2 - TISSER
Lydie fixait les femmes en train de tisser. Les fils de couleur se mélangeaient rapidement, faisant grandir sous ses yeux les panchos.
“ Eh ferme la bouche et on y va ! L’excursion continue.
_ Ces femmes…
_ Quoi ? Tu es devenue une passionnée de travaux manuels ?
_ C’est tellement beau…
_ Oui c’est vrai. Les couleurs sont éclatantes. On peut s’en acheter si tu veux. Mais il faut faire vite ; le groupe repart.
_ Non ce n’est pas ça. Ça me rappelle juste… Ça va te paraître dingue mais j’ai cette impression de déjà-vu. “
Il faut que vous sachiez que Lydie n’était pas le genre de femme mystique qui voyait des signes dans chaque hasard de la vie. C’était une baroudeuse qui voulait découvrir les beautés du monde et vivre des sensations fortes.
Alors vous comprendrez que je ne me suis pas inquiétée de ses “drôles de sensations” devant ses femmes. J’ai dû la traîner pour que nous ne soyons pas distancées par le groupe mais sur le moment, cela m’a paru drôle, le genre d’anecdotes croustillantes qu’on raconte à ses proches en rentrant.
Le lendemain, 7h30 devant notre hôtel. Tout le groupe me fusillait du regard pendant que je discutais avec le guide. Leur colère était palpable.
“Écoutez, je vais rester ici pour m’occuper de sa recherche avec la police. Allez-y, continuez avec le groupe !
_ Mais nous partons à cent kilomètres d’ici. Comment nous rejoindrez-vous ? Je ne peux pas laisser des vacanciers en cours de circuit; je risque de perdre mon travail !
_ Je leur expliquerai. Je peux leur expliquer tout de suite si vous voulez. Partez je vous en supplie, ne retardez pas plus le voyage pour nous !
_ Je ne sais pas si je peux faire ça. Vous ne parlez même pas bien espagnol.
_ Je me débrouillerai, je vous assure. Partez, partez !
_ Je ne sais pas…”
J'étais à deux doigts de lui hurler dessus parce que je voyais bien que si notre discussion continuait encore, les autres vacanciers laisseraient libre court à leur colère. Après tout, Lydie voyageait avec moi et Lydie avait disparu depuis ce matin. Non, elle était partie “se balader” d’après le mot qu’elle nous avait laissé.
Le guide s’éloigna pour passer un appel. Un des vacanciers s’approcha de moi et ce que j’avais tant redouté se produisit. Tous s’en prirent à moi comme si j'étais responsable de sa fuite et du retard qu’elle occasionnait pour eux. Ce fut le guide qui calma les esprits en annonçant le départ.
“Un ami à moi, il est guide aussi, va venir. Il vous aidera. Avec la police et pour nous rejoindre à la prochaine étape.
_ Merci.
_Je compte sur vous. Si vous n’êtes pas avec nous ce soir, je devrais avertir l’agence et je ne sais pas ce qu’ils décideront.
_ Ne vous inquiétez pas, ils préféreront que nous arrêtions le circuit plutôt qu’arrêter tout le circuit. Cela coûterait trop cher.”
Il me sourit et me serra la main. Moi aussi j’espérais que Lydie et moi serions au rendez-vous ce soir-là.
Comme vous le savez, ce ne fut pas le cas. La police parlait de recherches mais disait que cela pouvait prendre du temps. Ils devaient aussi envoyer des hommes dans le village que nous avions visité la veille pour interroger tous ceux que nous avions croisés.
L’ami du guide me pressait pour prendre la route. J'étais déboussolée : je ne comprenais pas ce qui avait poussé Lydie à agir ainsi et en même temps je voulais retrouver le confort et la sécurité du circuit organisé.
“Il va perdre son travail si vous faites ça. Venez, la police nous tiendra au courant.
_ Je ne peux pas la laisser. C’est…
_ Votre femme?
_ Non ! C’est une amie et on ne laisse pas ses amis tout seuls dans un pays étranger.
_ Allons rejoindre Francisco et nous verrons demain ! Peut-être que vous pourrez revenir ici !
_ Refaire cent kilomètres dans l’autre sens ? Mais ça n’a pas de sens !”
L’homme soupira bruyamment. Francisco lui avait demandé de faire quelque chose et je lui mettais des bâtons dans les roues.
“Il va perdre son travail.
