04h12
Ce composé chimique complexe se retrouve dans le sang de tous les êtres vivants. Il est créé par une bactérie Escherichia coli K12 génétiquement modifiée durant la troisième guerre mondiale. Or, comme mon enveloppe physique n’existe plus, ma source me vient de mon Chishiki.
Par ailleurs, c’est après cette époque que les premiers Chishiki ont été conçus en laboratoire à partir de cobayes humains volontaires. Leurs organes internes sont plus complexes, mais leur anatomie extérieure n’a pas changé. C’est une différence majeure avec les Hahaoya qui les ont précédés.
Il est désormais assis au bord du lit et arrête l’alarme de son réveil d’un geste machinal.
— Merci d’avoir arrêté ton réveil !
La voix de Mizuki résonne à travers la cloison.
Michel affiche un sourire léger.
— De rien, petite sœur !
Son regard se pose naturellement sur le portrait à l’huile qui repose sur la table de nuit. Il s’agit d’une femme aux longs cheveux noir de jais dont les iris sont sombres et profonds et rappelle la couleur de l’ébène. Elle affiche un son visage très souriant en se tenant devant une maison en pierre de taille. Son prénom est sans nul doute possible, Émilie.
— Bonjour maman.
Son silence est court, mais il ne la quitte pas des yeux.
— J’espère que le festival des Quinze t’a plu.
Son murmure est faible et sa voix tremblante.
Doucement, il se met à observer l’étagère pleine d’ouvrages variés sur le mur en pin face à lui.
Il y a encore tellement de livres que je n’ai pas eu le temps de lire.
Il se lève d’un geste calme et marche vers le bureau plaqué à gauche de l’étagère.
Après s’être assis, ses doigts saisissent la carte posée sur un livre neuf.
— Michel Ashura ; félicitations pour ta majorité. Signée, Linda Mayer.
Il s’exprime faiblement, mais ses lèvres s’étirent pendant qu’il glisse avec soin la carte dans le tiroir.
— Je parie que tu lis le livre que Linda t’a offert hier ?
La voix montante de Mizuki résonne de nouveau dans sa chambre étroite.
D’une main assurée, il ouvre calmement l’ouvrage.
— En effet.
— Tu as vu sa carte ?
— Oui.
— Linda a vraiment une belle écriture. Je suis un peu jalouse.
— Ton écriture n’est pas vilaine.
— Merci.
Michel regarde tranquillement le sommaire.
— Tu sais, tu devrais lire un peu plus pour t’instruire.
— Tu sais bien que je n’aime pas la géographie !
— Que dirais-tu que je te lise un passage sur notre village ?
— D’accord, je t’écoute !
Il tourne plusieurs pages pour aller à celle qui parle de Hanakaze.
— Ce pittoresque village, niché au cœur de la vallée de Kibo, est entourée d’une luxuriante forêt aux arbres imposants où la faune et la flore s’épanouissent dans un lieu au mille secret.
Chaque syllabe prononcée est claire et distincte. Cependant, pour une raison qui m’échappe, le nom du village me fait penser au prénom de Hana… Hana Kaze… Il est possible que cette personne soit impliquée dans mon ancienne vie.
— Les ombres rafraîchissantes de l’été veillent en gardiens protecteurs, tandis que le soleil à la fois tendre et cruel se reflète dans la rivière cristalline qui serpente à travers les terres fertiles, pour offrir des récoltes savoureuses et abondantes sous le calme regard de la légendaire chaîne montagneuse d’Alpina que nul ne saurait gravir.
Un rire léger provient de Mizuki.
— C’est très beau, mais n’aurais-tu pas arrangé le texte ?
— Les informations factuelles restent exactes.
— J’aime ta narration, par contre, je connais le village.
— Tu veux qu’on change de sujet ?
— D’accord.
Michel tapote légèrement son index le bureau.
— Parle-moi de la tenue qu’Etsuko t’a confectionnée ?
— Je ne l’ai pas essayée, mais j’aime son style et sa couleur.
— Est-ce que tu t’es amusée au festival ?
— C’était génial ! Sur scène Alice et Chloé ont joués des rivales farouches !
— Elles sont bonnes comédiennes.
— Tom est venu me parler après, mais il s’est mis à rire nerveusement.
— C’est bizarre, il n’agit ainsi qu’avec toi.
— Je sais, mais je n’arrive pas à comprendre pourquoi.
— Laisse-lui du temps, ça ira.
Il est peut-être amoureux de Mizuki ?
— Tu as sûrement raison, mais j’ai quand même voulu lui demander.
— Qu’est-ce qu’il a répondu ?
— Rien, Mike est venu me défier en duel à ce moment précis.
— Celui-là a le chic pour tomber au mauvais moment.
— Papa lui a dit que c’était inapproprié et qu’il devrait patienter. Sinon, tu t’es amusé ?
— Samuel m’a raconté une anecdote qui date d’il y a six mois.
— Raconte-moi, je veux tout savoir !
— Un homme travaillant pour la famille royale est venu le démarcher à la boulangerie.
— C’est injuste, il ne m’en a pas parlé !
— Il était prêt à payer une très grosse somme d’argent, mais Samuel a refusé en disant fermement.
Son pied frappe le plancher avec vigueur.
— Je n’irai nulle part où ma femme n’est pas ! Veuillez m’excuser, j’ai des pâtisseries au four !
Mizuki éclate de rire.
— Ça ressemble tellement à Samuel, je l’imagine bien avec son air bougon.
— Moi aussi ! Au fait, j’ai vu qu’Henri t’avait portée sur ses épaules ?
— Exact, c’était cool. J’avais une vue imprenable du village.
Ses sensations s’effacent et mes perceptions se connectent une nouvelle fois au sens de Mizuki.
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