième. A peine les a-t-il déposées au sol que Blanche se précipite goulument sur le repas. Nathaniel se dirige alors comme un automate vers le salon, et jette un coup d'œil sur l'heure affichée à la pendule : 21h45. Il ouvre un livre rangé dans son meuble bibliothèque, s'installe sur le canapé pour le lire mais ne parvient pas à se concentrer sur sa lecture. Il ne peut s'empêcher de ressasser sa journée et passe de temps à autre ses doigts contre son front en repensant à tous ces détails qui l'irritent.
Malgré sa visite chez ses parents, invitation lancée par sa mère, celle-ci semble toujours dans le déni de la violence abusive de son père envers lui et ce dernier ne parait pas plus chamboulé que ça par l'émancipation de son fils d'après ce que lui a dit Ambre. Est-ce par fierté, par reniement ou bien les deux ? Irrité, il tourne machinalement la page suivante, faisant défiler les lignes du livre devant ses yeux sans vraiment parvenir à se concentrer sur leur sens. Il pose nonchalamment le livre à côté de lui, s'enfonce négligemment dans le canapé et fait basculer sa tête en arrière, le bas du crâne reposant sur le haut du dossier. Il fixe le plafond.
Alors que la solitude commence à s'emparer de lui, Blanche bondit sur les genoux de son maitre comme une petite furie et vient se lover contre lui. Nathaniel sourit doucement et vient caresser la tête et le dessous de l'oreille de sa petite terreur.
- Heureusement que t'es là, toi.
Blanche ronronne en réponse des caresses de son maître.
Soudain, le portable vibre sur la table basse faisant réagir la petite boule de poils, les oreilles aux aguets et le regard fixé sur le mobile. Nathaniel s'en saisit amusé par sa réaction, toujours assis avec Blanche sur les genoux. Un message de Su s'affiche sur l'écran.
"Tu me manques aussi."
Son message est bref mais il suffit à lui faire étirer un sourire du bout des lèvres.
Depuis qu'elle est arrivée au lycée Sweet Amoris, elle a chamboulé sa vie jusqu'à prendre une importance considérable. Il lui en a voulu énormément au début, lorsqu'elle a interféré dans sa vie de famille mais au fond, il savait déjà qu'elle serait celle qui le sauverait de cette existence d'oppression et de frustration. Il en voulait surtout à lui-même de ne pas avoir été capable de se sortir seul de cette situation et d'être resté dans le déni pour maintenir l'illusion que tout était normal. Mais elle l'a forcé à en sortir et à affronter la réalité en face.
A présent, c'en est fini de ce rôle de fils parfait et de garçon moralisateur envers ses camarades de classe. Il peut être celui qu'il a toujours été au fond de lui et celui qu'il souhaite devenir. Pourtant, même aujourd'hui, alors qu'il est émancipé, il doit entretenir des responsabilités et ça le pèse encore un peu. Quand son père a commencé à avoir des exigences élevées pour lui, une légère pointe de jalousie s'est emparée de lui envers Castiel et son comportement "je m'en foutisme". A partir de ce moment-là, il a toujours envié sa liberté alors que lui vivait l'esprit en cage. Ses meilleurs souvenirs sont ceux de son enfance. C'était amusant de taquiner Ambre à l'époque. Il se surprend alors à regretter le petit garçon effronté qu'il était, tirant les cheveux de sa petite sœur et maltraitant ses poupées. Après ces pensées nostalgiques, il se sent d'humeur entreprenante et répond au message de sa dulcinée.
"Pas autant que moi. J'aimerai te prendre dans mes bras."
Il pose son portable sur la table et au bout de quelques minutes d'attente sans réponse, il se dit qu'elle doit sûrement s'être déjà endormie. Il décide alors de prendre une douche.
Lorsque l'eau s'écoule sur sa peau à température ambiante, ses pensées sont focalisées sur Su. Il a conscience qu'il tient déjà énormément à elle et qu'il ne supporterait pas qu'un autre la touche. Elle est tellement... elle ! Et n'a rien à voir avec toutes celles avec lesquelles il est sorti autrefois. Il reconnait avoir eu beaucoup de chance qu'elle ait jeté son dévolu sur lui et pas un autre. L'avoir pour lui tout seul est un sentiment grisant et il n'est pas prêt de la laisser s'échapper. Lorsqu'il repense au baiser audacieux qu'elle lui a donné dans le couloir du lycée, son sexe se met à gonfler et à durcir malgré lui. La tentation est trop forte... Trop faible pour résister, il saisit alors son membre et le caresse lentement de mouvements amples et extatiques. La poigne est agréable et douce. Ses yeux se ferment pour se concentrer plus encore sur les sensations qu'il se prodigue. Il se remémore le contact de la bouche de Su plaquée sur la sienne, de ses douces mains qui étreignaient sa nuque pour l'attirer contre elle et le pousser à l'embrasser. Ses pensées dérivent tout à coup un peu plus loin. Il l'imagine avec lui, un soir en semaine, dans la salle des délégués, la pièce fermée à clé. Il la ferait s'assoir sur la table et elle enroulerait ses jambes autour de sa taille. Il écarterait sa culotte et la ferait glisser sur le coté pour se frayer un passage entre ses cuisses sans même prendre la peine de défaire entièrement son pantalon. Trop impatient de la prendre et de la sentir contre lui, il la ferait gémir de surprise en s'emparant d'elle d'un coup sec pour qu'elle ressente à quel point il la désire et veut la posséder. Il la ferait ensuite soupirer par des à-coups lents mais amples dessinant et caressant toute la paroi de son intimité. Elle lui demanderait d'aller plus vite et plus fort mais, amusé, il la ferait alors languir un peu plus avant d'exaucer son souhait. Lorsqu'il lirait suffisamment de désir dans ses yeux alors il lui donnerait ce qu'elle réclame, il lui donnerait des coups de hanches forts et brusques pour qu'elle sente à quel point il la désire. Alors que ces pensées sont centrées sur son envie irrépressible de la prendre, ses mouvements deviennent plus rapides sur son sexe. Il entrouvre la bouche et se mord la lèvre inférieure. C'est si bon pour lui de décompresser et d'évacuer cette solitude oppressante pour se concentrer sur ce qui le rend heureux et passionné.
