Scène XIV

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La demeure de M. Jean Valjean était une belle maison, située rue Plumet. Il vivait seul depuis le mariage de sa fille avec Marius Gillenormand. Cent fois, sa fille avait demandé à ce qu'il vienne vivre avec eux mais le vieil homme avait toujours décliné.

Il devait y avoir une raison, songea Valjean.

Au XIXe siècle, il était un forçat évadé, qu'était-il au XXIe siècle ? Un prisonnier ? Un voleur ? Il devait y avoir une raison pour refuser de rester avec sa chère fille. Il allait falloir la trouver.

La voiture se retrouva garée dans la petite cour intérieure de la maison. Cosette prit les devants et ouvrit la porte, entrant aussitôt dans la maison de son père, comme si elle était chez elle. Valjean la suivait, un peu méfiant.

La maison était simple, un peu vétuste mais très bien entretenue. La décoration se résumait à des cadres de photographies de sa fille. Parfois de lui-même. Et quelques tableaux de paysages. Valjean aperçut avec stupeur un paysage de Montreuil-sur-Mer. Il reconnut les remparts.

Cosette se plaça près de lui et lui dit en souriant :

« Elle est toujours aussi belle la ville de maman, non ?

- Ta maman est à Montreuil ?

- Papa ! Tu dois subir le décalage horaire ! J'espère que toi et M. Javert vous allez vous coucher tôt !

- Elle est à Montreuil ?, répéta Valjean, un peu plus fermement.

- Bien sûr papa. Elle est enterrée dans le cimetière de la ville depuis douze ans maintenant.

- Pardonne-moi ma chérie. »

Cette fois, Cosette était inquiète, elle caressa la barbe de son père puis le front.

« Tu as mal papa ? Tu te remets à peine de ton AVC. Comment vas-tu ?

- Je suis juste fatigué, c'est vrai. »

Cosette lui embrassa le front et s'écria :

« Je vais trouver de quoi vous nourrir les hommes et nous allons vous laisser vous reposer. Nous nous verrons demain au déjeuner. Vous viendrez Javert et toi. »

Puis comme si une idée lui venait tout à coup, la jeune femme se tourna vers l'impressionnant policier et lui demanda dans un sourire rayonnant :

« Comment vous appelez-vous au fait ? Je ne vais pas vous appeler Javert tout le temps !

- Fraco, répondit simplement Javert.

- Un prénom gitan ?! Il est magnifique ! Maintenant vous allez manger les hommes ! »

Et Cosette disparut dans la cuisine, accompagnée par Marius, laissant Javert et Valjean seuls dans le salon, les bagages à leurs pieds. Valjean se laissa choir sur le canapé présent, moelleux à souhait, Javert l'imita et se retrouva à ses côtés.

« Votre fille est aussi bavarde qu'Azelma, constata Javert.

- Il semblerait.

- Avez-vous de la bière ? Ou quelque chose de plus fort ?

- Je l'ignore, répondit Valjean sans réfléchir...avant de se reprendre et de se lever. Certainement, dans le meuble là-bas. »

Un meuble bas, peut-être contenait-il de l'alcool ? Ce ne fut que dans le troisième meuble, une sorte de bibliothèque avec des livres étranges, plats et sans pages, que Valjean découvrit des bouteilles. Il prit du whisky et deux verres.

Cela plut à Javert qui le remercia avec empressement.

Le policier avait été surpris par le manège du Français, fouillant les meubles comme s'il n'était pas chez lui, cherchant avec soin ce qu'il aurait du trouver aussitôt. Mais il ne releva pas. L'homme revenait d'un accident cardio-vasculaire, manifestement, peut-être avait-il été assez grave et des séquelles lui en restaient ? Il fallait donc être prudent et attentionné. Javert se promit de l'être, surtout après que Valjean soit revenu s'asseoir à ses côtés et que leurs mains se soient à nouveau frôlées en s'échangeant des verres. Délicieux frissons. Javert était intéressé par davantage.

Se saouler et baiser ! Le policier était tout à fait d'accord avec ce programme. Et s'il avait bien saisi le message, lui et le beau Frenchie étaient sur la même longueur d'onde. Enfin !

« Où vais-je dormir ?, demanda insidieusement Javert, alors que le whisky réchauffait ses tripes. Un très bon whisky.

- Heu, fit Valjean, rougissant délicieusement. Le whisky le réchauffait aussi. Il doit y avoir une chambre d'ami.

- Tu me montreras après.

