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            L’engin roulait à travers la tempête depuis presque trois heures quand, sans raison apparente, Armist se figea, le regard perdu dans le vide pendant seulement quelques secondes avant son poing massif brise son verre de cristal tandis une veine palpitante se dessinait sur sa tempe droite. Quand il revint enfin à lui, il repoussa le Seigneur-Judiciaire qui était venu s’assurer de son état et se précipita dans la cabine de pilotage avant de dégager sans ménagement le responsable des transmissions de son poste et s’asseooir à sa place. Réglant les fréquences, il enfila le casque-micro et lança un appel.

             — Prison Royale, ici le Grand Maître des Guerriers de Jade, Armist Eristov, parlez.

            Le grésillement sur les ondes dura quelques secondes avant qu’une voix lui réponde.

— Mes Honneurs, Monseigneur. Ici Commissaire De l’Art, Maître-Régent de la Prison Royale. Que peuxpuis-je faire pour vous satisfaire  ?

— Renforcez la garde aux cellules des traîtres Ggéno-modifiés  !

— Monseigneur, les traîtres sont entravés et maintenus en léthargie depuis des siècles, je vous assure qu’il n’est pas nécessaire de déployer plus de gardes…

— Obéissez, si vous ne voulez pas voir votre tête séparée de votre corps  !

            Un léger silence flotta sur les ondes, avant que la réponse parvienne.

— Il sera fait selon votre parole, Monseigneur…

— Je l’espère bien. J’exige un compte-rendu de situation heure par heure.

— Oui, Monseigneur.

— Bien. Et peut-être que si vous réussissez votre mission, je me montrerais clément pour votre refus d’obéir.

—… Merci Monseigneur… Vous êtes trop bon…

            Lorsque le Commissaire raccrocha ses transmissions, il hésita quelques secondes. Pourquoi le Grand Maître donnait-il de telles instructions  ? Les renégats étaient totalement entravés, mais surtout complètement sédatés, et le plus d’activité qu’ils avaient était que parfois l’un d’entre eux grognait dans son sommeil artificiel… Néanmoins, il appréciait de se savoir la tête sur ses épaules et sortit donc de son bureau d’un pas déterminé en avisant sa secrétaire.

— Mademoiselle Blanche  ?

— Oui Commissaire  ?

— Dépêchez tous les gardes en repos et envoyez-les en équipement complet auprès des Ggénos.

            Le visage de la jeune femme afficha le même scepticisme que celui de son supérieur, mais elle opina malgré tout du chef avant de pianoter sur son clavier pour envoyer les ordres sur tous les HUD des gardes. Dix minutes plus tard, quatre cents hommes en tenue antiémeutes, armés de boucliers, de matraques électriques et de lance-grenades fumigènes arrivaient en masse dans le vingtième sous-sol de la prison pour prendre position. Un groupe d’une dizaine d’hommes sortis du lot pour aller inspecter les cellules, ouvrant les trappons des portes et contrôlant les moniteurs externes jusqu’à la dernière cellule où le chef de groupe s’immobilisa avant de  se saisir de son talkie-walkie.

— Il y a un bruit dans la zéro-un.

            De l’Art grogna.

— Sûurement un mauvais rêve.

— Commissaire, un mauvais rêve, c’est un grognement. Là, c’est plutôt un chant…

— Un chant  ? Quel chant  ?

            La réponse parvint de la cellule.

— La levée des épées  !

            Dans la foulée, la porte s’arracha de son mur et parti tel un boulet de canon, jetant les gardes au sol tandis qu’un géant entièrement nu sortait de la cellule. Récupérant deux matraques électriques au sol pendant que les gardes à l’extrémité du couloir armaient leurs lance-grenades, le guerrier, dont une énorme balafre dévorait le côté gauche du visage, hurla.

— Mes frères, vous avez entendu notre chef  ? Il est l’heure de se réveiller  !

            Comme un écho à cet appel, les portes des cellules volèrent les unes après les autres.

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