Chapitre 30 - La 2CV Citroën

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Paul ouvre les yeux. Tout est flou devant lui. Quelques battements de paupières. Sa vision s’améliore. Devant lui, Tom est allongé, les yeux mis clos. Une traînée de sang sort de sa bouche. Paul ne peut pas bouger d’un centimètre, les mains liées dans le dos. Il crie. Aucun son ne sort. Tom articule des paroles qu’il ne comprend pas. Son corps désarticulé est parcouru de frissons. Soudain, Marc apparaît devant le corps inerte de Tom. Paul le regarde lui parler. Il crie de nouveau. Le pied de Marc écrase la tête de Tom. Paul hurle à s’en rompre les cordes vocales. Il ferme les yeux et implore Marc d’arrêter.

Paul sursauta. Transpiration abondante. Souffle court. Il ouvrit les yeux. Quel affreux cauchemar! A côté de lui, il entendait les respirations régulières de Tom qui dormait profondément. Il resta allongé, terrorisé. Il essaya d’évacuer les terribles images qui passaient en boucle dans sa tête. Il ralentit sa respiration pour se calmer, diminua son rythme cardiaque. Epuisé de fatigue, il sombra dans le sommeil.

Lorsqu’il se réveilla, il se crut un instant dans son lit. Fatigue. Léger trouble. Mais il s’aperçut que c’était celui d’un autre, celui de Tom. Il sourit. C’était la première fois qu’il passait la nuit chez quelqu’un avec qui il avait couché. L’odeur différente des draps. La lumière rassurante sous la porte de la chambre. Tom était déjà levé. Il l’entendait parler dans la cuisine. Il se leva, trouva son caleçon au pied du lit. Il l’enfila et ouvrit la porte. Tom lui sourit, le combiné de téléphone à l’oreille.

- Ok, merci papa, je passe tout à l’heure. Bisous.

Tom prit Paul dans ses bras, l’embrassa, toucha son entrejambe et lui demanda s’il avait passé une bonne nuit. Paul lui sourit en hochant la tête. L’odeur du café lui avait ouvert l’appétit. Il se laissa servir, sans rien dire, avec le plaisir de regarder Tom en caleçon, préparer le petit déjeuner. Sur chaque set de table, une serviette en tissu, une petite assiette, un verre de jus d'orange pressé. Au milieu, une panière de tartines grillées et une motte de beurre salé dans une petite soucoupe.

- Je suis si heureux que tu sois là, j’ai vraiment cru que cela n’arriverait plus jamais” dit-il, avec des yeux brillants.

- Moi aussi, je suis content. Je réalise pas trop tout ce qui s’est passé…, dit-il, un morceau de tartine beurrée dans la bouche.

Ils se sourirent, sans rien ajouter et chacun but son café. Tom indiqua, d’un signe de la tête, la porte de la salle de bain située derrière lui.

- Le temps que tu prennes ta douche, je fais nos valises. Je pars faire une course et je reviens, dit-il comme si de rien n’était.

- Nos valises ? Et les cours ?

- Quels cours ? Allez, pour une fois on s’en fout. T’as laissé des vêtements chez moi, non? Et puis je te prêterais des fringues. Nous n’aurons pas à repasser chez toi.

Ne pas réfléchir davantage et se laisser porter. Paul termina sa tasse de café avant d’enlever son caleçon. Il secoua les fesses devant lui.

- Tu ne perds rien pour attendre toi!” dit Tom, hilare.

Paul sauta dans la cabine de douche et profita de la chaleur de l’eau pour se réveiller complètement. Il entendit la porte de l’appartement claquer, signe que Tom était sorti. Il laissa longuement couler l’eau sur son corps, avant de se laver soigneusement, les cheveux aussi. En sortant, il prit une serviette pour s’essuyer. Était-ce bien à lui que tout ça arrivait? Il était excité. L’inconnu. L’envie de rester avec ce garçon et de l’avoir rien qu’à lui. Il se regarda dans le miroir, s’essuya, respira l’odeur de lessive qui se dégageait de la serviette de bain. Il ouvrit le petit placard vitré, suspendu au-dessus du lavabo. Un savon, une eau de toilette verveine-menthe, un coupe ongles, une boîte de préservatifs, un bracelet multicolore, un peigne, quelques boîtes de médicaments. Il referma le meuble, l’essuya et vit sourire radieux malgré sa tête fatiguée. Il se brossa les dents, la serviette autour de la taille et alla dans la chambre pour récupérer ses vêtements. A la vue de la chemise tachée de sang, il s’arrêta net. Il se revit au Petit Marcel, assis en face de Tom. Et par terre, dans la cabine téléphonique, recevant des coups de poing. Il chassa les images de son esprit. Il décida de jeter sa chemise à la poubelle. Il était complètement fou d’être ici. Mais aussi très impatient de rejoindre Tom. Il lui avait laissé un t-shirt et un pull de rechange. Il finit de se préparer tranquillement. Il fit la vaisselle, nettoya la table, prit un soin tout particulier à remettre chaque chose à sa place.

Tom conduisait avec prudence la 2CV Citroën dans les rues étroites du centre-ville. La voiture stationna à cheval sur le trottoir, devant le Petit Marcel.

- Ne bouge pas, je reviens tout de suite !

Paul l’aperçut à travers les vitres carrées du café, s’approcher du comptoir. Lucas lui donnait un objet qu’il ne distinguait pas d’où il était. Tom ressortit en toute hâte, reprit le volant, prêt à partir.

- C’est bon, j’ai les clefs, c’est parti ! Et pas la peine de me demander où on va ! annonça-t-il fièrement.

Lucas toqua à la vitre. Paul en souleva une moitié pour l’entendre.

- Salut Paul ! Alors surprise ? Tom, tu diras à Alphonse qu’il a fait un super boulot sur sa voiture. Elle est flambant neuve, dis-moi ! Bon voyage, les amoureux. A demain soir pour le compte-rendu détaillé !

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