Chapitre 6

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Jacinthe

            J’ouvre les yeux et vois que le soleil inonde la chambre de l’éclat de ses rayons. C’est une belle journée et c’est  la première que je vais entièrement passer à la maison depuis mon retour. J’essaie de croire que ce beau temps est annonciateur de bonnes choses, du moins qu’aucune catastrophe ne s’abattra sur moi aujourd’hui. Ou devrais-je dire sur nous. J’ai décidé d’aller au magasin de décoration avec toi, on achètera de jolis objets colorés. Avant, c’était un de mes petits bonheurs de m’imaginer chaque pièce, détail par détail. Je ferai en sorte que l’on passe un bon moment ensemble; j’ai tellement peur que notre complicité s’étiole. Je n’ai pas très envie de sortir, j’ai même plutôt envie de m’isoler, mais je repense au conseil de maman et je me convaincs de sortir avec toi. Je ne serai pas seule, je n’ai aucune crainte à avoir. Enfin, je l’espère.

            Je prends une longue douche, décide de porter ma robe bleue que tu aimes tant, ainsi que le pendentif doré que tu m’as offert à Noël, celui avec une enveloppe ; le cadeau le plus personnel et touchant que j’aie reçu de toute ma vie. Il représente tous les À Toi que l’on s’est échangés depuis le début de notre relation.

            Je dépose quelques gouttes de Modern Princess de Lanvin derrière mes oreilles et sur mes poignets. J’avais presque oublié ce parfum. À l’hôpital, je ne me préoccupais pas du tout de mon apparence. Ma coquetterie est restée à la maison, enfouie au fond d’un placard. Elle semble vouloir pointer le bout de son nez en ce matin de juillet. Autant en profiter, non ?

 

Anton

            J’appréhende un peu cette journée. Je me suis levé très tôt, sans doute à cause du stress. Comment vas-tu te sentir aujourd’hui ? Je suppose que tu auras envie de rester à la maison pour te reposer, ce que je comprendrais tout à fait. Après réflexion, je me dis que ce ne serait pas si mal de passer la journée ensemble à regarder des films, à faire des jeux de société ou à cuisiner un peu. Je sais que tu peux être heureuse. Que tu seras heureuse. On prendra le temps qu’il faut, c’est tout. Rien ne sert de brusquer les choses. Il faut prendre les petits bonheurs comme ils viennent et les additionner pour en créer un plus grand et plus fort que tout.

            Pour joindre le geste à la parole, je décide de préparer un petit déjeuner pour nous deux. Un bol de céréales au chocolat pour toi, deux tartines à la confiture de myrtilles pour moi, ainsi que quelques quartiers de pommes et d’oranges. Je dépose le tout sur un plateau et ajoute deux grands verres de jus de fruits. Tout ça devrait nous donner un peu d’énergie et de fraîcheur.

            Un petit déjeuner au lit… ça fait si longtemps ! J’ouvre la porte de la chambre en souriant et remarque immédiatement que tu es debout devant le miroir à t’observer. Tu as revêtu ta si jolie robe, je hume l’odeur de ton parfum favori et lorsque tu te retournes, me gratifiant d’un sourire resplendissant, je constate que tu portes également ton pendentif en forme d’enveloppe. Je ne m'attendais pas du tout à cela ! Je croyais dur comme fer que tu serais couchée, emmitouflée dans la couette et que tu refuserais de manger ou de boire quoi que ce soit. La surprise est de taille, et elle est belle !

            - Tu es magnifique, Jacinthe, je souffle en te rendant ton sourire.

            - J’ai pensé que tu serais content que je fasse des efforts.

            - Bien sûr que je le suis. Mais tu dois les faire pour toi, pas uniquement pour moi.

            - Je n’en suis pas encore là, Anton.

            Je hoche la tête en signe de compréhension, puis dépose le plateau sur le bureau avant de venir t’embrasser. Tes lèvres sont douces, je sens tes bras enserrer mon cou et j’ai encore plus envie de croire au bonheur. Il ne peut en être autrement.

            En desserrant ton étreinte, tu m’annonces :

            - Je veux bien aller au magasin aujourd’hui.

            - Tu as changé d’avis ?

            - Il faut bien que je fasse quelque chose, tu ne crois pas ?

            - Je ne demande pas mieux. Tout ce qui m’importe, c’est que tu te sentes réellement prête.

            - Je le suis. Mais d’abord, je vais déguster ce fabuleux petit déjeuner.

            Tu t’empares du plateau et tandis que tu te diriges vers le lit, je ne peux m’empêcher de penser à ce que le psychiatre m’a dit avant ta sortie de l’hôpital. Ses paroles me reviennent à l’esprit :

            - Anton, il faudra faire très attention à Jacinthe. La convalescence, si je puis dire, est rarement facile. Il arrive que les patients fassent d’autres tentatives de suicide. Dans certains cas, ils ont l’air presque heureux quelque temps avant de passer à l’acte, que ce soit leur première tentative ou pas. L’entourage trouve cela bizarre, car c’est assez soudain, mais croit que la personne se sent vraiment mieux. N’hésitez pas à m’appeler si vous avez le moindre doute.  

            Je suppose qu’il avait de bonnes raisons de me dire ça. Était-ce simplement par prévention ou était-ce parce qu’il avait des doutes te concernant ? Il tenait à ce que tu rentres à la maison, j’imagine donc qu’il n’était pas si inquiet que ça. Je ne sais pas quoi faire. Hier, tu t’effondrais au moindre souvenir douloureux et aujourd’hui, tu deviens subitement joyeuse. Je me sens perdu, mais décide de te faire confiance. Je resterai près de toi toute la journée, toute la nuit et ce, plusieurs jours d’affilée s’il le faut. Je ferai tout ce qu’il faut pour te rendre heureuse.  

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