Capitulation

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Et pour quelques jours, quelques heures, tout semble normal. Ou du moins, vous tentez de vous en persuader. Oh, vous voyez bien la brume, accrochée aux bords de vos pensées. Mais tant que vous regardez droit devant vous, tant que vous n’y prêtez pas attention, elle ne peut pas vous atteindre, n’est-ce pas ? Votre rencontre était une erreur, un moment de faiblesse de votre part. Vous vous concentrez. Vous respirez à grandes goulées. Il paraît que c’est bon, aussi. Vous vous répétez que tout ira bien. Dans la journée, vous y croyez presque. Vous êtes occupé. Vous vous absorbez dans vos tâches.

Mais le soir. Le soir devient votre ennemi. Vous n’aviez jamais remarqué, auparavant, mais l’air s’y fait épais. Collant. Vous êtes installé à votre place habituelle. L’heure d’aller vous coucher arrive. Pourtant, vous ne bougez pas. Vous lever devient un effort de volonté, vous brosser les dents une tâche presque insurmontable. Chaque soir, cela vous semble un peu plus dur. Vous vous forcez. Vous froncer le nez, vous vous demandez si vous ne manquez pas de vitamines, Tout plutôt que de regarder ces vapeur flottant en face du miroir. Et puis finalement, vous ne pouvez plus reculer le moment fatidique. Vous voilà allongé dans votre lit. D’ordinaire, il vous suffit de vous lover dans vos draps et de fermer les yeux. Vous laissez vos pensées dériver, et vous voilà endormi. Rien de plus simple. Depuis combien de temps n’est-ce plus le cas ? Vous êtes bien incapable de le dire. La brume bruisse à l’orée de vos pensées. Elle frémit. Vous avez beau vous tourner, vous retourner, elle refuse de tout à fait lâcher prise. Toujours juste à la limite de votre perception. Vous blâmez le passant qui parle un peu trop fort à l’extérieur, ou encore ce rayon de lumière qui passe à travers les volets. Ou alors il fait trop chaud. Tout bien considéré, vous avez besoin d’un verre d’eau. Vous vous relevez, réarrangez vos draps, réessayez de vous recoucher. Rien n’y fait. Vos yeux restent ouverts à scruter l’obscurité. La pression au creux de votre poitrine vous empêche de trouver une position confortable. Le sommeil ne vient que de guerre lasse, et malgré tous vos espoirs, il ne vous repose pas. Vous vous réveillez un peu plus las. Un peu plus vide. Tandis que la brume en profite pour s’amasser toujours plus dense.

Vous prenez votre petit-déjeuner en tête à tête, en vous répétant que c’est fini. Ça n'a même jamais commencé. La brume, il y en a assez. Vous ouvrez les fenêtres en grand, agitez le balai. Rien n’y fait. Elle n’est jamais vraiment là où vous le pensez. Elle s’accroche à ce que vous avez de plus précieux, ou disparaît un instant pour mieux se reformer dans votre dos. Elle ne se fatigue pas. Vous, si. Et petit à petit, vous concédez du terrain. Là où vous refusiez de la laisser même apparaître dans votre salon, vous la tolérez tant qu’elle ne dépasse pas la table. Lorsque vous vous couchez, vous lui préparez un coussin au pied du lit. Maintenant, vous espérez l’apprivoiser comme un animal de compagnie que vous n’avez pas demandé à adopter. Vous vous dites qu’elle finira bien par se lasser, par chercher une maison où elle sera mieux nourrie.

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