Chapitre 26

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La guerre est proche ! Les créatures magiques ne tarderont pas à nous la déclarer. Il n’y a qu’à regarder la hausse des attaques dans nos villes. Ces… ces monstres réussissent à passer impunément la Muraille et à infiltrer nos plus importantes agglomérations. Elles causent d’innombrables dégâts et victimes alors que chaque année nos dispositifs de protection perdent en efficacité. Aujourd’hui, plus de 80’000 unités de Trappeurs sont déployées sur tout le Continent, mais comment expliquez-vous tous ces accidents ? Je vous le dis, elles se mettront en tête qu’elles n’ont aucune raison de partager ce territoire avec nous, qu’elles nous sont supérieures. Nous devons nous préparer à la guerre ! La guerre, je vous le dis ! C’est eux ou nous.

Extrait d’une interview de Fabienne Delgrive à la radio SPELL


- Merci encore pour tout.

Ma tête s’incline légèrement dans la direction d’Harvey.

- Mah, ce n’est rien voyons !

Gêne. Le jeune homme se gratte la nuque.

- C’est même plutôt à moi de vous remercier : je n’aurais jamais cru pouvoir engager quelqu’un un jour.

Son air joyeux s’assombrit en y songeant. Un sourire tendu qui ne dévoile aucune dent, le regard évitant. Sans doute repense-t-il à cette longue traversée du désert qu’à dû être de remplir ce poste vacant. Cependant cela ne dure qu’un instant.

- Mais il faut croire que je suis bien tombé ! Vous êtes là maintenant.

Immédiatement, son grand sourire iconique reprend sa juste place sur son visage. Pommettes relevées, yeux étincelants, toute la panoplie fait son grand retour. C’est tout juste si je ne dois pas plisser des yeux pour le regarder en face. Tellement le bonheur pur irradie de tous les pores de sa peau, tellement le propriétaire de « Harvey & cie » est solaire. D’une joie si innocente. Et pourtant si pathétique pour exprimer l’ombre d’une estime de soi. En temps normal, sans doute serais-je en train de le rassurer sur ses compétences, que c’est un réel miracle qu’il m’ait engagée, moi, une autre Désalignée au passé trouble. En temps normal… Ma mâchoire se contracte.

Mais là, tout de suite, j’ai tout sauf envie de faire durer la conversation.

- C’est tout mon plaisir voyons !

Forçant sur mes muscles, je tente de décrisper mon sourire nerveux.

- Pour ce qui est de demain, je serai là, comme convenu, à 8 heures pétantes.

Et maintenant… Recule d’un pas, montre d’un geste timide la porte derrière toi. Mes gestes s’exécutent mécaniquement.

- Je resterais bien volontiers discuter des détails du contrat que l’on a signé, mais on m’attend déjà ailleurs, vous voyez…

- Oh !

Éclair de compréhension dans son regard de chiot.

- Oh, mais bien sûr ! Mah, que suis-je bête : je ne voulais pas vous retenir aussi longtemps.

Harvey se mordille la lèvre, secoue nerveusement ses cheveux. Puis, soudain, son regard se refixe sur moi.

Flottement.

Avant l’explosion.

- Mah ! Qu’est-ce que vous faites encore là voyons !

Habillement, son corps survole le comptoir, passe de l’autre côté, avant de me pousser prestement vers la sortie de ses deux bras.

- Allez-y, allez-y ! Ne soyez pas en retard par ma faute.

- Ah ! Euh… Merci beaucoup pour votre compréhension, je vais y aller dans ce… cas ?

Léger impact dans mon dos. Je me fige.

- Monsieur… Willington ?

Alors que la sortie se rapprochait à grands pas, le jeune homme m’a soudain étreinte par-derrière. Je tente de me retourner, d’apercevoir ce qu’il est en train de mijoter, sans succès. Je me débats dans le vide, tentant mon possible pour m’échapper sans lui faire le moindre mal.

- Qu’êtes-vous en train de…

- Prenez soin de vous.

La voix de Harvey murmure à mon oreille.

- La vie est bien trop belle pour être gâchés par quelques soucis.

Quelques mots seulement. Emprunts d’une inquiétude non feinte.

Pourquoi donc une telle attention ?

- Et elle est aussi bien trop courte pour passer son temps à s’inquiéter.

