Comme presque tous les jours, je vis dans un autre monde. Je rêve de jours meilleurs en oubliant mon passé. Pourtant, il y a ces périodes difficiles où tout me revient comme un big bang. Je ne suis alors plus que le reflet de l'étrange être que je suis. Le monde m'est étranger, je me suis étrangère. Je me cherche sans découvrir de nouvelles facettes de ma personne. Je ne sais pas ce que je veux, je ne sais plus ce que j'aime. C'est des choses qui arrivent, le monde m'ennuie et je ne sais que faire. Alors j'écris, je chante mes mots sur du papier pour composer un monde selon mes règles, un monde qui me correspond. Qui est à mon image.

C'est ce qu'on pourrait appeler une vie tranquille, de tout repos, mais il se passe tellement d'aventures dans mon monde que je ne peux pas saisir la réalité à temps plein. Et pourtant, ces dernières semaines, il s'y passait davantage de choses passionnantes que dans mon monde. Je ne maîtrise plus le jeu, je ne suis plus maîtresse de mon jeu à double tranchant. Quitte ou double : rester dans mon monde ou retourner dans la réalité. Pas de juste milieu qui s'annonce à l'horizon. Ce serait comme gagner et perdre à la fois une partie de cartes endiablée. Il n'en est pas question. Mon jeu à moi, c'est le jeu des illusions. J'aime rêver, me perdre dans mes songes. Mais à présent que j'ai découvert le monde de la réalité, que je commence à comprendre ces nouvelles règles, revenir dans mon monde est une nouvelle épreuve. Tant de différences à combler, de blessures à raviver pour s'adapter. Ce n'est qu'un jeu de cartes, la donne est mauvaise mais ce n'est pas pour autant que la partie est perdue. Tout est question de stratégie, de logique. Et de chance.

On me dit bleu, je réponds rouge. On me dit rouge, ça devient jaune. Le jaune annoncé se transforme en vert. Le vert se métamorphose en bleu. Je change les règles d'un claquement de doigts selon mes envies. Je n'ai pas peur de faire des détours, de retourner en arrière. Seulement pour mieux me projeter vers le dénommé "futur". Je ne veux pas faire marche arrière, sinon ce serait mettre en lumière toutes mes erreurs, mes faiblesses qui jonchent le tapis, à l'ombre de mes ambitions. Et pourtant, je sais que nos faiblesses peuvent devenir nos forces. Qu'on tire des leçons de chaque erreur, et que cela nous fait grandir. Mais je ne veux pas grandir. Je veux juste profiter, m'amuser avec tout le monde.

Et on inverse le sens de la trajectoire. Pendant une période, aligner rêves et réalité avait été possible même si l'équilibre avait été difficile à trouver. Mais je n'avais pas le choix, tenir le coup pour assumer mes responsabilités. Faire comme si de rien n'était, ne pas montrer mon univers. Me renfermer à toutes les offensives. Et on relance la partie.