En route vers le conseil de l'Union des Nations Féériques : Rivkaé et Valctium

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[Trois semaines après le départ du Héros]

Tout habitant de Sylvania sait qu'il existe plusieurs royaumes de fées, dont la majorité se trouvent au-delà de l'ancien territoire des Hommes, que leurs cultures, croyances et dogmes avaient pour racine le lieu originel de toutes les fées, là où se trouve leur véritable souverain depuis des millénaires.

Et c'est à lui, qu'en ce jour du 18 Lusiair, la reine Audisélia II Vanguard allait devoir rendre des comptes lors de la réunion annuelle des dirigeants des différentes races Féériques du monde entier.

- Rendre des comptes... rendre des comptes... c'est vite dit, ronchonna Audisélia.

- C'est comme ça chaque année, soupira Morvian se plaignant auprès de la dernière recrue Is'telli, et sinon, ma jolie, t'es libre après pour visiter cette ville immergée ?

- Tu crois vraiment c'est le moment d'être aussi sérieux ? déclara Jérazem en se tripotant la trompe d'anxiété.

- Depuis quand tu deviens consciencieux ? lui rétorqua Morvian, et depuis quand tu t'octroies le droit de me corriger quelque chose ? rajouta le dragonoïde.

- Depuis que la reine m'a humilié au Protectorat Sombre ! se souleva Jérazem, mais surtout, comment tu peux être autant détendu à courtiser la nouvelle ALORS QU'ON SE TROUVE AU FOND DE L'OCEAN ?

Chaque année, la réunion entre les dirigeants Féériques changent de place et le lieu était connu peu de temps à l'avance pour qu'aucune trahison ne puisse se produire. Cette année, la réunion aurait lieu au milieu des fonds marins pour rejoindre l'une des anciennes cités d'Atlantis : Oliamor.

Contrairement à ce qu'il est coutume de faire, Audisélia était partie seulement avec une partie de ses généraux, quelques espions – dont Helmir et Lelelitio – et sa garde rapprochée. Il était plutôt d'habitude pour le royaume de Sylvania de partir avec Lily pour se rendre au lieu du rendez-vous pour les régents Féériques, pour qu'ils puissent se réapprovisionner en nourriture et autres, que les habitants et les jeunes nobles puissent découvrir de nouvelles cultures et apprendre d'elles. Malheureusement, cette année, à cause de la poursuite du tournoi pour le trône de Sylvania et de l'armée qui lorgne dans leur direction, Audisélia ne pouvait pas se permettre de déranger le pérennité du tournoi pour sa succession.

Du moins, elle n'arrivait pas à se dire que c'était une bonne solution d'emmener le royaume avec eux.

Heureusement pour elle, Se'bis s'était déjà rendu dans des lieux proches d'Oliamor, à une ville nommée La Havane, il put emprunter à son port un poulpembarcation – la fusion d'un poulpe géant qui a assimilé des tonnes et des tonnes d'épaves de navire et, à l'instar des Scorpion Riders qu'on retrouve dans la dimension ténébreuse où se trouve le Protectorat Sombre, il devint un être mi-animal mi-machine, dressé pour accueillir des passagers. D'ailleurs, c'était la première fois pour Audisélia et sa délégation royale de se rendre dans une ville humaine comme La Havane, mais le plus surprenant fut de voir la cohabitation entre les humains et les Féériques, il y avait bien quelques querelles entre certains, toutefois cela ne relevait pas du racisme. La reine aurait bien voulu s'attarder sur cette ville et la visiter, cependant le temps n'était pas au visite touristique. Sa délégation et elle embarquèrent à l'intérieur du poulpembarcation et tous se rendirent à Oliamor.

Assise, le regard dans le vague face aux vagues, elle contemplait l'immensité des profondeurs de l'océan derrière cette membrane protectrice qui leur permettait de respirer, elle lui paraissait si fragile qu'elle se demandait si elle la plantait avec son doigt, est-ce qu'elle mourrait noyée et le corps broyé par la pression océanique. Ses évasions spirituelles lui firent perdre le fil de la conversation qui se déroulait derrière elle.

- D'habitude s'ti le chef qui r'conforte not' reine, dit Is'telli sous le bras charmeur de Morvian, où ce qu'il est ?

- Oh ça..., déclara la fée-dragonoïde en pouffant de rire, c'est une bonne question.

- J'imagine qu'il a encore le mal de mer..., supputa Jérazem, c'est bien normal vu on se trouve. Moi je vous le dis que c'est une mauvaise idée qu'on soit allé là-bas. On aurait dû faire comme les humains. Une holo-conférence à distance et puis basta.