- Bien entendu. »

Le tutoiement était là. Javert connaissait très bien le français et ses règles. Valjean se laissa tutoyer. Il laissa aussi la main de Javert se glisser sur son genou. L'alcool ne faisait pas tout mais il aidait beaucoup à se détendre.

« Bien entendu, » répéta Javert, la voix soyeuse.

Cosette revint bientôt, suivie toujours par Marius. La main avait disparu. Les quatre personnes mangèrent un simple repas de pâtes couvertes de sauce tomate avec des boulettes de viande. Un repas consistant, agrémenté de limonade et de conversation. Valjean posa quelques questions à Cosette, comme s'il voulait se rappeler des moments du passé. Il évoquait telle ou telle photographie exposée au mur et Cosette se perdait dans des anecdotes sans fin, riant de ses souvenirs.

« Ma première promenade à cheval ! Tu étais si fier papa ! »

« Vous auriez du voir papa, M. Javert...Fraco... Il m'a fait danser le soir de mes dix-huit ans pour un concours auquel je l'ai forcé à participer et nous avons gagné le premier prix ! Tout le monde était jaloux ! »

Puis ce fut un café pris sur la promesse de se voir le lendemain...et enfin un au revoir.

La porte se referma et les deux hommes se retrouvèrent seuls. Javert se rapprocha de Valjean et murmura doucement :

« Maintenant, tu me montres ?

- Viens..., » souffla Valjean.

Un sourire tandis que le vieux forçat quittait le salon, Javert sur ses talons. Ils se retrouvèrent dans un couloir devant un escalier. Ils le montèrent et arrivèrent sur un petit palier. Javert tenait son sac et la valise de Valjean. Il regardait l'homme un peu perdu ouvrir les portes les unes après les autres.

Un placard à balais, une salle de bain, une chambre... Sa chambre... Valjean le sut à l'instant. Il le sut en voyant les chandeliers en argent posés sur le chambranle de la cheminée. Il entra lentement dans la pièce, oubliant qui le suivait. Il ne s'en souvint que lorsqu'il entendit les bagages tomber à terre et la porte se fermer dans son dos. Une bouche se posa ensuite sur sa nuque, embrassant doucement.

Il fallait être doux, prudent, attentionné. Javert savait l'être, même s'il n'était pas réputé pour être un amant paisible aux dires de ses rares conquêtes.

« Ta chambre ? Tu me permets de dormir avec toi ?

- Tu l'as déjà fait, je crois, murmura Valjean, haletant un peu lorsque la bouche trouva sa carotide et que des dents la mordirent un peu.

- Juste, rétorqua Javert. Mais c'était en tout bien, tout honneur. J'ai dans l'esprit quelque chose de totalement différent. Si tu le souhaites... »

Valjean sourit et s'échappa de l'étreinte du policier. Le souhaitait-il ? Il était troublé, certes, mais la sodomie était un péché. Javert le regarda faire et son sourire devint plus incertain.

« Bien. Je vais vous laisser vous reposer M. Valjean. Nous verrons demain ce fameux Paris.

- Non. Attends ! »

Javert s'était déjà éloigné. Devant le rappel de Valjean, il se tourna pour regarder le vieux Français, patient.

« Je souhaiterais que tu restes. Mais... Mais je ne sais pas... Je n'ai jamais... »

Valjean baissa la tête, rougissant de honte. Javert était un peu surpris par un tel aveu. Un homme de cet âge, aussi beau et encore vierge ? Impossible ! Javert se rapprocha doucement et glissa ses doigts sous le menton de l'homme. Valjean était plus petit que lui. Il le força à lever les yeux et à le regarder. Il baissa ensuite la tête et posa ses lèvres sur les siennes. Un doux baiser.

« Tu n'as qu'à me dire ce que tu désires...

- Je ne sais pas, souffla Valjean.

- Alors laisse-moi m'occuper de toi. »

Un nouveau baiser doux, qui devint vite affamé lorsque Javert força la bouche de Valjean à s'ouvrir pour laisser passer sa langue. Une lente exploration de la bouche de l'autre, un ballet sensuel entre deux langues. Valjean sentait ses jambes céder sous lui, il fallut le bras, fort et protecteur, du policier pour le retenir de tomber.

Doucement, sa bouche ne quittant pas celle de Valjean, Javert les entraîna jusqu'au lit. Doucement, toujours, il fit s'étendre le Frenchie et se plaça au-dessus de lui.