_ Vous me l’avez déjà dit. Et je vous ai dit que j’ai envoyé un email à l’agence pour leur expliquer la situation. Tout est ok.”
Tout n'était pas ok mais je ne pouvais pas partir. J’ai donc passé une nuit supplémentaire sur place.
Il faut que vous sachiez que je ne suis pas le genre de femme mystique qui voit des signes dans chaque hasard de la vie. Je ne suis pas non plus une baroudeuse mais je suis pragmatique et douée pour organiser les choses. Cette nuit-là… J’ai rêvé de Lydie. Elle portait un costume que je supposais traditionnel de la région où nous étions. Elle était derrière son métier à tisser et ses doigts filaient si vite que je me sentis étourdie. Je voyais le bleu, le rouge, le jaune… Tout se mélangeait et soudain, une couverture reposait sur mes épaules.
Lorsque je me suis réveillée le lendemain matin, la même couverture était posée sur une chaise à côté de mon lit.
Comme vous le savez déjà, à ce jour personne ne sait où est Lydie. Je crois que cette couverture est un indice, un début de piste pour vous.
Je stoppais l’enregistrement et fixai la jeune femme qui se trouvait devant moi. Lydie Teixeira avait disparu depuis février et c'était seulement sept mois après que son amie venait me trouver pour que je la recherche. Un détail avait dû m’échapper. En plus, partir au bout du monde pour retrouver une personne qui a volontairement quitté l’hôtel où elle était en vacances me promettait une enquête fastidieuse.
Vous acceptez?
Bien sûr que non, je ne vais pas accepter. Qu’est-ce qu’elle croit mademoiselle la pragmatique ? Une telle expédition a un coût et ce n’est pas celui affiché dans la brochure qu’elle a lue dans la salle d’attente.
Non. Je pourrai vous expliquer pourquoi votre recherche est vouée à l’échec mais ce que je veux que vous compreniez vraiment, c’est que personne ne peut vous aider. Lydie était votre amie, soit. Mais même sa famille ne la cherche pas. Et ne me parlez pas de ce rêve! Vous avez très bien pu prendre une drogue à votre insu, ce qui expliquerait aussi le comportement de votre amie. Continuez votre vie comme vous l’avez fait jusqu'à présent ! Vous ne l’avez pas abandonnée ; vous avez fait ce que vous pouviez. Je ne suis pas non plus un homme mystique qui voit des signes à chaque coin de rue mais… Ce rêve vous disait peut-être que vous la reverrez un jour, au détour d’un prochain voyage qui sait.
Elle a quitté mon bureau, l’air encore plus déprimé qu’à son arrivée. Je ne pouvais pas faire autrement. Les gens ont parfois besoin d’entendre la vérité de la bouche d’un inconnu. En tout cas, j’espère sincèrement que je ne vais pas rêver de cette Lydie cette nuit en train de tisser un tapis bariolé et me retrouver avec le lendemain matin. Si au moins elle s'était prise de passion pour la cuisine, j'aurais eu un Pepiàn au réveil.
Lydie fixait les femmes en train de tisser. Les fils de couleur se mélangeaient rapidement, faisant grandir sous ses yeux les panchos.
“ Eh ferme la bouche et on y va ! L’excursion continue.
_ Ces femmes…
_ Quoi ? Tu es devenue une passionnée de travaux manuels ?
_ C’est tellement beau…
_ Oui c’est vrai. Les couleurs sont éclatantes. On peut s’en acheter si tu veux. Mais il faut faire vite ; le groupe repart.
_ Non ce n’est pas ça. Ça me rappelle juste… Ça va te paraître dingue mais j’ai cette impression de déjà-vu. “
Il faut que vous sachiez que Lydie n’était pas le genre de femme mystique qui voyait des signes dans chaque hasard de la vie. C’était une baroudeuse qui voulait découvrir les beautés du monde et vivre des sensations fortes.
Alors vous comprendrez que je ne me suis pas inquiétée de ses “drôles de sensations” devant ses femmes. J’ai dû la traîner pour que nous ne soyons pas distancées par le groupe mais sur le moment, cela m’a paru drôle, le genre d’anecdotes croustillantes qu’on raconte à ses proches en rentrant.
Le lendemain, 7h30 devant notre hôtel. Tout le groupe me fusillait du regard pendant que je discutais avec le guide. Leur colère était palpable.
“Écoutez, je vais rester ici pour m’occuper de sa recherche avec la police. Allez-y, continuez avec le groupe !