Un golem naturel à lunettes vint s'asseoir à côté de Jérazem avec un assez gros livre dont la lecture ne semblait pas lui déplaire. Il se présenta avec une tête ronde rocheuse, de gros bras rocailleux qui faisait la taille de deux tiers de ses doigts puis un gros ventre remplis de roches et le signe de la royauté de Java-Aleim. La seule chose qui le démarquait d'un gros bloc de pierres, c'étaient ses lunettes grosses en fer trempé d'où on pouvait distinguer ses yeux jaune pâle.

Jérazem pencha la tête en direction du livre et découvrit qu'il s'agissait encore une fois d'un livre de romance sur fond de thriller psychologique.

- Tu ne veux vraiment pas lâcher « les Aventures de Colba », Valctium ? commenta Jérazem.

- Bien sûr que non, rouspéta le golem, il n'y a pas plus grande lecture que celle-ci ! Surtout que je suis arrivé au moment où Colba va surprendre le mari de Fastios avec Dremine, le garçon d'honneur. Comment te dire que je suis pendu aux lèvres de l'auteure.

Malgré son air bourru, son corps qui ne provoquait aucune empathie et n'amenait aucune douceur ou sens de la beauté, Valctium était, parmi les Saints, le plus distingué des êtres qui était donné de voir à la reine Audisélia. Nul autre ne pouvait prétendre avoir le verbe et la culture de cet être de pierres rondouillard.

- Si tu voulais bien lire avec moi, nous aurions des discussions passionnés sur le développement de la relation entre Colba et le roi Winsaz.

- Désolé, mais... comment te dire avec des mots gentils ?

- Il en a tout simplement rien à foutre !

Une furie débarqua au milieu des membres des Saints déjà présents, armé de son sac de chips aux patates douces et d'un jus de pamplemousse, elle s'installa entre Is'telli et Morvian, ce qui fit frissonner Morvian de colère, mais elle semblait n'en avoir cure.

- Moi je t'ai déjà proposé de lire, mais tu m'as dit qu'il y avait aucune baston en cinq cent quatre-vingts chapitres, dit la furie la bouche pleine.

- Je t'ai surtout dit qu'il n'y avait pas d'images dans mon roman, Rivkaé ! s'énerva Valctium, et cesse immédiatement de m'asticoter la bouche pleine.

- Et tu vas faire quoi si je le fais pas ? Te lancer dans une diatribe ?

Valctium déposa délicatement son bouquin, retira ses lourdes lunettes de son nez et les mit au-dessus de son livre, se leva en dégrafant sa cape et se dirigea en direction de celle qui n'avait eu de cesse de l'asticoter.

- Je pense qu'il est temps que je mette un terme à ton manque de respect et ton inculture, naine.

Rivkaé léchant les miettes qui lui restait sur les doigts, se délecta avec rapacité de la colère de son homologue golem naturel. Elle se leva et se dirigea contre son nouveau repas.

- Tu penses vraiment pouvoir me vaincre alors que j'ai ses deux magnifiques bras ? dit Rivkaé en embrassant ces deux bras métalliques.

Rivkaé était une naine provenant d'une cité au-delà de l'ancien monde humain dénommé Dragedge-Kenningfort, une ville dont la principale source d'énergie était le charbon et le système de fonctionnement était la vapeur, que cela soit les tramways, les ballons, les dirigeables, les automates... Elle était une orpheline qui a été abandonné lors d'un conflit entre cette cité mouvante et une autre cité quadripède, et un autre conflit détruisit son orphelinat. Elle se retrouva vagabonde à l'âge de seize ans. Elle passa par le vol, le meurtre et la prostitution pour pouvoir subvenir à ses besoins, malheureusement une attaque terroriste provoqua la propagation d'une peste verte envahit la ville de Dragedge-Kenningfort, les symptômes de cette dite-attaque chimique fut la lèpre qui provoquer le pourrissement des membres et un teint verdâtre. Et comme tous les autres habitants, Rivkaé fut contaminée et perdit ses deux bras, et sa carnation qui était brune finit par prendre la couleur olivâtre de la peste verte. Par miracle, pour une raison obscure, équipée d'un masque, Audisélia vint la sauver in-extremis de la suffocation. Elle fut amenée à l'hôpital de Sylvania pour que les médecins puissent trouver un remède à cette peste verte.