Chaleureux, sans arrière-pensées. Le câlin dure à peine un souffle. Tout de suite après, ses bras maigres me relâchent. Je me retourne vivement. Le cœur en berne, les joues brûlantes de ce contact soudain. Ce sont les yeux verts brillants de Harvey qui me réceptionnent. Des joues légèrement rosées, un sourire un petit peu plus petit. Comme s’il avait deviné. Ma détresse, le tourbillon de confusion en moi. Comme s’il s’excusait de les avoir provoqués. Même si tout me laisse à croire qu’il n’en connaît pas la raison exacte. Mes sourcils se froncent devant une telle absurdité. Alors, comment ? Comment un être aussi pur et innocent, qui ne connaît presque rien de ma vie peut-il à ce point me bouleverser ?

Mes lèvres s’entrouvrent, mais avant même d’avoir pu articuler le moindre son, le jeune entrepreneur m’arrête net :

- Passer une bonne journée, mademoiselle Dorlémon. À demain !

Toujours aussi souriant. Comme si de rien n’était. Comme s’il ne voulait pas en parler. Un peu désarçonnée, les mots sortent brouillons de ma bouche.

-… Oui. Vous aussi. À demain…

Mon corps ne se met pas immédiatement en mouvement. Un dernier regard hésitant, un dernier battement de paupière. Puis je me décide à enfin passer le pas de la porte, laissant derrière moi ce qui vient de se passer. Parfois, certains ressentis ne s’expliquent pas.

Cling !

Le froid mordant ne manque pas de me saluer. Frisson. Je serre tout contre moi le tissu de mon manteau. Claquant des dents, grelottant péniblement. Je me mets rapidement en marche. Vers où et pourquoi, je ne cherche pas à le savoir. Marcher. Marcher pour se distraire. Se distraire de ces pensées tumultueuses revenues avec cette bise de l’hiver. Quelques pas.

Et soudain, un maigre sourire.

Peut-être même un semblant de rire.

Je ne peux l’empêcher de remonter le coin de mes lèvres. Un peu pauvre en joie, c’est à peine s’il doit illuminer mon visage en cet instant précis, mais, peu importe. Sacré Harvey. Son approche était tout ce qu’il y avait de plus maladroit et pourtant… L’espace d’un instant, mes soucis se sont comme évanouis. Une brève étreinte pour un instant de légèreté. Une affection inconditionnelle. Qui réchauffe les cœurs et redonne espoir.

Si seulement cela pouvait durer.

Mes lèvres retombent. Comme si ce n’était qu’une brèche momentanée dans la couche de nuage, mes ennuis reviennent. Clochette.


- Exceptés vous et Karibou, personne n’a pris la parole dans cette boutique.


Mes poings se serrent. Comment cela est-il possible ? Je n’ai pas rêvé pourtant. Toutes nos interactions étaient bien réelles… non ?


Ha ah ! Alors toi, tu me plais bien !

Tu sais, je ne te veux aucun mal.

- Tu n’as plus rien à craindre : ton chevalier servant est arrivé !


Envahis par l’angoisse, mes doigts ne peuvent s’empêcher de triturer mes tempes. Je suis saine d’esprit. Je n’ai pas inventé tout ça. Même le plus réaliste des rêves ne pourrait se rapprocher de ce que j’ai vécu.

Mais alors quoi ?

Comment expliquer qu’un témoin direct de la scène possède une autre version des faits que moi ? Je l’ai vu. De mes propres yeux, j’ai observé cet homme prendre ma défense, démonter avec son air moqueur les accusations de ce Marchand. Ses cheveux poivre sel, sa taille immense. Cette clochette au coin de son œil. Je devrais me faire interner si tout cela n’est que le fruit de mon imagination. Me mordillant la lèvre, je force mes mains dans mes poches. Mes tempes brûlent.

Puis soudain, une idée germe dans mon esprit.

Dangereuse et folle.

Comme pour y répondre, une nouvelle rafale traverse de part en part la rue. Elle fait s’envoler des mèches de cheveux, glace mes joues en feu. Elle souffle, souffle fort à en faire s’envoler les tuiles des toits.

Mais elle n’arrive pas à déraciner cette pensée de ma tête.

Le vent se meurt. Les carillons erratiques qui vibraient encore la seconde d’avant se taisent subitement. Silence. Les allées vides de la ville s’offrent à moi. Je continue de marcher, faire vibrer les pavés sous mes pas. Mon cerveau tournant en roue libre. Ce qui n’était qu’au début une vague impression se précise, s’affûte. Elle qui n’existait pas l’instant d’avant s’accapare maintenant tout mon esprit. Frisson. Il m’est désormais impossible d’en détourner le regard.

