Gen Z

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Je fais partie de cette fameuse génération née dans les années 2000. Ado, j'ai connu TikTok, a l'époque ou peu d'adolescents avaient le dernier iPhone, à l'époque ou on se croyait stylés à faire des playbacks sur une musique des années 2012, le tout bien sûr avec un filtre de couleur bien irréel et une qualité d'enregistrement que les enfants de la génération Alpha décriraient maintenant comme gênante. Bref, j'ai connu TikTok à l'époque où cela s'appelait encore Musically.

Mes parents faisant la guerre aux téléphones et aux réseaux sociaux alors, je n'avais pas la possibilité d'utiliser Musically. Mais, j'avais trouvé la combine. Ma meilleure amie possédant un bien meilleur téléphone et une liberté d'utilisation totale, nous nous amusions énormément à faire ces fameux playbacks en jouant la comédie.

J'ai ensuite pu m'acheter grâce à mes précieuses économies mon vrai premier téléphone. Un Samsung S10 que j'ai gardé cinq ans. Je n'avais pas Musically, car à l'époque, je ne l'utilisais que pour faire l'idiote avec ma meilleure amie et seule, cela m'ennuyait vite.

Plus tard, lorsque, grâce à mon premier travail étudiant, j'ai pu m'offrir mon premier iPhone, j'ai réinstallé cette application qui faisait alors beaucoup de bruit et qui s'appelait désormais TikTok. J'avais alors 18 ans, et plus aucune restriction de temps d'écran.

Lorsque j'ai rouvert cette application pour la seconde première fois, cela n'avait plus rien à voir avec ce que j'avais connu au collège. Des vlogs, des conseils sportifs et mode, de l'art, de la science, de l'humour et tellement d'informations à la seconde.

De courtes vidéos qui ne laissent pas le temps de s'ennuyer et qui ne nous forcent pas à être concentrés. Une machine à satisfaire directement notre cerveau. Un distributeur gratuit et sans efforts de dopamine. Une fabrique à TDAH.

Je suis rapidement tombée dans une spirale de plusieurs longues heures de vidéos. J'avais l'impression d'avoir appris et vu beaucoup de choses, mais je ne me souvenais d'absolument rien par la suite.

Pour ne pas perdre la génération X et Y, TikTok correspondrait plus ou moins à une journée à se perdre dans les dédales d'Ikea.

J'ai vu mon temps d'écran augmenter au détriment de mes heures de sommeil. À l'apogée de mon addiction, mon temps sur l'application pouvait atteindre les six à huit heures par jour.

On en fait des choses productives en huit heures. Mais je ne faisais rien, car dès que je m'ennuyais, j'avais alors accès à une source simple et inépuisable de contenu ciblé pour me plaire et me maintenir le plus longtemps possible sur cette application. J'en ai même oublié ce qu'était le luxe de l'ennui.

Un jour, j'en ai eu marre. Marre que mes journées se remplissent de vide. J'ai désinstallé l'application. J'ai dû réapprendre à transformer l'ennui en activité. Réapprendre à gérer mon temps d'écran et mon temps de travail. Reprendre un rythme de sommeil acceptable, et surtout, je devais apprendre à m'occuper autrement. J'ai passé du temps seule et accompagnée, j'ai lu, j'ai écrit, j'ai repris mes occupations d'avant TikTok. J'ai apprécié passer du temps avec moi.

Après tout ça, j'ai dès lors toujours l'application sur mon téléphone. Mais je ne m'y rends que très rarement lorsque mes amis m'envoient des vidéos, ou que je suis bloquée dans une salle d'attente. Maintenant, je trouve ennuyeux d'y passer plus d'une heure si je peux faire quelque chose qui me plait vraiment à la place. Je ne suis plus passive, mais agente.

Alors, si je devais résumer ce que j'ai appris de cette application durant toutes ces années, je dirais que TikTok est un refuge pour ceux qui pensent trop et qui veulent s'accorder une pause. Mais cette pause peut s'avérer rapidement addictive, si elle est mal dosée. Il faut bien avouer que l'application est une mine d'or pour les personnes cherchant de la visibilité, mais c'est une dimension où le temps semble s'arrêter, mais où votre batterie s'épuise quand même. Une bulle qui nous isole et nous conforte dans nos croyances. Une plateforme d'influences qui ne nous montre que ce qui nous satisfaits ou que ce qui nous procure une occupation. Une distraction au service de la consommation et une énième bataille pour les parents et leurs adolescents qui doivent apprendre à contrôler une addiction de plus.

C'est une application chronophage qui nous laisse penser qu'on aura le temps demain, alors qu'elle s'alimente de celui-ci.

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