Cela s'ensuivit d'une enquête de la police militaire de Sylvania dirigée par le meilleur enquêteur de ce royaume : Alvela Lothgen Saltoni Delius, cousin de Mathgen, le Suprême Commandant des Forces Féériques. De cette enquête, aidés par bon nombre de mages-médecins et de mages, en résultat que cette peste verte n'était autre que la « Peste Valsim », la variante d'une ancienne arme chimique créée pour une guerre datant de plus de mille ans, et que ça serait des mercenaires d'un groupe dénommé Olgame qui se serait procuré cette variante en l'achetant à des chasseurs de trésors experts en fouilles d'épaves et de villes mobiles fantômes. Malheureusement, ce jour-là, ni Alvera Mathgen, ni la reine, ni personne d'autre n'avait les moyens de retrouver les bandits qui avaient détruit Dragedge-Kenningfort. Concernant Rivkaé, comme beaucoup des victimes de la variante de la Peste Valsim, qu'on renomma « Peste Valsim-G » – « G » pour gangrène au vu des similarités avec cette infection – ne put récupérer ses membres et sa couleur de peau, néanmoins, l'infection put être soignée assez rapidement. Elle reçut des prothèses fabriqués sur les modèles se trouvant à Dragedge-Kenningfort, malheureusement, à cause d'un conflit sur lequel était occupée la majorité des Sylvains, les forgerons et autres professionnels de la mécaniques vivantes étaient réquisitionnés pour se préparer à une nouvelle guerre d'ampleur, et puisqu'étant une naine elle en reçut des bien trop grandes pour sa taille, faisant que ses mains touchent le sol dès qu'elle sortait de son lit ou mettait un pied à terre, ce qui ne facilita bien vraiment sa rééducation. Mais contre toute attente, elle trouva un moyen d'utiliser cette nouvelle « difformité » à son avantage : elle se mit à copier le déplacement des gorilles pour pouvoir se mouvoir plus rapidement, ce qui la rendait un peu ridicule mais elle se fichait de l'avis des autres dans la mesure où cela l'amusait grandement. Toutefois, elle devait faire très attention car ces prothèses n'avaient pas été conçus pour être utilisés ainsi était donc assez fragiles.

Une année s'écoula, Rivkaé avait fini par s'habituer à cette couleur verdâtre qui lui donnait auparavant envie de vomir à chaque fois qu'elle se regardait dans la glace – au moins, à la différence de Nalo, elle avait au moins, elle, l'audace de se regarder dans le miroir. Grâce à ses bras, elle était devenue une véritable petite attraction dans Sylvania, ce qui lui valut le privilège de pouvoir circuler entre les Basfonds, là où elle résidait et Haute-Ville, parfois, elle était même invitée à se produire au Sanctuaire devant la Sainte Noblesse et la royauté, recevant piécettes et autres joyeusetés qui lui permettraient de s'installer à Haute-Ville, mais elle n'y tenait pas tellement. Bien qu'on la voie toujours hilare, faisant la fête là où elle allait, elle était le genre de personnes à cacher tout ce qui la contrariait en elle, que ça soit ses mauvaises pensées, ses traumatismes, ses cauchemars ou son obsession maladive pour les hommes qui avaient détruit son foyer. Mais que pouvait-elle faire ? Elle qui n'avait jamais combattu, elle qui avait toujours été un marchepied pour les hommes d'assouvir leurs besoins en elle, elle qui était trop lâche pour se défendre, qui était une voleuse, une moins-que-rien...

C'est en pensant ces mots qu'une ombre électrique apparut dans sa chambre, les yeux lumineux, les ailes brillantes comme mille ovnis, vêtue d'une robe qui était composée de rivières ondulées de saphir et saupoudrée de paillettes d'or.

Rivkaé, elle, ne l'avait jamais vu. Elle pensa que tout d'abord que c'était Wolem, dieu de la mort des petits peuples venu l'emporter dans l'au-delà, mais ce qui se présentait devant elle était une femme et était bien trop grande pour que ça lui – surtout qu'elle avait des ailes mais passons. Mais bien qu'elle essayât en vain de rationaliser la personne qui était face à elle, le regard que lui jetait la reine l'effrayait, comme si ses yeux jugeaient sa misérable vie et qu'ils lui pourfendaient l'âme. Pourtant, à chaque pas que faisait Audisélia, ce regard que prenait Rivkaé pour du mépris et du jugement n'était rien d'autre que de la pitié et de la mélancolie... Une fois arrivée à son niveau, Audisélia s'arrêta de voler et descendit à son niveau, s'accroupit et la regarda en penchant la tête de gauche à droite avant de hocher la tête.

- Je pense que ça pourrait le faire..., lui dit-elle pensive.

Rivkaé haussa un sourcil d'incompréhension. La raison l'ayant rattrapé, elle comprit qu'elle avait sûrement en face d'elle l'une des nobles chez qui elle devait s'être produite, et à qui elle avait volé quelques objets rares pour les revendre...

- Non. Moi je suis bien trop occupée pour avoir le temps de voir une naine jouant aux gorilles. Mais je pense que tu peux être bien plus qu'une naine...