Mes trous de mémoire sont survenus peu après mon arrivée à Tarn, j’en suis certaine. Ce vide glacial qui me met à genoux, qui fait tout s’effondrer autour de moi. Qui m’enserre le cœur à chaque fois que je réalise avoir oublié des pans entiers de mon existence, je n’aurais jamais pu le supporter bien longtemps sans remettre en question ma sanité d’esprit.

Il ne peut donc qu’être récent.

Comme l’arrivée de Clochette dans ma vie.

Cette propension à apparaître de nulle part. Ces souvenirs déformés des autres, de certains évènements.

De Franz.

Des larmes me montent aux yeux quand j’y repense. Comment ai-je pu ? Comment ai-je pu l’oublier, lui, l’unique personne à m’avoir ouvert son cœur alors que je n’étais qu’une enfant des rues ? Il ne méritait pas ça. D’être oblitéré dans le néant ainsi.

Serait-il possible qu’il… ?

Un haut-le-cœur me prend. Je m’appuie un instant sur le pied d’un lampadaire. Le métal gelé mord sauvagement la peau de mes doigts, mais je n’en ai cure.

- C’est impossible…

Impossible ? Qu’est-ce qui est impossible ? Qu’un humain soit capable d’utiliser de la… magie ? De manipuler les souvenirs d’autrui ? Alors même qu’aucune CM portée à notre connaissance n’en est actuellement capable ? C’est dingue. Fou. Insensé. Et pourtant… En mon for intérieur, une minuscule partie de moi y adhère sans concession.

Car cela expliquerait tout.

Car cela ferait sens d’une certaine manière.

Les connaissances des Trappeurs ont très peu évolué depuis leur création, comme figées dans le temps. Les manuels, les cours, les théories, toutes ces bases que l’on apprend pendant notre formation datent de plusieurs générations en arrière. Il est vrai qu’en de rares occasions elles sont mises à l’épreuve et corrigées, mais…

On est encore très loin de la norme.

Après la construction de la Muraille, les quelques contacts épars avec les peuples magiques n’ont pas su conserver le flot d’informations. Et naturellement, avec le temps…

- Auraient-ils… évolué ?

Au point d’imiter avec leur métarph l’apparence humaine ? Cela voudrait dire que…

- Tout ce que l’on a fait jusqu’à maintenant était… inutile ?

Les CM sont déjà parmi nous.

Le choc de cette nouvelle me fauche les jambes. Mes genoux s’écorchent au sol. Je suis à terre.

- Nous avons… échoué ?

En ce moment même, alors que les Trappeurs perdent leur temps à chasser quelques menus fretins dans des usines désaffectées, eux, ces créatures, rassemblent leurs forces, se répandent à travers notre société. Chaque jour qui passe est une nouvelle opportunité. Pour s’étendre, pour gagner en influence jusqu’à atteindre ce point culminant. Où tout basculera. Les créatures magiques reprendront le pouvoir. Et nous, nous ne serions plus rien. Le statu quo qui a traversé les âges gisant en miettes à nos pieds.

Parce qu’on ne consent qu’à être supérieur à l’autre.

Mon regard tombe sur mes mains tremblantes. Même moi, j’accepte ce fait comme vérité absolue. Ce sentiment grisant à la fin de chaque capture de CM, cette impression de puissance. De se savoir plus fort, plus rapide, plus malin que l’autre. L’autre, cet être étranger, aux formes et corps si différents, auquel on n’accorde à peine plus de crédit qu’à un animal. J’exultais de les avoir surpassés. Mon souffle fébrile se transforme en nuages dans l’air. Des frissons secouent mon corps tout entier.

Et pas une fois, je me suis souciée de leur sort.

Que leur arrivait-il après leur capture ? Ils étaient relâchés de l’autre côté de la Muraille, je présumais. Présumais, car je n’en ai aucune certitude. Si ça se trouve… Pour mettre à jour nos savoir sur eux…

- Non !

Non ! Je n’ai pas envie d’y songer. Le faire reviendrait à avouer que pendant des années j’ai… que pendant des siècles nous serions complices d’un trafic de cœurs battants, d’esprits pensants. D’êtres vivants. Même si cela était fait à notre insu, cela n’en reste pas moins que c’est du sang qui coule sur nos mains.


La personne pour qui je bosse tient à ce que je te garde à l’œil.