Là, dans la nuit de sa chambre, perdu dans l'odeur de l'homme, Valjean fermait les yeux et pouvait se remémorer son inspecteur Javert. Il se souvenait de ses favoris, de ses longs cheveux noirs, devenant grisonnants avec l'âge, de sa voix profonde et grave. Le Javert du XXIe siècle avait la même voix à-travers les âges et cela avait de drôles d'effets sur Valjean. Il se sentait dériver. Aurait-il pu avoir cela au XIXe siècle ?

Une bouche l'embrassait avec force, puis glissait le long de sa mâchoire, tandis que des doigts habiles lui défaisaient la cravate, les boutons de sa chemise... Il entendait quelqu'un gémir fort dans la pièce avant de comprendre que c'était lui.

« Putain, murmura le policier. Tu es magnifique... Jean... »

Les mains avaient terminé d'ouvrir la chemise et parcouraient les muscles encore bien formés du torse, du ventre.

Valjean était bien trop perdu dans ces sensations pour pouvoir répondre. Javert se recula tout à coup, content d'entendre un petit bruit de déception sortir de son compagnon.

« Les chaussures, monsieur le philanthrope ! Il est hors de question de baiser avec des chaussures et des chaussettes ! Question de principe ! »

Un nouveau rire et Javert retira soigneusement ses chaussures. Valjean mit plus de temps à se reprendre. Le policier riait toujours en saisissant la jambe de Valjean.

« Fort bien, monsieur ! Je vais jouer votre majordome ! »

Il défit les lacets et les chaussures tombèrent sur le sol, suivies par les chaussettes. Javert saisit les pieds et se mit à les masser tendrement. Il ne voulait pas brusquer sa belle proie.

« Redressez-vous, monsieur. Il faut enlever vos vêtements !

- Fraco...

- Mhmm ?

- Et toi ?

- Désires-tu me voir Jean ?

- Oui.

- A tes ordres ! »

Javert se redressa et lentement, en ne quittant pas un seul instant les yeux de Valjean, il se déshabilla. Il voyait l'appréhension dans l'azur de son compagnon mais il voyait aussi le désir monter, et cela le rassurait. Javert prenait son temps, retirant méticuleusement sa chemise, son pantalon, dévoilant son corps fin, son torse couvert d'un épais tapis de poils noirs, de longues jambes musclées, fermes. Le bandage entourant son bras était visible, propre et bien placé. Javert s'en était chargé manifestement. Le blanc des pansements ressortait sur la couleur bronzée de la peau.

Valjean ne savait pas où placer ses yeux, il examinait, regardait et...admirait... Cela fit naître un sourire amusé sur les lèvres du policier.

Une fois presque nu, Javert se replaça sur le matelas et poursuivit le déshabillage du beau Frenchie. Valjean était resté gelé, bien incapable de se dévêtir, tellement incertain de ce qu'il devait faire.

Il ne fallut que quelques minutes pour se retrouver totalement nus, hormis les sous-vêtements. Mais ils ne cachaient pas entièrement l'excitation qui les prenait. Javert eut un sourire appréciateur en regardant le renflement assez conséquent de son compagnon.

« Une belle bite, je me dois d'avouer ! »

Le rougissement était si intense. Il fit rire Javert. Il s'étendit à nouveau sur le lit, près de son compagnon et reprit ses lèvres.

Valjean répondit avec empressement, murmurant avec ravissement :

« Javert...

- Fraco..., » rétorqua la voix soyeuse de l'inspecteur.

Les baisers se poursuivaient mais les mains se mirent de la partie. Se cherchant, se caressant, se tâtant. Les sous-vêtements furent enfin retirés et les érections entrèrent en contact. Valjean gémit fort lorsque les doigts habiles de Javert se glissèrent sur son entrejambe pour le caresser profondément. Une bouche se positionna dans son cou, embrassant sa mâchoire.

« Veux-tu me laisser le contrôle, Jean ?

- Que puis-je faire pour t'en empêcher ?

- Juste dire non...

- Oui... »

Valjean sentit un sourire se former sur les lèvres de Javert alors que l'homme descendait le long de son torse. Mordillant un mamelon. Embrassant le ventre. Enfin, une main lui fit écarter fermement les cuisses. Javert laissa sa langue glisser sur l'intérieur des cuisses de Valjean, parsemant le chemin de baisers.

Valjean gémissait déjà.

Il n'avait jamais connu cela.

Aurait-il pu le connaître avec l'inspecteur Javert ?

Javert était enchanté de l'entendre autant réagir. Il avait toujours aimé les amants bruyants et savait être un tacticien sous les draps. On l'avait toujours félicité pour son habileté à faire des fellations. Il avait hâte d'entendre le beau Frenchie gémir son nom.

