Chapitre 10 (2) - On the road

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Paul commençait sérieusement à douter de lui. Ses révisions l’obsédaient. Elles n’avançaient pas comme prévu. Impossible de faire entrer quoique ce soit dans son cerveau. Était-il en train d’étouffer chez lui malgré la bienveillance de sa famille ? Comment pouvait-il passer dix jours chez ses parents sans péter un câble ? Plutôt mourir, lui aurait dit Tristan, sans hésiter à propos des siens. Pourtant, il ne pouvait absolument pas se plaindre. Il était reconnaissant de toutes les petites attentions qu’ils avaient eues avec lui afin qu’il passe le plus agréable et le plus douillet des séjours. Contrairement à ce qu’il avait imaginé, sa mère, malgré son regard soucieux des premiers jours après son arrivée, ne l’avait pas pressé de questions comme elle avait pu le faire au téléphone les premières semaines de son emménagement. Elle lui avait donné des nouvelles des membres de l’association de quartier, dans laquelle elle s'était engagée à la rentrée scolaire. C’était une femme sociable et entreprenante qui débordait d’énergie dès qu’il s’agissait d’organiser une sortie ou de recevoir des amis. “Entre mon travail au laboratoire d’analyses, les devoirs de ta soeur, et mon association, je n’ai plus une minute à moi” lui avait-elle répété. Son père, de nature plus posée, s’était gentiment plaint auprès de son fils que, lui parti, il subissait la tyrannie de ses deux petites femmes. D’où l’obligation pour lui d’avoir repris son adhésion à son club de tarots, le jeudi soir. Paul avait été rassuré de voir que la vie de sa famille continuait au mieux. Non, décidément, son esprit était ailleurs. Après tout, les vacances étaient aussi faites pour se reposer lui avait rappelé sa mère. Une vraie coupure lui ferait le plus grand bien. Autant se l’appliquer dès aujourd’hui et surtout sans culpabiliser.

Le déjeuner se déroula dans une ambiance légère. Ariane raconta ses dernières aventures rocambolesques avec son nouveau groupe de copines. Paul rit de bon cœur, avec une certaine bonne humeur retrouvée, le temps du repas. Sa mère avait spécialement fait une tarte aux pommes, celle dont il raffolait. Il attendit qu’elle lui apporte son café et lui demanda si, demain, elle ou son père pourrait le conduire à la gare pour prendre le train de la mi-journée. Sa mère se crispa quelques secondes mais ne montra pas sa déception. Son père continua à boire son café tranquillement. Il le déposerait à la gare et en profiterait pour passer faire des courses par la même occasion. Paul les remercia. Il termina son café, se leva mais avant de quitter la table, il leur proposa d’aller faire une promenade en forêt, le lendemain matin, comme ils avaient l’habitude de le faire, le dimanche, quand il était au lycée. Sa mère retrouva son sourire. Arrivé dans sa chambre, il commença à faire sa valise et rajouta, dans son sac à dos le roman que lui avaient offert ses parents : Sur la route de Jack kérouac. Son professeur de français de terminale lui en avait conseillé la lecture en fin d’année scolaire. Il lui avait avoué que ce livre lui avait donné le goût de la liberté. En ouvrant son cadeau, le matin de Noël, Paul avait été ému. Ses parents s’en étaient donc souvenus! Il leur en avait parlé au début de l’été. Il passa l'après-midi en famille autour d'une partie de monopoly (où il perdit lamentablement) avant d'honorer la promesse faite à sa sœur.

Pour sa dernière soirée à la maison, il lui avait juré de la passer en tête à tête, entre frère et sœur. Il lui fit la surprise de l'emmener dîner à la pizzeria du village. Leur père les déposa en les informant qu'il reviendrait les chercher deux heures plus tard. Ariane était heureuse et toute fière d'avoir son grand frère pour elle toute seule. Ils passèrent commande, leur traditionnelle pizza quatre fromages qui fut à la hauteur de leur attente. Après s'être plaint gentiment de leurs parents, Ariane bombarda son frère de questions sur sa nouvelle vie d'étudiant qu'elle n'avait pas osé poser devant eux. Alors tu sors souvent le soir ? T'as rencontré des filles ? T'as couché avec ? T'as déjà fumé un pétard ? À moi, tu peux me dire ce qui s'est passé avant que tu arrives, j'y crois pas une seconde à ton histoire de réverbère que tu t'es pris en pleine figure. Paul se prêta au jeu de lui répondre le plus sincèrement possible hormis pour son agression qu'il était hors de question d'aborder avec elle. Il en était surtout incapable. Malgré sa déception de réaliser que son frère avait une vie d'étudiant des plus banales, elle semblait véritablement l'écouter et heureuse pour lui. Il réalisa à ce moment-là, dans son attitude, qu'elle avait vraiment changé. Pourtant cela ne faisait que trois mois qu'ils s'étaient vus. D'un côté, elle restait l'adolescente qu'il connaissait avec ses crises et ce côté incontrôlable et d'un autre côté, son regard semblait plus mature. Il s'étonna de se livrer à elle plus qu'il ne l'aurait imaginé en lui racontant sa rencontre avec Tom. Il lui avoua qu'il pensait s'être fait un nouvel ami alors qu'il ne le connaissait pas. Cette rencontre l'avait bouleversé et le remplissait de joie. Il avait rougit quand il lui avait parlé de certains clients du Petit Marcel. Arianne fut captivée devant ce qu'elle considérait être de vraies révélations. Surtout elle y décela les hésitations inédites d'un frère qu'elle croyait connaître par cœur. Elle le regardait intensément comme si elle comprenait parfaitement ses sentiments sans qu'il ait à en dire davantage. T'as de la chance, ça doit être merveilleux de se sentir compris et à l'aise avec un inconnu lui avoua t-elle. Paul ne s'attendait pas à une telle réponse de sa part et en fut totalement troublé. Ému, il lui rendit son sourire en lui ébouriffant les cheveux. Aussitôt elle se dégagea vivement, il lui avait défait sa coiffure. Paul ne put s'empêcher d' avoir un grand fou rire. Il continua à se moquer d'elle en l'imitant se recoiffer. Elle s'apprêtait à se mettre en colère mais elle céda elle aussi à un éclat de rire.

Une fois de retour à la maison, Paul tomba rapidement de sommeil. Inutile de lutter plus longtemps. Il se mit en pyjama et se coucha. Il s’endormit tout de suite.

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