Audisélia se releva et lui tendit sa main qui brillait de mille feux, étincelante et scintillante à cause de son pouvoir de foudre, elle rendait captive toute personne qui la voyait, et Rivkaé n'y échappa. Elle était totalement subjuguée et hypnotisée par celle-ci.

- À partir d'aujourd'hui, tu seras une de mes saintes ! déclara Audisélia.

- Hein ? s'écria la naine aux bras artificiels.

- C'est un ordre de ta souveraine, alors n'espère pas pouvoir refuser, l'avertit-elle.

Rivkaé comprit alors qui elle avait en face d'elle. Elle n'en croyait tout simplement pas ses yeux, cette scène féérique lui rappela les contes humains que leur rapportait le sous-directeur de l'orphelinat qu'elle lisait lorsqu'elle était plus jeune...

« Un jour mon prince viendra... »

Manifestement, ce jour était arrivé pour elle.

Ni une, ni deux, la reine agrippa les aisselles de sa nouvelle aspirante et elles partirent en direction du palais royal.

Au-dessus de tout le royaume, Rivkaé put admirer l'immensité du royaume tripartite, au-delà des discriminations, de la puanteur des Basfonds et de la Sainte Noblesse... elle découvrit son nouvel habitat sous une toute nouvelle vision encore jamais vue. Elle s'apprêtait à remercier la reine pour la superbe vue, mais elle s'arrêta en apercevant le regard mélancolique de la régente de Sylvania.

Elle fut présentée aux premiers Saints qu'avait sélectionnés la reine : il y avait le trio gagnant qu'on connaît depuis le début : Globox, Morvian et Sawyer, puis Jérazim, ensuite feu Grégor, un loup-garou provenant de Transylvanie mort quatre mois avant qu'Audisélia aille à la rencontre d'Avelilinélia, après il y a feu Clasril, une harpie rencontrée en Nouvelle-Chypre, et en dernier, mais pas des moindres : le dénommé Valctium.

Toutefois, leur rivalité/antagonisme ou inimitié ne fleurit pas encore à ce moment-là. La graine de leur discorde incessante n'était même pas encore plantée.

Audisélia amena sa nouvelle protégée à Sawyer pour qu'elle lui soit présentée. Assis confortablement dans le fauteuil de son mentor Caemgen, Sawyer feuilletait les rapports qui lui ont été retranscrits sur feuille par ses soldats balançant ses cheveux de gauche à droite. À cette période, si je ne l'avais pas encore dit,il avait les cheveux encore plus longs qui les a au temps présent.

- Qui m'avez-vous encore une fois ramené, ma reine ? demanda Sawyer en ne quittant pas ses feuilles des yeux.

- Une jeune recrue pour qu'elle fasse partie de ma Sainte Garde.

Sawyer, perplexe, lève les yeux de ses feuilles et découvre une naine aux bras prosthétiques bien trop long pour sa taille, et qui, surtout, lui paraissait bien jeune et bien trop frêle pour être une chevalière proche de la reine – sans compter la crasse et la puanteur qui émanait d'elle.

- Elle a l'air de n'avoir même pas cent ans, cette naine...

- Et alors ? demanda Audisélia, quel âge crois-tu avoir ?

- Les nains sont les seuls à avoir une résistance à la limite d'âge, alors ils vieillissent plus longtemps par rapport aux autres races présentes à Sylvania et donc leur courbe d'apprentissage est moins précoce que nous.

- Pourtant, je veux qu'elle soit l'une des vôtres, insista-t-elle.

Sawyer déposa les feuilles qu'il tenait entre ses mains et lança foudroya du regard Audisélia. Il n'avait aucune envie de s'encombrer d'une gamine qui servait de bouffon royal à tout le Sanctuaire et à qui il devrait apprendre à se battre. Il avait de la peine pour elle car il savait très bien qu'Audisélia l'avait pris avec elle sans son consentement, elle était toute déboussolée, toute renfrognée sur elle-même, n'osant même pas le regarder droit dans les yeux...

- Un jour vos caprices ne prendront plus, reine Audisélia..., maugréa Sawyer.

- Tu as bien notifié mon titre, non ? Je suis reine, alors mes lubies et mes caprices ne sont rien de plus que des ordres souverains.

Malheureusement pour Sawyer, cette revitalisation de l'être de sa fée préférée s'accompagna de sautes d'humeur dont il était le seul à devoir supporter. Les autres membres des Saints ou du tout-nouveau gouvernement voyaient juste la facette intransigeante, stratégique et impassible de cette nouvelle reine qui avait « surmonté » ses traumatismes, lui avaient droit à tout le reste...

Rien que d'y penser, cela faisait autant soupirer le Sawyer du passé que du présent.