Depuis combien de temps ne s'est-il plus laissé aller au désir et au plaisir ? Depuis combien de temps ignore-t-il ses pulsions ? Il ralentit alors les mouvements, savourant un peu plus les sensations qu'il se donne et dérive cette fois ses pensées sur l'inexpérience évidente de Su... Le jour où elle se donnerait à lui, il y a très peu de chance qu'il parvienne à se contenir. Lorsqu'il est avec elle ou qu'il pense à elle, ses instincts primaires ressurgissent où seule compte, la liberté d'être lui-même. Il veut la voir, l'enlacer, la toucher, la posséder... Il pousse de bas soupirs rauques lorsqu'il l'imagine ouvrir ses cuisses pour la première fois sous lui, le regard apeuré mais empli de désir pour lui. Il appuie sa deuxième main sur le carrelage froid du mur, les yeux clos, l'eau coulant toujours le long de ses cils. Alors qu'il l'imagine s'accoutumer à son sexe dans son intimité et perdre pieds, il accélère un peu plus ses mouvements et augmente la pression de ses doigts autour de son membre dur et imposant... Ne pouvant plus tenir à l'appel du plaisir, il frôle doucement son pouce sur le gland, le titillant délicatement pendant que sa main enserre sa longueur avec déchaînement. Désirant mettre fin à ce calvaire tendu à l'extrême, il se laisse un peu plus aller aux sensations qu'il se procure, concentré pour une envolée vers la jouissance. Sa bouche s'ouvre légèrement et ses joues rosissent peu à peu. Sa respiration devient un peu plus haletante et saccadée. De bas gémissements sexys s'échappent de ses lèvres humides lorsque le point culminant arrive. Tous ses muscles se contractent. Il jouit enfin, le sexe frétillant et tremblant. Son orgasme se mêle à l'eau qui coule le long de sa peau pour se fondre peu à peu et disparaitre. Nathaniel savoure encore ces quelques secondes de plénitude puis relâche progressivement toutes les tensions de son corps. Il est enfin détendu, calme et serein.
Lorsqu'il sort de la douche pour retourner dans le salon, seul son boxer le couvre. Il frotte une serviette contre ses cheveux dorés encore mouillés. Il aperçoit alors un voyant sur son portable signalant qu'il a reçu deux messages. Il prend son téléphone d'une main tandis que l'autre frotte encore sur la serviette pour se sécher. Ça vient de Su. Il ouvre le premier message et lit.
"Moi aussi, je voudrais que tu me prennes".
A la vue de ce message, Nathaniel écarquille les yeux et sent la température de son corps augmenter instantanément. Si elle savait dans quel état elle le met...
Il ouvre le deuxième message.
"Excuse-moi, ça a cliqué sur envoi par mégarde. Ce n'est pas ce que voulais dire. Je voulais t'écrire que je voulais aussi que tu me prennes dans tes bras... Enfin ! Peut être que tu avais déjà compris ! Pardon. Bonne nuit !"
Nathaniel se met à rire. Il l'imagine totalement paniquée en envoyant le message maladroitement et affolée de réfléchir à comment s'expliquer dans son second message. Il a très envie de la taquiner pour l'embêter mais il songe qu'il a encore plus envie de prendre soin d'elle et de la chérir.
Pour ce soir, il a juste envie de la chagriner légèrement et décide de ne pas lui répondre dans l'immédiat, l'imaginant en train de se demander s'il a bien reçu ses deux messages et comment il serait susceptible de réagir. En attendant, le voilà de meilleure humeur et amusé, il ne lui répondra que le lendemain, éprouvant le besoin de la malmener un peu, son effronterie reprenant le dessus.
Ce samedi soir, Nathaniel s'endort de très bonne humeur avec Blanche, recroquevillée tout contre lui.
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