Mon souffle se fige dans mes poumons. Si Clochette est un CM et que pour son chef… son groupe tout entier il en est de même… S’ils me surveillent, c’est parce que…

- J’étais une Trappeuse.

Récemment licenciée, donc sans protection de ma caste. Mais avec toutes l’expérience et les connaissances récentes du métier.

Ils en ont après ces informations.

Je n’ai comme valeur que ce peu de savoir entre mes doigts. Une fois qu’il sera en leur possession.

- Ils disposeront de moi…

Je frotte mes bras presque douloureusement pour lutter contre le froid. Ou est-ce pour éloigner cette terreur qui monte en moi ? Je ne sais pas. Je ne sais plus… Et puis peu importe ! Ce n’est pas ce qui importe, là, tout de suite ! Pas étonnant que ce crétin ait voulu faire ami-ami avec moi ! Avec le temps, on se serait rapproché et je lui aurais fourni tout ce dont il avait besoin sans me méfier, sans rien falsifier. La pure vérité. Nue et parfaite. Parfaite pour mettre notre monde en miette.

Ce n’est que maintenant que tu t’en rends compte ? À la bonne heure.

Mon sang se fige à cette voix.

Quoi ? Surprise que je sois toujours là ?

Ce ton sarcastique et sec… Je ne veux plus y avoir affaire.

Oh, ma choupette, tu me sembles toute bouleversée. Tu sais que tu peux tout me dire, hein ?

Dégage.

Un problème ?

Dégage, je te dis !

Oh la la ! Ce n’est pas une façon d’accueillir une amie, ma chère Solfiana.

Un rire. Mes mains se plaquent sur mes oreilles, mes yeux se ferment. Je fais tout ce qui est possible de faire pour m’occulter au monde qui m’entoure. Mais rien n’y fait.

Je l’entends encore.

Ce rire qui écorche mes nerfs.

Pas besoin d’être aussi désagréable, surtout quand je suis là pour t’aider.

M’aider ?! Je n’ai besoin d’aide pour rien !

Tss ! Et moi qui croyais que tu venais enfin de faire un pas dans la bonne direction.

… !

Il faut croire que je me trompais lourdement.

Sors de ma tête.

Un problème ? Ce n’est pas ma faute si tu es incapable de supporter les responsabilités qui t’incombent tout de même,

Je t’ai dit de sortir de ma tête !

Mon poing frappe la surface du lampadaire contre lequel je trouve soutien.

Klong !

Le son résonne un long moment dans l’air. La douleur se répand dans toute ma main, mais je la ravale en serrant les dents.

Doucement ma grande ! Il serait dommage d’abîmer tes si bons ongles.

- Mais qu’est-ce tu me veux à la fin ?!

Mon cri s’échappe dans le petit matin bien malgré moi, mais il ne peut en être autrement. Je fulmine tant, chaque cellule de mon corps est comme électrisée. Qui est-elle ? À qui appartient cette voix insupportable logée sous mon crâne ? Si j’arrive à lui mettre la main dessus un jour…

Oh, mais c’est qu’on arrive enfin au cœur du sujet.

… je me ferais un plaisir de l’étriper.

Son petit rire me vrille la cervelle en réponse à ma pensée.

C’est ce que j’aime chez toi : cet esprit enfiévré prêt à tout détruire sur son passage.

Frisson. Comme si quelque chose venait de me frôler dans le dos. Puis, une sensation de froid sur le dessus de mes paupières. Insupportable. Comme si des doigts glacés les enjoignaient à se fermer.

Tu m’as demandé ce que je te voulais, n’est-ce pas ? Et bien, c’est une chose très simple.

Je cède. Ma vue est occultée.

Mais seulement pour un bref instant.

Ce que je veux, ma chère et trop tendre Solfiana, c’est que tu découvres enfin la vérité abjecte de ce monde.

Alors que la sensation désagréable s’efface, que je rouvre les yeux…

Et que tu le mettes à feu et à sang de tes propres mains.

C’est une scène de pure dévastation qui se déroule devant moi.

Je tousse, crache l’air vicié de mes poumons. La fumée recouvre tout autour de moi. Elle stagne, asphyxie la moindre trace de vie, ne pouvant s’échapper.

Comme dans une pièce confinée.

Mes yeux parcourent les environs. Des empilements de caisses et de marchandises. Des affiches d’instructions, des chariots. Ce n’est seulement qu’au moment même où un souffle brûlant me frappe au visage que je me rends tout à fait compte de l’endroit où je me trouve – ou, du moins, que je m’imagine être.