Mais grâce aux capri... aux envies absolues de la reine, Rivkaé n'avait plus besoin de faire ses bouffonneries devant les nobles de Sylvania, et devint une apprentie des Saints Chevaliers de la Reine. Sawyer, qui était une fée précautionneuse, étudia avec beaucoup d'attention les aptitudes qu'avait à offrir cette toute-nouvelle recrue, il constata que ses bras trop longs pour Rivkaé pouvait totalement devenir une force pour elle-même : elle était tout bonnement d'une agilité simiesque, utilisant ses bras pour esquiver en faisant des roulades, grimper aisément sur toutes les surfaces possibles... Sawyer fut satisfait de ce qu'il vit, elle pouvait, en effet, être un atout majeur pour leur unité spéciale, bien sûr elle n'avait aucune faculté au combat, mais il l'entraînerait durement pour qu'elle soit le plus rapidement possible apte à combattre, mais pour initier ce style que son esprit était en train d'imaginer pour Rivkaé, il se devait de lui donner de nouveaux bras, non pas ceux d'un manchot, mais ceux d'un combattant d'élite, alors il décida d'aller voir un armurier qui trempait dans d'obscures technologies, on disait de lui qu'il était un ancien scientifique d'un groupe militarisé humain, mais il a été démis de ses fonctions lorsqu'ils ont découvert qu'il revendait des armes aux Féériques – leur problème n'était pas qu'ils vendent des armes à des Féériques mais qu'il le fasse en ne donnant aucun crédit à la société-mère.

- Fokatino ! cria Sawyer en entrant dans la boutique.

À cette époque, elle était encore plus bordélique qu'elle l'était le jour où le Héros et la Fée sont allés le voir pour que Travis obtienne des armes adéquates pour combattre dans l'arène. Dans cette boutique qui tenait plus lieu d'entrepôts de stockage que de véritable échoppe d'armes...

- Malo Fokatino ? hurla Sawyer.

Malo n'était pas le nom de famille de Fokatino, mais une adresse honorifique.

D'un seul coup, sous un tas d'armure et jaillissant d'un nuage de poussière sorti un nain au visage et au tablier noircis par de la cendre. Sawyer sortit de sa poche un mouchoir et le tendit à l'armurier.

- Votre visage est bien noir aujourd'hui, commenta Sawyer.

- Ça me change du sang du champ de bataille..., marmonna Fokatino.

Les yeux du nain commencèrent à s'habituer à la lumière du jour, et petit à petit, il s'aperçut qu'aux côtés de son nouveau client se trouvait une de ses congénères mais qui arborait une étrange peau verte. Il se releva, dépoussiérant son tablier avec le mouchoir dont Sawyer lui avait fait don, oubliant que si on lui avait offert c'était pour qu'il essuie son visage, et scruta de tous les coins cette nouvelle tête qu'il n'avait jamais vu auparavant.

- Où as-tu bien trouvé ce troll ? demanda Fokatino à Sawyer en se curant les dents avec son ongle.

- Je pense qu'il serait temps que vous vous commandiez une paire de lunettes, ancien général.

Fokatino Narselembe, nain à la peau brune, toujours soigné sur lui, une coupe en dégradé toujours taillé aux millimètres près, était l'un des principaux généraux qui subit la « Grande Épuration Foudroyante Gouvernementale », mais inversement à beaucoup de ses anciens camarades, sa vie ne fut pas atteinte et il ne fut pas jeté dans les profondeurs de Lily pour croupir en prison. Contrairement à eux, il n'avait rien à se reprocher, il avait été un grand soldat de l'armée sylvienne, un héros de guerre qui avait sauvé son unité d'une embuscade ce qui fut l'un de ses hauts faits qui lui permit de gravir les échelons lors du règne de la précédente reine. Il ne s'était pas joué d'Audisélia, ne l'avait aucunement manipulé et n'avait fait qu'obéir aux ordres qui lui étaient envoyés comme tout bon soldat qu'il était.

Vous me demanderiez alors « pourquoi s'était-il retrouvé démis de ses fonctions ? », et bien pour la simple et bonne raison qu'il avait démissionné de lui-même.

Il ne supportait pas le caractère autoritaire qu'avait pris la reine une fois sortie de sa léthargie : cette idée d'un système magique électrique qui lui permette d'écouter toutes les pensées des habitants de Sylvania l'horrifiait au plus haut point.Et alors qu'il s'attendait à recevoir une punition à la hauteur de la désapprobation ouverte qu'il avait exprimé envers la reine, il ne reçut rien. La reine Audisélia accepta sa démission mais l'avertit qu'il sera considéré comme faisant partie des félons ayant subi sa Grande Épuration Foudroyante Gouvernementale, s'il en avait le besoin, elle participera à sa reconversion.

