Je l'ai remarqué bien avant qu'il ne me voit, cinq ans, cinq années d'attentes, à le croiser, le parler, l'observer. Au début, il n’était pour moi qu’une silhouette familière, mais bientôt, il est devenu un repère.

 La première année, il se faisait embêter par des plus grands. Je me souviens de ce jour précis où j’ai décidé d’aller lui parler. Pas pour être gentille par principe, mais parce que ça me paraissait insupportable qu’il soit seul dans ce moment-là. C’était comme un déclencheur. Ce jour-là, sans le savoir, il avait franchi une frontière dans mon esprit : il n’était plus “quelqu’un que je connaissais vaguement”, il était “lui”.

Et lui seul, mais je ne le savais pas encore.

 La deuxième année, il venait me donner des nouvelles d’une amie à moi qui n’allait pas bien. Il aimait quelqu’un, m’avait-il dit. Et moi, j’ai espéré, l’espace d’un instant, que ce soit moi. Mais non. Mon nom ne faisait pas battre son cœur à l’époque. Alors, je me suis tue.

 La troisième année, tout a changé. On est partis en voyage, avec un groupe. Je ne sais pas si c’était l’air du départ, ou juste le fait d’être ensemble en dehors du quotidien, mais il a commencé à me regarder autrement. Je ne le savais pas ! Et c’est à ce moment-là que, bien sûr, je me suis mise en couple avec quelqu’un d’autre. Mauvais timing, comme toujours.

 La quatrième année, j’étais toujours en couple, mais lui et moi… on se rapprochait. Il y avait ce lien invisible qui se retendait, ces regards qui voulaient dire plus que ce qu’on osait. Rien ne s’est passé, mais tout aurait pu. Je sentais la tension mais je préférais le déni et le respect pour mon partenaire.

 Puis, le silence. On s’est perdus de vue. Et quand on a reparlé, il aimait quelqu’un d’autre. Moi, je l’aimais toujours. Je me disais que c’était trop tard, que ce chapitre n’avait jamais été écrit pour moi. Que je devais oublié mais je ne pouvais pas... C'était plus fort que moi, j'étais attirée comme un aimant.

Et puis pas si longtemps après, on s'est revu en face à face, et là il a comprit. Il m'aimait (enfin). On s'est mis ensemble malgré les remarques de nos amis, les regards etc.

Il était là quand je me suis fait harceler, en pilier, présent et solide. Ce n'était pas juste ce garçon que j'avais remarqué dans une cours, NON. C'était celui qui m'avait tendu la main quand je tremblais.

Cinq ans.

Cinq ans pour que deux chemins qui se frôlaient, se rejoignent enfin.