Et il ne fut pas déçu.

La première touche, le premier coup de langue eut raison de la volonté de Jean Valjean. Il se cambra et ferma les yeux, murmurant « Javert » doucement. Il cria fort lorsque Javert fit preuve de toute son habileté en glissant le sexe complètement dans sa gorge, sachant positionner sa langue afin de se retrouver le nez dans les poils pubiens de l'homme.

« Dieu..., souffla Valjean. Ne t'arrête pas ! Je t'en prie ! »

Le rire que poussa Javert fit frissonner Valjean, un courant d'air sur sa bite surexcitée. Le policier reprit sa tâche avec ardeur après avoir sucé les couilles bien lourdes de son compagnon. En appréciant l'odeur de musc, le goût typiquement masculin. Putain ! Cela lui avait manqué ! Son dernier petit-ami l'avait quitté non pas parce que le sexe n'était pas satisfaisant mais parce que Javert était le plus souvent aux abonnés absents, entièrement dévoué à son travail et oubliant l'homme avec qui il partageait sa vie. Oui, cela lui avait manqué. Un homme dans son lit, baiser, donner du plaisir, en recevoir...

Il continua de plus belle et soudain le Frenchie sembla désespéré.

« Dieu ! Je vais... Javert... Je vais venir... »

La question ne se posait donc pas. Le Frenchie voulait venir ainsi, soit. Javert ressentit une petite déception, il aurait bien aimé sentir cette belle bite le prendre avec ardeur. Peut-être le lendemain ?

Si Valjean n'avait réellement jamais connu l'amour, il ne devait pas être prêt à sauter le pas. Javert continua donc à lécher le sexe, le suçant durement, accélérant le rythme et soudainement, il sentit le sperme inonder sa gorge tandis que Valjean criait son nom.

C'était un peu surprenant que Valjean l'appelle sans cesse par son nom de famille et non son prénom..., mais ce n'était pas le moment de soulever le sujet.

Pas lorsqu'un si bel homme jouissait entre ses mains.

Enfin, Valjean se reprit. Javert avait léché avec soin toute trace de ce qui s'était passé. Sa propre bite lui faisait mal tellement elle était dure... Il savait qu'il allait devoir s'en charger lui-même.

Valjean n'était clairement pas prêt à cela. L'homme se remettait de son plaisir lentement, le regardant avec des yeux surpris...heureux...

Cela suffit pour permettre à Javert de se branler pour se faire venir à son tour. Il se mit à genoux, les jambes écartées sur le lit, le regard posé sur Valjean, encore essoufflé par son orgasme. Et la main de Javert saisit son sexe rouge et droit comme un i afin de le caresser avec soin, dans un rythme déjà rapide.

Valjean le contemplait, curieux. Un peu étonné aussi.

Si Javert avait su les pensées qui se perdaient dans l'esprit de son compagnon, il aurait quitté aussitôt la chambre. Valjean pensait à Toulon, au bagne, à ses camarades forçats jouant cette scène en imaginant des femmes là où il n'y avait que des hommes. Il revoyait les garde-chiourmes punir sévèrement ces hommes dépravés qui se touchaient ainsi. Javert le premier, manipulant sa matraque avec brutalité. Et là...

Javert se caressant, se touchant, se branlant, gémissant tandis que le plaisir montait haut, haut...pour enfin exploser dans un nuage blanc...

« Viens, » murmura Valjean en ouvrant les bras.

Javert n'obéit qu'après avoir saisi sa chemise pour se nettoyer le ventre.

« Attends quelques minutes !, » lança le policier.

Et Javert se leva prestement. Il quitta la chambre, nu comme un ver. Valjean fut un peu décontenancé mais le bruit de l'eau coulant dans la douche lui fit comprendre ce qu'il se passait. Quelques minutes seulement et Javert revenait et s'étendait contre lui.

« Dieu ! Tu es gelé !, s'écria Valjean en sentant le corps glacé de son compagnon contre lui.

- Pas eu envie d'attendre que l'eau chauffe.

- Je vais devoir te réchauffer, fit Valjean, d'une voix douce, se voulant séducteur.

- Je ne serais pas contre, rétorqua Javert en riant. Mais il faudra attendre un peu pour le deuxième round, je suis fatigué et plus tout jeune.

- C'est à moi que tu dis cela ?! »

Un petit rire amusé. Oui, ils étaient épuisés, et par le voyage, et par l'heure tardive de coucher, et par la tension des derniers jours...et par les relations sexuelles qu'ils venaient d'avoir... Mais c'était une bonne fatigue...

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