De cette expérience, il comprit qu'il ne saurait jamais sur quel pied danser avec cette femme. Elle pouvait se montrer cruel avec ces adversaires politiques et pourtant faire preuve avec ceux qui étaient en désaccord avec sa façon de régner. Néanmoins, il n'allait pas se plaindre de sa clémence puisque cela lui permit de recevoir de l'aide pour ouvrir son armurerie, mais les clients ne se battaient pas au portillon vu l'endroit où il était situé.

- Explique-moi alors, petit héros, si ce n'est pas un troll pourquoi elle a cette peau verdâtre, poursuivit Fokatino.

- Déjà elle a les mêmes oreilles aux lobes attachés que toi, mais en plus elle ne possède pas les immenses oreilles des trolls. Vous êtes sûrs que vous n'avez pas l'esprit embrumé par l'alcool ?

Fokatino leva ses mains devant lui, les fixa, longuement, intensément... avant d'en finir à cette conclusion :

- Peut-être.

Sawyer soupira.

Ce bon vieux nain n'avait aucunement changé depuis l'époque où il était un grand ami de son père. Mais comme pour Caemgen, les souvenirs qu'il avait de lui étaient beaucoup plus joyeux avant la mort de son paternel.

- Et sinon, tu viens pourquoi ? lui posa-t-il enfin la question.

Sawyer pointa la jeune femme du doigt.

- Je veux que tu lui fasses des bras technomagique dans le style de Dragedge-Kenningfort.

- Ah ! Cette ville à la technologique à vapeur ! se remémora le nain en fixant le plafond comme si une image sortait de ses orbites pour s'afficher sur celui-ci, ça fait bien longtemps que je n'y suis pas allé, j'ai hâte de pouvoir faire de nouvelles emplettes...

- Elle... Elle... elle a été détruite, s'exprima pour la première fois qu'ils étaient arrivés Rivkéa.

- Comment ça « détruite » ? la questionna abasourdie Fokatino, ce n'est pas possible !

- Et pourtant, c'est vrai, déclara Sawyer, on y revient et elle fait partie des rares survivants de cette cité mouvante, lui révéla la Fée en s'appuyant sur l'un des tonneaux.

De la sueur se mit à couler du visage de Fokatino serra les poings

- Par quoi elle a été détruite ?

- Une attaque terroriste à la Peste Valsim, une ancienne arme humaine modifiée, lui expliqua Sawyer, cette peste à la particularité, selon nos mages, médecins-mages, médecins et scientifiques, d'être très nocif pour les Féériques, rien d'inattendu venant de la part des humains...

Il n'y a aucune preuve...

- ...de donner la lèpre et une peau verdâtre.

Entendant cela, Fokatino se tourne vers celle qui prenait pour un troll, les deux se regardèrent l'espace d'un instant avant que Rivkaé détourne le regard, honteuse de subir le regard empli de pitié et empathique de son congénère, il observe son corps qui avait la couleur verte de la peste Valsim, la sclère de ses yeux qui était devenu rouge, la zone cicatricielle, où on pouvait encore distinguer les effets de la pourriture sur son corps, entre ses membres artificielles et sa peau...

Fokatino serra les poings et poussa un cri de rage venant du plus profond de ses tripes.

- Tu vois ? enragea Fokatino, c'est pour ça aussi que j'ai quitté l'armée de Sylvania ! dit furibond le nain forgeron, à chaque fois qu'on se rend sur des zones de guerre ou autres champs de massacres, on se retrouve à voir les pires horreurs qu'une guerre puisse avoir...

- Je ne jugerai pas vos choix quant à votre démission, mais en attendant, c'est parce que nous nous rendons sur ces « champs de massacres » que nous pouvons sauver des gens comme elle...

- Pour qu'ils finissent par vivre dans les Basfonds de Sylvania ? lui râla le forgeron.

- C'est mieux que rien... Certains n'ont même pas le droit à ce genre de traitement, souffla Sawyer, mais les choses évoluent... Bon ! s'exclama Sawyer, nous sommes venus pour améliorer les bras de la naine-là pas pour parler de la politique du royaume, à moins que tu veuilles refuser l'un de tes premiers clients, lui sourit le Saint Chevalier.

Fokatino rouspéta mais concéda qu'il était temps de savoir pourquoi ils étaient venus le voir. Il installa alors la jeune naine mutique sur la table au fond de la pièce centrale de l'armurerie, dégageant tout ce qui y traînait pour qu'elle ne se blesse d'aucune manière que ce soit, puis s'équipa d'une loupe monoculaire frontale et consulta les bras qui avaient été greffés sur le corps de Rivkaé.