_ Mais nous partons à cent kilomètres d’ici. Comment nous rejoindrez-vous ? Je ne peux pas laisser des vacanciers en cours de circuit; je risque de perdre mon travail !
_ Je leur expliquerai. Je peux leur expliquer tout de suite si vous voulez. Partez je vous en supplie, ne retardez pas plus le voyage pour nous !
_ Je ne sais pas si je peux faire ça. Vous ne parlez même pas bien espagnol.
_ Je me débrouillerai, je vous assure. Partez, partez !
_ Je ne sais pas…”
J'étais à deux doigts de lui hurler dessus parce que je voyais bien que si notre discussion continuait encore, les autres vacanciers laisseraient libre court à leur colère. Après tout, Lydie voyageait avec moi et Lydie avait disparu depuis ce matin. Non, elle était partie “se balader” d’après le mot qu’elle nous avait laissé.
Le guide s’éloigna pour passer un appel. Un des vacanciers s’approcha de moi et ce que j’avais tant redouté se produisit. Tous s’en prirent à moi comme si j'étais responsable de sa fuite et du retard qu’elle occasionnait pour eux. Ce fut le guide qui calma les esprits en annonçant le départ.
“Un ami à moi, il est guide aussi, va venir. Il vous aidera. Avec la police et pour nous rejoindre à la prochaine étape.
_ Merci.
_Je compte sur vous. Si vous n’êtes pas avec nous ce soir, je devrais avertir l’agence et je ne sais pas ce qu’ils décideront.
_ Ne vous inquiétez pas, ils préféreront que nous arrêtions le circuit plutôt qu’arrêter tout le circuit. Cela coûterait trop cher.”
Il me sourit et me serra la main. Moi aussi j’espérais que Lydie et moi serions au rendez-vous ce soir-là.
Comme vous le savez, ce ne fut pas le cas. La police parlait de recherches mais disait que cela pouvait prendre du temps. Ils devaient aussi envoyer des hommes dans le village que nous avions visité la veille pour interroger tous ceux que nous avions croisés.
L’ami du guide me pressait pour prendre la route. J'étais déboussolée : je ne comprenais pas ce qui avait poussé Lydie à agir ainsi et en même temps je voulais retrouver le confort et la sécurité du circuit organisé.
“Il va perdre son travail si vous faites ça. Venez, la police nous tiendra au courant.
_ Je ne peux pas la laisser. C’est…
_ Votre femme?
_ Non ! C’est une amie et on ne laisse pas ses amis tout seuls dans un pays étranger.
_ Allons rejoindre Francisco et nous verrons demain ! Peut-être que vous pourrez revenir ici !
_ Refaire cent kilomètres dans l’autre sens ? Mais ça n’a pas de sens !”
L’homme soupira bruyamment. Francisco lui avait demandé de faire quelque chose et je lui mettais des bâtons dans les roues.
“Il va perdre son travail.
_ Vous me l’avez déjà dit. Et je vous ai dit que j’ai envoyé un email à l’agence pour leur expliquer la situation. Tout est ok.”
Tout n'était pas ok mais je ne pouvais pas partir. J’ai donc passé une nuit supplémentaire sur place.
Il faut que vous sachiez que je ne suis pas le genre de femme mystique qui voit des signes dans chaque hasard de la vie. Je ne suis pas non plus une baroudeuse mais je suis pragmatique et douée pour organiser les choses. Cette nuit-là… J’ai rêvé de Lydie. Elle portait un costume que je supposais traditionnel de la région où nous étions. Elle était derrière son métier à tisser et ses doigts filaient si vite que je me sentis étourdie. Je voyais le bleu, le rouge, le jaune… Tout se mélangeait et soudain, une couverture reposait sur mes épaules.
Lorsque je me suis réveillée le lendemain matin, la même couverture était posée sur une chaise à côté de mon lit.
Comme vous le savez déjà, à ce jour personne ne sait où est Lydie. Je crois que cette couverture est un indice, un début de piste pour vous.
Je stoppais l’enregistrement et fixai la jeune femme qui se trouvait devant moi. Lydie Teixeira avait disparu depuis février et c'était seulement sept mois après que son amie venait me trouver pour que je la recherche. Un détail avait dû m’échapper. En plus, partir au bout du monde pour retrouver une personne qui a volontairement quitté l’hôtel où elle était en vacances me promettait une enquête fastidieuse.
Vous acceptez?
