Chapitre 8 - Délivrance - partie 1

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- VIII -

Délivrance

(partie 1)

Le jour de mes 19 ans, Catalina m’a offert un étrange cadeau d’anniversaire, acquis au prix de moult cachotteries et heures de travail. C’était une enveloppe rouge avec deux terrifiants billets d’avion pour la Rue des Archives de Vancouver. Je suis resté muet quelques secondes, si seul face à la triple perspective des Limbes du Pacifique, de La Gloire de mon Père et du Pays des Merveilles où ma mémoire s’était liquéfiée. J’avais peur que le Canada ne soit pas à la hauteur de mes fabuleux souvenirs russophones.

Quand je suis descendu de l’avion, la passerelle était branlante mais elle n’était pas la seule. Catalina a dû me pousser doucement pour que j’ose poser un pied timide sur le macadam brûlant de ma terre natale. J’ai tendu un passeport ému et canadien au douanier qui ne l’a même pas regardé ; puis j’ai attendu Catalina qui stagnait dans la file des ressortissants étrangers.

Nous sommes passés rapidement poser nos affaires dans un petit hôtel en ville, avant d’aller voir l’océan de mon Enfance. Le regard que j’ai posé sur lui avait vieilli mais le Pacifique n’avait pas changé, il arborait toujours la même immensité inépuisable.

J’ai longuement pensé à ma délicieuse belle-mère montréalaise. Elle était comme moi tissée de vagues et de vent, alors que mon papa venait de l’Est et de la terre. J’avais passé des jours heureux avec Marie à scruter l’océan, à guetter les baleines, mais surtout, à visiter les mille et une merveilles de l’aquarium où elle travaillait.

J’aurais tellement aimé savoir ce qu’elle était devenue, savoir si mon prénom résonnait encore dans ses veines. Mais comme d’habitude, j’ai été incapable de dire tout haut ce que je ressentais tout bas. Et comme d’habitude, l’éternelle intuition de Catalina a lu en moi comme dans un livre entrouvert. Elle a donc fait semblant de se découvrir une insatiable passion pour les poissons ; et elle a insisté jusqu’à ce que je trouve la force de donner au taxi le nom du Vancouver Aquarium Marine Science Centre.

Je n’ai absolument pas reconnu le bâtiment, mais l’intérieur m’était étrangement familier. Catalina est allée faire un tour dans le parc Stanley et je suis entré seul, comme un fantôme dans Le Monde du Silence. J’ai longtemps tourné autour du pot et du comptoir, et il m’a fallu plus d’une heure pour aller demander à la réceptionniste si elle connaissait une certaine Marie Karenine. Elle m’a dit oui avec un sourire entendu et une œillade admirative auxquels je n’ai pas prêté attention ; puis elle a passé un coup de fil et m’a demandé d’attendre dans le hall.

J'ai attendu...

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