- Malgré le fait qu'elle soit trop grande, elles sont trop bien pour lui... Je comprends ce que tu veux, ce n'est pas à moi de régler les prothèses...

- Parce que depuis qu'Audisélia dans son optique de changer le royaume a décidé de faire valoir le haussement du rang social de tous les habitants du royaume et ça commence par les nouveaux Saints Chevaliers dont cette jeune fille va être la nouvelle recrue.

Fokatino ouvre de grands yeux devant l'annonce de son ancien subordonné.

- Cette gamine va devenir une Sainte Chevalière ?

- C'est son choix... Enfin le choix d'Audisélia..., précisa Sawyer, las, je lui ai pourtant dit que ce n'était pas une très bonne idée, mais bon... Au moins, tu ne pourras pas dire que sous son règne il n'y a aucun moyen de gravir les strates de la société, rit-il faussement.

L'expression que montrait Sawyer à ce moment-là ne collait absolument la nonchalance dont il faisait preuve avec l'ancien général.

Cependant, ce n'est pas le moment pour nous de se concentrer sur son cas.

- Encore une fois : recentrons-nous sur les bras, le bourrassa Sawyer.

Fokatino le toisa du regard avant de s'intéresser à Rivkaé.

- Dis-moi : est-ce que ces bras te gênent ? lui demanda le forgeron,

Rivkaé secoua la tête sans regarder son interlocuteur.

- J'imagine bien que non puisque tu ne les as pas encore changés, et si Sawyer t'a entraîné avec cela veut dire tu t'en accommodes bien. Très bien, je pense que je peux avoir ce qu'il te fait dans quelques semaines...

- Semaines ? l'interrompit Sawyer, ça n'est pas trop long ?

- C'est toi qui m'as demandé des prothèses technomagiques, non ? lui rétorqua Fokatino, d'ailleurs je ne sais pas si tu es au courant mais on ne dit plus technomagique, mais néomagique tellement la technique de celle-ci a évolué à grands pas, dit Fokatino en prenant un carnet et un stylo et un mètre dans un de ses tiroirs sous sa table.

- Ce qui concerne les humains ne m'intéresse guère, vous devriez plutôt en informer Audisélia : elle raffole de ce genre d'informations.

Fokatino prit les mesures de Rivkaé qui fut très silencieuse.

Elle qui était connue dans tout le royaume pour être le meilleur clown qui ait jamais existé sur ces terres, elle jetait l'opprobre sur ses anciennes prestations. Néanmoins, il était compréhensible qu'elle soit dans cet état : elle appréhendait de plus en plus le nouveau statut qu'elle allait avoir. Elle connaissait la réputation guerrière de la reine, ses faits d'armes, sa maîtrise incroyable de l'épée, son gigantesque pouvoir encore juvénile, sa habileté n'avait rien à envier aux plus grands, alors qu'elle allait tout juste atteindre le jeune âge de soixante-dix ans, grâce aux enseignements de prestigieux maîtres d'armes et pouvait compter sur la protection de celui qu'on nommait déjà « le Digne Successeur du Héros de Sylvania »... alors que pouvait-elle bien lui apporter ?

- Qu'est-ce qu'elle me veut alors ? pensa Rivkaé à voix haute.

- Notre reine ? demanda Sawyer.

Rivkaé sursauta de peur, elle ne s'était pas rendu compte que ses pensées étaient sorties toutes seules de sa bouche. Elle secoua ses bras pour se confondre en excuses mais malheureusement pour elle, parce qu'elle était trop distraite par ses pensées, elle n'avait pas remarqué que Fokatino les avait pris pour faire les mesures de ses prothèses, donc ce qu'elle secouait n'étaient que ses minuscules moignons. Cela aurait été moi j'aurais ri à pleine gorge en voyant cette scène, mais Sawyer n'était pas comme cela, lui était bon avec tout le monde, même quand ils se confondaient en ridicule.

Il s'approcha de Rivkaé qui ferma les yeux instinctivement, effrayée à l'idée de la réprimande qu'elle allait subir – les nobles, insatisfaits lors de ses premières prestations médiocres, si médiocres que son imprésario l'a lâché, ne se gênaient pas de la molester... mais la seule chose qu'elle sentit fut les mains chaleureuses de Sawyer sur ses restes d'épaules.

- Dis-moi ce qui te tracasse, lui dit Sawyer, j'y répondrai avec la plus grande des honnêtetés.

Le regard fuyant de la naine se tourna en direction du visage de son futur supérieur, et comme devant la reine, elle fut subjuguée – mais pour de tout autres raison – : ses yeux remplis de tendresse qui la prenait en pitié, le touché de ses mains qui se voulait rassurant et le ton de sa voix qui douce et chaleureuse... Tout cela combiné ne put que la faire craquer et la faire fondre en larmes.