Bien sûr que non, je ne vais pas accepter. Qu’est-ce qu’elle croit mademoiselle la pragmatique ? Une telle expédition a un coût et ce n’est pas celui affiché dans la brochure qu’elle a lue dans la salle d’attente.
Non. Je pourrai vous expliquer pourquoi votre recherche est vouée à l’échec mais ce que je veux que vous compreniez vraiment, c’est que personne ne peut vous aider. Lydie était votre amie, soit. Mais même sa famille ne la cherche pas. Et ne me parlez pas de ce rêve! Vous avez très bien pu prendre une drogue à votre insu, ce qui expliquerait aussi le comportement de votre amie. Continuez votre vie comme vous l’avez fait jusqu'à présent ! Vous ne l’avez pas abandonnée ; vous avez fait ce que vous pouviez. Je ne suis pas non plus un homme mystique qui voit des signes à chaque coin de rue mais… Ce rêve vous disait peut-être que vous la reverrez un jour, au détour d’un prochain voyage qui sait.
Elle a quitté mon bureau, l’air encore plus déprimé qu’à son arrivée. Je ne pouvais pas faire autrement. Les gens ont parfois besoin d’entendre la vérité de la bouche d’un inconnu. En tout cas, j’espère sincèrement que je ne vais pas rêver de cette Lydie cette nuit en train de tisser un tapis bariolé et me retrouver avec le lendemain matin. Si au moins elle s'était prise de passion pour la cuisine, j'aurais eu un Pepiàn au réveil.
Lydie fixait les femmes en train de tisser. Les fils de couleur se mélangeaient rapidement, faisant grandir sous ses yeux les panchos.
“ Eh ferme la bouche et on y va ! L’excursion continue.
_ Ces femmes…
_ Quoi ? Tu es devenue une passionnée de travaux manuels ?
_ C’est tellement beau…
_ Oui c’est vrai. Les couleurs sont éclatantes. On peut s’en acheter si tu veux. Mais il faut faire vite ; le groupe repart.
_ Non ce n’est pas ça. Ça me rappelle juste… Ça va te paraître dingue mais j’ai cette impression de déjà-vu. “
Il faut que vous sachiez que Lydie n’était pas le genre de femme mystique qui voyait des signes dans chaque hasard de la vie. C’était une baroudeuse qui voulait découvrir les beautés du monde et vivre des sensations fortes.
Alors vous comprenez que je ne me suis pas inquiétée de ses “drôles de sensations” devant ses femmes. J’ai dû la traîner pour que nous ne soyons pas distancées par le groupe mais sur le moment, cela m’a paru drôle, le genre d’anecdotes croustillantes qu’on raconte à ses proches en rentrant.
Le lendemain, 7h30 devant notre hôtel. Tout le groupe me fusillait du regard pendant que je discutais avec le guide. Leur colère était palpable.
“ Écoutez, je vais rester ici pour m’occuper de sa recherche avec la police. Allez-y, continuez avec le groupe !
_ Mais nous partons à cent kilomètres d’ici. Comment nous rejoindrez-vous ? Je ne peux pas laisser des vacanciers en cours de circuit; je risque de perdre mon travail !
_ Je leur expliquerai. Je peux leur expliquer tout de suite si vous voulez. Partez je vous en supplie, ne retardez pas plus le voyage pour nous !
_ Je ne sais pas si je peux faire ça. Vous ne parlez même pas bien espagnol.
_ Je me débrouillerai, je vous assure. Partez, partez !
_ Je ne sais pas…”
J'étais à deux doigts de lui hurler dessus parce que je voyais bien que si notre discussion continuait encore, les autres vacanciers laisseraient libre court à leur colère. Après tout, Lydie voyageait avec moi et Lydie avait disparu depuis ce matin. Non, elle était partie “se balader” d’après le mot qu’elle nous avait laissé.
Le guide s’éloigna pour passer un appel. Un des vacanciers s’approcha de moi et ce que j’avais tant redouté se produisit. Tous s’en prirent à moi comme si j'étais responsable de sa fuite et du retard qu’elle occasionnait pour eux. Ce fut le guide qui calma les esprits en annonçant le départ.
“ Un ami à moi, il est guide aussi, va venir. Il vous aidera. Avec la police et pour nous rejoindre à la prochaine étape.
_ Merci.
_ Je compte sur vous. Si vous n’êtes pas avec nous ce soir, je devrais avertir l’agence et je ne sais pas ce qu’ils décideront.