Les lieux de ma toute dernière mission de Trappeuse : l’entrepôt en flammes.

Comme s’il ne suffisait que de cette pensée pour le raviver, le feu embrase bientôt tous les endroits où mon regard se pose. Une nouvelle quinte de toux me secoue. Des larmes montent à mes yeux.

Un rire.

Des gloussements viennent recouvrir les crépitements du brasier. Lentement, ma tête se tourne dans leur direction. Et c’est là que je la vois.

Grande.

Athlétique.

D’une beauté masculine hypnotisante.

Ses cheveux frisés relevés en un chignon au-dessus de sa nuque, son uniforme de Trappeuse impeccable malgré les flammes qui l’encerclent.

De ses yeux moqueurs couleur de l’ambre, elle me toise.

Allie. La Allie dont j’ai tout oublié jusqu’à son nom.

Inconsciemment, ma main se tend vers elle, mon corps chancelant fait un pas dans sa direction. En vain. Le feu forme un mur nous séparant.

- Allie !

Silence.

Le brasier engloutit mon cri. Je ne peux que la fixer du regard, impuissante. La sueur collant mes cheveux sur mon front, l’air irrespirable brûler l’intérieur des poumons. Je ne peux que la regarder afficher son sourire toujours aussi narquois. Ma détresse ne semblant pas l’atteindre le moins du monde. Elle est là, juste devant moi. Immobile et pourtant si réel. Et si tout cela n’était qu’un mirage ? Si j’hallucinais tellement mon désir est fort de la retrouver ?

De retrouver qui j’étais avant d’oublier.

Au diable l’entrepôt qui part en fumée ! Je ne partirai pas avant d’avoir les réponses dont j’ai besoin. Alors, quand enfin celle que je commençais à prendre pour une illusion daigne bouger, je suis hypnotisée. Lentement, je suis sa main qui monte jusqu’à son visage. Certains doigts se plient, d’autres se déploient. Ils forment un signe reconnaissable d’entre tous. Celui du silence.


- Après ça, nos souvenirs ensemble ne seront rien de plus qu’un tas de poussière emporté par le vent.


- Ah !

J’empoigne ma tête entre mes mains. Mes dents grincent. Mal. J’ai… mal ! Mon cerveau pulse, pousse contre les parois de mon crâne, à l’arrière de mes yeux. Il brûle.

Il veut sortir.

Comme pour dévoiler au grand jour ce qu’il cache. Montrer au monde le secret qu’il renferme. Des flashs.

Une bougie.

Des mèches de cheveux portées à sa flamme, d’un noir et d’un blond entremelés.

Une odeur de brûlé.

Un sourire.

Moqueur.

- Ah !

Ça suffit ! Je veux que cette douleur cesse. Mes doigts agrippent violemment mes cheveux comme pour contrer la douleur par la douleur.


- Comme si nous n’avions jamais été sœurs, des parfaites inconnues.


La voix se répercute dans ma tête. Agresse mon esprit, met à vif mes nerfs. Désespérées, mes mains tentent de couvrir mes oreilles. Un goût métallique se répand dans ma bouche.


- Parce que nous avons chacune notre rôle à remplir dans cette histoire.


- ÇA SUFFIT !

Une onde.

De l’énergie qui se transmet de cellule en cellule jusqu’à sortir de mon corps sous la forme d’une vague.

Krrrr !

Le son du métal qui se tord et se brise.

- Ah !

Je reviens dans le présent.

Le froid qui me mord.

Le matin qui se lève.

Une inspiration étranglée.

À peine le temps de rouler sur le côté…

Boum !

… que le lampadaire s’écroule sur les pavés.

- Ah… ah…

Ma respiration est haletante. Je regarde horrifiée le meuble urbain qui vient de manquer de m’écraser. Brisé en deux, son pied défiguré comme après avoir pris un coup puissant.

Comme une lame de fond.

Tu ne peux pas échapper à ton destin…

Soudain, des lumières s’allument. Des lampes s’éclairent derrière les vitres des immeubles de part en part de la rue. Des cris paniqués, étouffés me parviennent, se propagent le long de l’artère.

Ils ne vont pas tarder à tous débarquer.

- Ah…

Précipitamment, je me relève, chancelle. Manque de peu de manger les pavés. Mais je me redresse. Et sans demander mon reste, je m’enfuis dans les rues encore sombres de Tarn.

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