- Oh mais qu'est-ce qu'il t'arrive ? s'inquiéta Sawyer.

Plus il lui parlait, plus ses sanglots devenaient de plus en plus intenses, Sawyer ne put qu'agiter les bras dans tous les sens, impuissant devant les larmes de Rivkaé. Devant cette scène, Fokatino se fit la réflexion que bien qu'il fût l'enfant avec la plus grande empathie qu'il ait connu, il restait un piètre consolateur avec la gent féminine : son niveau de compréhension des femmes était nul voire dans le négatif. Il l'avait déjà vu être en incapacité de sortir de son mutisme pendant un long moment sa princesse... Heureusement que la première Audisélia était là pour contrebalancer la gaucherie de son fils.

Au bout d'un moment, les sanglots de Rivkaé se calmèrent assez pour que sa gorge se desserra et que des paroles compréhensibles purent en sortir.

- Je... Je... J'ai gâché ma vie ! pleura-t-elle, je ne sers à rien à part faire rire des bourgeois qui me jette leurs excréments au visage, qui me tabasse à la sortie de mes spectacles et je peux rien dire si je veux rentrer chez moi en vie... Je me suis offerte à des inconnus pour de l'argent tellement j'étais désespéré, fétichisée... Je suis devenue une moins que rien... alors pourquoi elle tient à ce que je devienne l'une des membres de sa prestigieuse garde ?

- J'imagine que c'est justement parce que tu te sens ainsi qu'elle a décidé de te prendre sous ses ailes...

- Hein ? Vous êtes sûr de ce que vous racontez ?

- Oh que oui ! affirma-t-il, je la connais assez bien depuis longtemps pour savoir ses manigances. Elle est juste... comme ça. Après tu sais, les autres aussi ne sont pas de nobles grands guerriers, ils sont même très loin de ça, mais notre reine les a choisi parce qu'elle voyait en eux un certain potentiel et leur a donné une seconde chance. Ce qui lui a valu de nombreux problèmes et lui vaudra de nombreux problèmes dans le futur. Mais ne t'inquiète pas si elle t'a choisi c'est que tu en vaux la peine ou elle fera que tu en vailles la peine.

Sawyer se leva et posa devant elle : poing serré, bras près du corps, regard confiant, sourire rempli d'assurance.

- Alors essuie-moi ces larmes d'ospiam et prépare-toi à être la septième chevalière de notre ordre.

- Mais je ne peux pas les essuyer, je n'ai pas mes bras.

- Ah, dit le fée-chevalière en dévorant ses lèvres de honte.

Il se baissa à sa hauteur, prit le mouchoir de son veston royal et lui essuya ses larmes. Rivkaé ne pouvait dire à ce moment-là tout ce qu'elle avait sur le cœur, il était vrai qu'elle était encore jeune, il existe des tonnes de races qui ont une longévité beaucoup moindre que la sienne et pourtant cela ne les empêche pas de se relever et de continuer leur chemin malgré les erreurs qu'ils ont pu faire, alors il n'y avait aucune raison pour qu'elle puisse penser qu'elle allait rater sa vie ! Si la reine lui laissait sa chance d'être autre chose qu'une bouffonne, alors... alors... alors elle se devait de saisir cette opportunité.

À cause de ce tout plein d'émotion que la seule chose qu'elle put faire c'était poser sa tête sur le torse de Sawyer et lui dire merci.

Si elle aimait les garçons, sans doute serait-elle devenue folle de cette belle fée...

Sawyer, attendri par son geste, posa sa main sur sa tête et la caressa avec tendresse passant ses doigts dans ses délicats cheveux. Il soupira en se rappelant du nombre de gens dont il était le garant.

- Qu'est-ce que tu me fais faire..., murmura-t-il.

L'acquisition de ses nouveaux bras marqua ses débuts dans les rangs des Saints de la Reine, et le début de son changement de comportement. Elle qui n'était pas très confiante en ses capacités et en elle-même se mit à devenir de plus en plus arrogante et à provoquer son nouveau rival Valctium. Si elle voulait prouver à celle qui lui avait donné sa chance qu'elle pouvait lui être utile, elle comptait bien gravir les échelons atteindre le niveau de Sawyer et prendre la place de ceux qui étaient au-dessus d'elle. Malheureusement pour elle, ceux dont elle voulait prendre la place étaient de sacrés morceaux qui avaient déjà vécu plusieurs conflits sanglants, et dépasser Sawyer n'allait pas être une mince affaire étant donné le statut qu'il avait au sein du royaume... Mais elle ne se découragerait pas !

C'est bien pour cela, qu'encore une fois, sur le poupembarcation, elle allait se confronter à Valctium.

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