_ Ne vous inquiétez pas, ils préféreront que nous arrêtions le circuit plutôt qu’arrêter tout le circuit. Cela coûterait trop cher.”
Il me sourit et me serra la main. Moi aussi j’espérais que Lydie et moi serions au rendez-vous ce soir-là.
Comme vous le savez, ce ne fut pas le cas. La police parlait de recherches mais disait que cela pouvait prendre du temps. Ils devaient aussi envoyer des hommes dans le village que nous avions visité la veille pour interroger tous ceux que nous avions croisés.
L’ami du guide me pressait pour prendre la route. J'étais déboussolée : je ne comprenais pas ce qui avait poussé Lydie à agir ainsi et en même temps je voulais retrouver le confort et la sécurité du circuit organisé.
“ Il va perdre son travail si vous faites ça. Venez, la police nous tiendra au courant.
_ Je ne peux pas la laisser. C’est…
_ Votre femme?
_ Non ! C’est une amie et on ne laisse pas ses amis tout seuls dans un pays étranger.
_ Allons rejoindre Francisco et nous verrons demain ! Peut-être que vous pourrez revenir ici !
_ Refaire cent kilomètres dans l’autre sens ? Mais ça n’a pas de sens !”
L’homme soupira bruyamment. Francisco lui avait demandé de faire quelque chose et je lui mettais des bâtons dans les roues.
“ Il va perdre son travail.
_ Vous me l’avez déjà dit. Et je vous ai dit que j’ai envoyé un email à l’agence pour leur expliquer la situation. Tout est ok.”
Tout n'était pas ok mais je ne pouvais pas partir. J’ai donc passé une nuit supplémentaire sur place.
Il faut que vous sachiez que je ne suis pas le genre de femme mystique qui voit des signes dans chaque hasard de la vie. Je ne suis pas non plus une baroudeuse mais je suis pragmatique et douée pour organiser les choses. Cette nuit-là… J’ai rêvé de Lydie. Elle portait un costume que je supposais traditionnel de la région où nous étions. Elle était derrière son métier à tisser et ses doigts filaient si vite que je me sentis étourdie. Je voyais le bleu, le rouge, le jaune… Tout se mélangeait et soudain, une couverture reposait sur mes épaules.
Lorsque je me suis réveillée le lendemain matin, la même couverture était posée sur une chaise à côté de mon lit.
Comme vous le savez déjà, à ce jour personne ne sait où est Lydie. Je crois que cette couverture est un indice, un début de piste pour vous.
Je stoppais l’enregistrement et fixai la jeune femme qui se trouvait devant moi. Lydie Teixeira avait disparu depuis février et c'était seulement sept mois après que son amie venait me trouver pour que je la recherche. Un détail avait dû m’échapper. En plus, partir au bout du monde pour retrouver une personne qui a volontairement quitté l’hôtel où elle était en vacances me promettait une enquête fastidieuse.
Vous acceptez?
Bien sûr que non, je ne vais pas accepter. Qu’est-ce qu’elle croit mademoiselle la pragmatique ? Une telle expédition a un coût et ce n’est pas celui affiché dans la brochure qu’elle a lue dans la salle d’attente.
Non. Je pourrai vous expliquer pourquoi votre recherche est vouée à l’échec mais ce que je veux que vous compreniez vraiment, c’est que personne ne peut vous aider. Lydie était votre amie, soit. Mais même sa famille ne la cherche pas. Et ne me parlez pas de ce rêve! Vous avez très bien pu prendre une drogue à votre insu, ce qui expliquerait aussi le comportement de votre amie. Continuez votre vie comme vous l’avez fait jusqu'à présent ! Vous ne l’avez pas abandonnée ; vous avez fait ce que vous pouviez. Je ne suis pas non plus un homme mystique qui voit des signes à chaque coin de rue mais… Ce rêve vous disait peut-être que vous la reverrez un jour, au détour d’un prochain voyage qui sait.
Elle a quitté mon bureau, l’air encore plus déprimé qu’à son arrivée. Je ne pouvais pas faire autrement. Les gens ont parfois besoin d’entendre la vérité de la bouche d’un inconnu. En tout cas, j’espère sincèrement que je ne vais pas rêver de cette Lydie cette nuit en train de tisser un tapis bariolé et me retrouver avec le lendemain matin. Si au moins elle s'était prise de passion pour la cuisine, j'aurais eu un Pepiàn au réveil.
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